Les caractères du Bas-Maine
Un plateau calcaire entaillé de vallées
Une pénéplaine calcaire au cœur du massif armoricain en frange du bassin parisien
La morphologie prédominante est celle d’un plateau, ou plus précisément celle d’une pénéplaine (plateau ondulé aplani par l’érosion) faiblement ondulée. Ce plateau ancien (de l’ère primaire) s’organise selon une structure majeure du Massif armoricain, de direction nord-ouest / sud-est : le Synclinorium de Laval. Entre les terrains schisteux ou gréseux de la Charnie au nord-est et la large zone d’affleurement des terrains briovéniens au sud-ouest, ce dernier a permis la conservation de terrains d’âge Ordovicien à Carbonifère. Les roches sont à dominante schisto-gréseuse et le carbonifère se caractérise par un calcaire spécifique aux couleurs bleutées qui affleurent parfois à flanc de vallée.
Des vallées encaissées caractéristiques de modelés karstiques
Très sinueuses et encaissées (de 20 à 50m), les vallées principales ont épousé la forme de grands méandres. Cette morphologie est fréquente, lorsqu’un réseau hydrographique s’est enfoncé dans un vieux socle gréseux. Les directions prédominantes des cours d’eau sont NNE-SSW, comme la Vègre, l’Erve et l’amont de la Vaige et du Treulon. Cette direction correspond à des directions de fracturation et failles qui guident l’orientation de ces vallées et se traduisent souvent par des coteaux abrupts.
Cet encaissement des vallées est amplifié quand les rivières traversent les couches calcaires. Cela se traduit par un relief de canyon (comme au nord de Saulges) caractéristique du modelé karstique. Le réseau hydrographique souterrain affluent a par ailleurs creusé des cavités naturelles qui ont servi très tôt d’abri naturel pour les premiers hommes. Outre le caractère spectaculaire et singulier de ce paysage de vallée karstique dans la région, la vallée de l’Erve présente un patrimoine archéologique et historique remarquable. L’ensemble formé par la vallée de l’Erve est un site inscrit depuis 1977 et classé pour sa partie centrale depuis 2003 (y compris le réseau souterrain des grottes).
Des crêtes et vallons secondaires qui marquent la direction armoricaine
Les vallons secondaires sont moins encaissés et semblent amplifier les ondulations de la pénéplaine. Ils suivent quant à eux majoritairement la direction armoricaine NO-SE, relayée sur l’horizon par les crêtes boisées marquantes qui encadrent l’unité. Leurs coteaux doux les rendent moins perceptibles dans le paysage que les vallées principales mais leur occupation du sol spécifique (bocage) les distinguent particulièrement.
Une richesse des roches exploitées qui marque le paysage
Des matériaux de construction caractéristiques de la transition entre Massif Armoricain et Bassin Parisien
Les grès roux, localement appelés roussard, présents dans la frange est de l’unité et les tuiles plates rappellent sans aucun doute l’architecture de la champagne sarthoise toute proche. En revanche, la mise en œuvre des calcaires primaires armoricains aux teintes bleutées tranche clairement des calcaires plus jaunes du bassin parisien que l’on retrouve autour de la vallée de la Vègre et plus communément dans la champagne sarthoise. Les enduits et joints ocre jaunes redonnent des teintes chaudes particulièrement lisibles dans le paysage.
Plus à l’ouest, on retrouve grès, schistes et granites dans les murs et l’ardoise devient majoritairement présente dans les constructions.
La transition dans les couleurs de l’architecture marque ainsi la transition géologique entre Massif Armoricain et Bassin Parisien.
Une exploitation ancienne du sous-sol
Si les nombreux anciens fours à chaux sont encore présents dans le paysage, la richesse géologique est aujourd’hui fortement exploitée dans d’importantes carrières dont on discerne le plus souvent les infrastructures (tapis, cribles et concasseurs) ou les stocks coniques de matériaux.
Un plateau cultivé ouvert ponctué de boisements
Une mosaïque de grandes cultures
Les grandes cultures céréalières (principalement du blé et de l’orge), maïsiculture et cultures de colza dominent sur la pénéplaine calcaire. Cette diversité de cultures s’organise dans une mosaïque de grands champs (de 5 à 10 ha) alternant les motifs au gré du rythme des saisons (labours, floraison des colzas, pousse des verts tendres des blés aux jaunes des moissons, écrans verts sombre des maïs…) et des rotations de cultures sur les parcelles d’une année sur l’autre. Elle souligne les amples ondulations du relief et ouvrent de larges panorama sur le paysage.
