Les caractères des marches entre Maine et Bretagne
Un socle granitique au relief mouvementé
Un massif granitique profondément déformé
L’unité paysagère des marches entre Maine et Bretagne s’inscrit dans le massif armoricain sur un socle constitué principalement de granites, de schistes et de grès du Briovérien. Le relief de l’unité paysagère est la résultante d’une longue histoire géologique continentale qui a aplani progressivement le relief et formée cette pénéplaine inclinée vers la vallée de la Mayenne à l’Est.
De nombreux accidents tectoniques ont induit des formations collinaires, des effondrements qui ont modelé le massif granitique de Gorron en induisant une orientation préférentielle nord-nord-ouest / sud-sud-est. Cette histoire géologique de l’unité et sa transcription dans le relief d’aujourd’hui sont détaillées dans le « pour en savoir plus sur l’histoire géologique de l’unité et sa transcription dans le relief d’aujourd’hui » ci-après. Il faut retenir les évènements majeurs suivants :
- Une pénéplaine découpée en 3 blocs :
- Larchamp,
- Saint-Denis-de-Gastines
- et Saint-Mars-sur-Colmont
- La colline étroite et linéaire de la Pellerine
- Le bassin d’effondrement de l’Ernée au sud de l’unité dans les schistes briovériens : cette dépression topographique liée à un accident géologique présente un relief moins marqué que sur le reste de l’unité ; mais cadré par les coteaux d’Ernée de Juvigné et de la forêt de Mayenne
- Les collines armées par les grès armoricains sur lesquelles s’est développée la forêt de Mayenne qui marque de fait l’horizon au sud-est
Tous ces évènements ont conduit à un relief ondulé, collinaire qui peut sembler sans accident majeur en fonction de l’orientation du parcours de découverte du paysage. Il induit un paysage dynamique dans son appréhension, dans la succession de points hauts et de creux de vallons. Les secteurs de plateaux plans horizontaux sont relativement rares et principalement situés sur la frange
Un réseau hydrographique particulièrement développé autour de l’Ernée
L’Ernée est la rivière principale qui irrigue l’unité. Elle est secondée par un chevelu hydrographique très dense composé de la Futaie au nord-ouest, la Colmont (affluent de la Mayenne) baignant Gorron au nord-est et la Vilaine prenant sa source près de Juvigné, et confortée par la multitude de leurs affluents respectifs. L’unité s’apparente ainsi à un plateau cristallin fortement incisé par un réseau presque « labyrinthique » de vallées.
La crête gréseuse de la forêt de Mayenne est ceinturée de vallées formant comme un écrin autour de la forêt de Mayenne.
L’eau est très présente, en lien avec la nature relativement imperméable du sol. Au creux de vallons parfois soumis à la fermeture par colonisation des ligneux, les cours d’eau sont en général peu visibles. Parfois au contraire ils traversent des zones de pâture et se dévoilent. Dans les vallons les moins pentus les cultures s’étendent au détriment des pâtures et peuvent fragiliser les berges et rives de ce réseau hydrographique. L’obligation de mettre en place des bandes enherbées en bordure de cours d’eau limite aujourd’hui fortement ce phénomène.
De nombreux étangs, souvent de retenue artificielle, se répartissent sur l’ensemble de l’unité, au fil des ruisseaux. Ils sont principalement utilisés comme réserves de pêche et constituent des milieux naturels et récréatifs de qualité.
Les cours d’eau sont par ailleurs animés d’un riche patrimoine bâti composé de moulins, de forges… qui leur confère un caractère patrimonial et perpétue le souvenir des activités passées.
Une influence bretonne dans l’architecture
Une architecture de granite
Grès et granites ont donné leur couleur sombre et sobre au bâti rural ancien, dans une tonalité aux camaïeux de gris bruns colorés. Le granite est particulièrement présent et affirme l’influence bretonne de l’architecture. La palette végétale diversifiée avec notamment châtaigner que l’on retrouve dans les haies en arbre de grand développement mais aussi en cépées sur talus, explique que quelques bâtiments, malheureusement rares, portent encore leur toiture en bardeaux de châtaigner. Sinon les bâtiments sont traditionnellement couverts en ardoise.