Des petits boisements qui ponctuent le plateau et des forêts qui marquent l’horizon
La présence de petits boisements sur le plateau cultivé ouvert contribue à animer les vues sur ce paysage ouvert presque sans repères. Ces boisements constituent des repères visuels relayant en second plan les crêtes boisées qui marquent les horizons avec au nord les crêtes du Bois des Vallons et les forêts de Grande et de Petite Charnie et au sud les forêts de Bellebranche et Bois de Bergault. Ces boisements accompagnent en général un important patrimoine de châteaux et l’ancienne abbaye cistercienne de Bellebranche qui se distinguent souvent à peine dans la lisière boisée.
Des reliquats de bocage qui donnent parfois une impression de grand parc
En bordure de plateau, ou à l’appui des boisements, quelques haies bocagères, des lignes d’arbres de haut jet ou des chênes isolés rappellent la présence d’une ancienne trame bocagère. Comme le montre le volet des dynamiques paysagères et les descriptions de l’atlas des paysages de Mayenne de 2002 (où le bocage était encore cité comme structurant y compris sur le plateau), les haies bocagères sont en importante régression. Il en résulte un paysage de grandes cultures alternant avec des prairies sur les franges du plateau ponctué de bosquets ou d’arbres isolés donnant parfois une impression de parc paysager rural à l’anglaise.
Des vallons bocagers ou accompagnés de landes et boisements calcaires
Une trame bocagère qui structure les pentes et les fonds de vallée
La trame bocagère est très présente dans les vallons secondaires et les vallées principales. Ainsi sur les pentes les plus douces, les haies épaisses sur talus soulignent les courbes de niveau et bordent les chemins creux qui relient le plateau aux fonds de vallée. Cette présence encore forte de la trame de haies dans les vallées crée un véritable contraste entre les paysages ouverts de la pénéplaine et les ambiances plus fermées de la vallée. Les haies de chênes, merisier et parfois quelques ormes, au houppier remonté, sur les haies du revers de plateau et des coteaux doux laissent place aux lignes de saules et aulnes dans les fonds de vallées humides et dans les ripisylves.
Des boisements et peupleraies qui ferment le paysage des vallées
Très présents sur les coteaux les plus pentus des vallées, les boisements tendent à fermer l’espace visuel des vallées tout en adoucissant leur topographie naturelle. Ces boisements de coteaux sont parfois appuyés de petites plantations de conifères qui se distinguent particulièrement dans le paysage par leur silhouette graphique et leur teinte sombre.
De même, les plantations de peupliers dans les fonds de vallée et parfois même en remontant sur les coteaux doux referment le paysage dans l’axe de la vallée. Ces peupleraies constituent même des écrans végétaux qui masquent les coteaux et interrompent les vues sur la pénéplaine.
La vallée de l’Erve est marquée par la présence d’une flore calcicole et aérothermique ce qui vaut à ce secteur d’être en Natura 2000 : le buis et les genévriers y poussent spontanément sur les plateaux et falaises calcaires carbonifère, donnant des accents plus méridionaux aux paysages de ces secteurs.
Un bâti de qualité qui s’appuie sur les trames végétales
Un patrimoine remarquable de châteaux et logis
La richesse agricole de cette région se traduit non seulement dans les importants châteaux et leur grand parc comme celui de Thévalles et son moulin sur l’Erve, mais aussi dans les logis (du XVème au XVIIème) imposants adossés de granges massives. Ces terres anciennes de polyculture élevage ainsi que de cultures de plantes pour les tissages (lin, chanvre) constituaient un terroir riche.
Une présence importante de fermes modèles
Au XIXème, beaucoup de grands propriétaires fonciers, abandonnant leurs fonctions officielles pour ne pas servir "l’usurpateur" Louis-Philippe, vinrent s’installer sur leurs domaines, souvent de plusieurs centaines d’hectares. Ils organisèrent leur domaine avec de véritables fermes modèles, souvent en métayage, reconnaissables à leur architecture homogène, façades symétriques avec des encadrements en briques. Les dépendances, souvent symétriques elles aussi, sont implantées en U et délimitent une cour exposée au sud. Ces propriétaires s’employèrent à mettre leurs terres en valeur par des travaux de drainage, d’amendement et de reconstruction de bâtiments, suivant les développements des sciences agronomiques se développant à l’époque.