Un bâti rural aux volumes imposants intégrés dans le paysage par ses couleurs sombres et le végétal très présent Répondant à la logique de ce paysage bocager, l’habitat traditionnel rural est dispersé. La forme habituelle est la longère, souvent complétée par une ou deux annexes dessinant une cour en L ou en U. Ces constructions sont accompagnées de vergers, d’arbres et de jardins. Ainsi, le bâti rural par ailleurs souvent entouré de végétal (haies bocagères, échappées de jardins, vergers…), s’il ponctue le paysage, reste discret, même si les volumes dans cette unité sont plutôt massifs voire imposants.
Les principaux éléments ponctuels du patrimoine rural sont (source Atlas des paysages de la Mayenne 1999) :
- Le four à pain : En règle générale, il est adossé à la face arrière ou latérale de la maison, couplé avec une cheminée intérieure. Essentiellement cylindrique, en briques et maçonnerie de moellons, il est recouvert d’une toiture schisteuse ou de tuiles. Il peut aussi être totalement séparé de la maison et constituer une entité spécifique.
Four à pain associé à la maison (La Dorée) - Le pigeonnier : Il se présente sous la forme d’une tourelle coiffée d’une toiture conique. Il peut avoir 2 étages. Parfois le pigeonnier est compris dans la maison elle-même : les caractéristiques résident dans les petites ouvertures couplées et dans les pierres plates débordantes en pignon.
- Le hangar (loge) : Il constitue l’un des côtés de la cour. Il était autrefois recouvert de chaume. Il est soit à murs ouverts, soit fermé sur 3 côtés par des grandes planches de bois (essentages) posées horizontalement en se chevauchant.
- Le puits : L’architecture du puits varie avec la profondeur de la nappe d’eau souterraine. Lorsqu’elle est superficielle, c’est le pompage à contrepoids qui prédomine. Quand la nappe est difficile à atteindre, c’est le pompage à manivelle, le puits à treuil.
Les fermes en activité aujourd’hui sont des exploitations de plus en plus importantes, lié notamment à une augmentation des formes sociétaires (surface, taille des élevages…). Elles sont entourées de nouveaux bâtiments aux volumes encore plus imposants et qui tranchent souvent dans leur implantation, leurs couleurs de bardages et textures (bois, métalliques). Du fait des moutonnements constants du relief, les implantations des gros volumes nécessitent parfois de lourds terrassements.
Patrimoine de châteaux et de logis identifié par leurs parcs arborés
L’unité paysagère des marches entre Maine et Bretagne ne compte finalement que peu des châteaux forts défensifs hérités des guerres entre les royaumes des Francs et de Bretagne (connus sous l’appellation des châteaux des marches de Bretagne – exemple du château de Lévaré). Cependant le paysage de l’unité est ponctué de nombreux logis, châteaux post-renaissance, demeures associées à la villégiature.
Ils sont nombreux, dispersés sur l’ensemble de l’unité, peut-être un peu plus à proximité des vallées, mais aussi dans les bourgs marquant notamment les entrées de bourgs… mais ils se cachent. Ils se repèrent grâce à leur domaine, à la silhouette caractéristique des grands feuillus de leurs parcs tels les hêtres pourpres ou quelques conifères, aux grandes allées bordées d’arbres qui mènent à eux. Les édifices ne s’exposent que rarement, toitures, cheminées se devinent parfois, une façade apparait subrepticement dans une fenêtre végétale, ou à l’occasion d’une ouverture dans la vallée. Ils animent donc le paysage pour qui sait les deviner ! Des jeux de covisibilité avec les châteaux en lisière forestière de la forêt de Mayenne s’instaurent
Des bourgs repères, perchés sur les crêtes et points hauts
Les bourgs sont majoritairement implantés en hauteur, étagés sur les coteaux, exposés au sud, avec leurs églises en promontoire qui constituent des points d’appel et de repère du fait architecture diversifiée. Ces bourgs ruraux perchés contribuent ainsi à la mise en scène et au dynamisme visuel de ce paysage.