Une trame végétale qui masque ou accompagne le bâti rural
A l’abri des vents du plateau et proche de l’eau, le bâti rural s’implante à l’appui des masses boisées et de la trame bocagère des vallées. Il est donc très discret et il se découvre bien souvent au dernier moment dans le paysage. Cette trame boisée, qui enchâsse le bâti, est bien souvent complétée par des vergers extensifs qui prolongent les jardins assurant les transitions entre le logis et les cultures. L’ensemble de la cour et des jardins peut être par ailleurs ceint d’un clos de murs caractéristique sur cette unité.
Des bourgs qui marquent la charnière entre plateau et vallées principales ou vallons
Implantés majoritairement sur la pénéplaine, sur les principaux axes viaires est-ouest, les bourgs constituent des points de repères marquants dans le paysage car ils émergent de la frange bocagère du plateau et dominant les vallées. Leur clocher, à toiture en bâtière caractéristique (toiture à deux pans du clocher comme à Saint-Pierre-sur-Erve), domine le cœur de bourg souvent très compact. Dans ces bourgs, le registre de murs du bâti rural est décliné le long des voies, voir dessine de façon très nette la limite urbanisée du bourg.
Valorisant le caractère patrimonial de leur bourg, plusieurs communes du Bas-Maine soignent l’aménagement de l’espace public. Ces bourgs bordent souvent un plan d’eau aménagé en général en base de loisirs qui constituent le point de départ de nombreux itinéraires de randonnée.
Un bâti agricole contemporain de qualité marqué par l’effet des labels et des filières d’élevage
L’organisation en filières de production (notamment laitière et volaillère) induit pour les agriculteurs de suivre des cahiers des charges de production qui intègrent des préconisations en matière d’aménagement des bâtiments et des espaces extérieurs. Ainsi, pour le label des poulets de Loué, les bâtiments d’élevage sont conçus et aménagés sur un modèle commun : les bâtiments sont ouverts sur un espace extérieur d’au moins 2m² par animal appelé parcours. Ces derniers sont composés de prairies, de haies et d’arbres, abris naturels recherchés par les volailles craignant le soleil de l’été et les pluies de l’automne. Basées sur un principe d’autosuffisance (production de grain et paille pour les volailles), ces exploitations constituent un motif paysager identitaire rayonnant très largement autour de Loué.
Un paysage traversé…
Suivant les directions imposées par la topographie et les liaisons entre les principales agglomérations les plus proches (Laval, Sablésur-Sarthe et le Mans), les axes viaires principaux se déclinent suivant la direction NO/SE. Les anciennes nationales (D21 et D57) se distinguent par leur rectitude et leur large gabarit qui s’impose sur les traversées de bourgs. Seuls les bourgs proches de ces axes présentent des développements urbains plus importants (zones d’activités et quartiers pavillonnaires).
A ces axes s’ajoutent l’autoroute A81 et la ligne ferroviaire grande vitesse en construction en 2014/2015 qui constituent des éléments de rupture dans le paysage. Ces voies font l’objet d’un développement spécifique dans la partie dynamique d’évolution des paysages.
Pour aller plus loin sur le patrimoine culturel et naturel
Patrimoine culturel :
- Consulter l’article Les paysages institutionnalisés
- Consulter la rubrique "Sites et paysages" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Consulter l’Atlas des Patrimoines du Ministère de la Culture
- Consulter les Bases Architecture et Patrimoine du Ministère de la Culture
Patrimoine naturel :
- Consulter la rubrique "Patrimoine naturel" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Trame verte et bleue : consulter le Schéma régional de cohérence écologique (SRCE) des Pays de la Loire
Sources bibliographiques
- CERESA, Atelier TRIGONE. Atlas des paysages du département de la Mayenne. 3 tomes. DIREN Pays-de-La-Loire, 1999.
- F. MÉNILLET, J. PLAINE, B. MANIGAULT, A. LE HÉRISSÉ. Notice de la carte géologique au 1/50000ème – feuille de Meslay-du-Maine. Éditions du BRGM, ORLÉANS, 1988.