Les développements urbains modérés se structurent principalement sur l’axe Mayenne – Ernée – Fougères même si le territoire compte quelques gros bourgs (comme Fougerolles-du-Plessis, Landivy) et une petite ville rurale au nord-est, Gorron (cf. Chapitre sur les dynamiques paysagères)
Une influence normande dans le bocage
Le paysage de l’unité paysagère des marches entre Maine et Bretagne se caractérise par un paysage de bocage, strié de haies et parsemé de bosquets. Les zones de bocage sont réservées à de plantureux pâturages destinés à l’embouche des bovins et aux petites productions céréalières et fourragères pour l’alimentation des troupeaux. Les zones plus planes ont subi un remembrement plus fort et sont propices aux cultures (maïs pour le bétail, blé, orge, colza, pois).
Le bocage présente la particularité d’être constitué notamment de chênes et de châtaigniers. Ces derniers sont généralement recépés sur talus, gérés en cépées remontées ou en tiges émondées.
Ce mode de gestion donne de la transparence à ce bocage. La dégradation du bocage s’identifie au travers d’une maille plus ouverte voire éclatée et aussi de la disparition de la trame arbustive notamment sur les hauteurs. Ainsi les plateaux hauts se caractérisent par une grande profondeur paysagère, des effets de transparences qui, associés aux ondulations du relief, induisent une grande perméabilité visuelle. Dans les vallons très nombreux, le bocage est encore très dense et se caractérise par une maille lisible, des haies plus complètes avec trame arbustive pour partie préservée. Cela induit une fermeture des paysages de l’enfilade des prairies humides qui accompagnent les cours d’eau.
Pour en savoir plus sur les paysages de bocage.
Une campagne à l’image d’un parc
Le bocage est associé à une ponctuation du paysage par des arbres isolés (châtaigner, chêne, poiriers et pommiers, hêtre, quelques conifères Sapins …), des bosquets isolés qui donnent à la campagne des allures de parcs, voire même de parc paysager à l’anglaise, confortant les grands parcs de châteaux. Les vergers traditionnels (pommiers et de poiriers), en accompagnement des fermes et ensembles bâtis, constituent un motif paysager récurrent tiennent aussi leur place dans ce paysage.
Parfois ces arbres isolés jouent le rôle d’arbres marqueurs identifiant un hameau, un début de chemin. Ces motifs végétaux renforcent la renommée de cette unité pour ces jardins remarquables et reconnus comme le jardin du Clivoy à Chailland, Les Renaudies à Colombiers-du-Plessis, le jardin de La Pellerine…
Pour aller plus loin sur le patrimoine culturel et naturel
Patrimoine culturel :
- Consulter l’article Les paysages institutionnalisés
- Consulter la rubrique "Sites et paysages" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Consulter l’Atlas des Patrimoines du Ministère de la Culture
- Consulter les Bases Architecture et Patrimoine du Ministère de la Culture
Patrimoine naturel :
- Consulter la rubrique "Patrimoine naturel" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Trame verte et bleue : consulter le Schéma régional de cohérence écologique (SRCE) des Pays de la Loire
Sources bibliographiques
- CERESA, Atelier TRIGONE. Atlas des paysages de la Mayenne. 4 tomes. DIREN Pays de la Loire, DDE Mayenne, 1999.
- Conseil de développement du Pays de Haute-Mayenne. La Charte Urbanistique et Paysagère de la Haute Mayenne. 2013.
- Communauté de communes l’Ernée. Schéma de Cohérence territoriale rural de l’Ernée. 2014.
- LEROUGE G., BESOMBES J.C., CUNEY M., LE GALL J., GIGOT P., PIVETTE B., LEBRET P., VERNHET Y., GAUQUELIN J.L., CHÈVREMONT Ph. Notice explicative de la carte géologique. France (1/50 000), feuille Ernée (284). Orléans : BRGM, 2011. 181 p.
- LEROUGE G., BESOMBES J.C., PIVETTE B., LE GALL J., GIGOT P., LEBRET P., VERNHET Y. Carte géologique. 2009.