Les dynamiques paysagères du plateau calaisien

publié le 7 décembre 2015 (modifié le 3 janvier 2017)

Exemple d’évolution du secteur de Saint-Calais

Dans le cadre de l’analyse des dynamiques paysagères, pour chaque unité paysagère, un secteur particulier est choisi de manière à caractériser, en tant qu’échantillon représentatif de l’unité, une large partie des dynamiques vécues à l’échelle de l’unité. Cette analyse s’appuie notamment sur la comparaison des données cartographiques et des photographies aériennes à différentes époques données. Ce zoom est représentatif mais non exhaustif des dynamiques vécues à l’échelle de l’unité. Les dynamiques de l’unité qui ne s’illustrent pas à travers cet exemple sont donc détaillées à la suite.

La vallée, support de l’implantation primitive

Saint-Calais – Carte d'état-major (1866) - (source : IGN) en grand format (nouvelle fenêtre)
Saint-Calais – Carte d’état-major (1866) - (source : IGN)



Fondée dès le VIème siècle par l’ermite Karilef (Calais), le bourg primitif de Saint-Calais s’installe dans la vallée de l’Anille, qui prend sa source au sein du Bois de Marchevert à quelques encablures au nord. Maintes fois détruit et rebâti autour de l’abbaye jusqu’au XVème siècle, du tissu urbain, seules quelques maisons anciennes datant des XIVème et XVIIème siècles subsistent encore aujourd’hui. Le patrimoine architectural dominant de la ville date du XIXème siècle, époque à laquelle la ville se développe fortement pour devenir une polarité dynamique à l’échelle départementale, portée par les activités liées au tissage de la laine et la tannerie. De nombreux équipements investissent alors Saint-Calais : tribunal, halles…
La carte d’État-major de 1866 montre que les premiers développements de la ville s’effectuent dans la vallée, en accord avec les besoins induits par les activités économiques dominantes qui nécessitent la présence de l’eau. Si quelques hameaux et habitats dispersés occupent les plateaux avoisinants, les coteaux ne sont que très faiblement occupés.

Un plateau calcaire ouvert par de grandes cultures
La comparaison des orthophotos de 1958 et 2010 pour le secteur de Saint-Calais montre les évolutions profondes qui ont impacté les paysages ruraux. Sur les grands plateaux calcaires, incisés par les vallées secondaires, le parcellaire a connu des dynamiques de simplification de son maillage à partir de regroupements de grande ampleur répondant aux attentes de l’intensification de l’activité agricole. Il s’agit ici davantage d’un rassemblement de parcelles déjà existantes que d’un remembrement global qui se traduit souvent par une géométrie très quadrillée du parcellaire. En effet, ici les limites parcellaires ont conservées certaines caractéristiques qui participent à qualifier le paysage, elles sont découpées selon les courbes du relief. Les vallées et micro-vallées servent souvent de point d’appui à ce découpage.

Conséquence directe de l’évolution du parcellaire liée aux dynamiques d’intensification de l’activité agricole et au développement des cultures céréalières, le réseau bocager a fortement diminué. Ainsi, du bocage assez dense qui perdurait jusqu’aux années 1980, il ne reste que quelques rares haies de deux types. Les paysages ruraux ouverts se caractérisent désormais par leur grande échelle (vastes parcelles agricoles non cloisonnées).

La mutation des paysages ruraux se définit également par la présence grandissante d’un bâti agricole au volume imposant, dont la perception est accentuée par l’ouverture du paysage.

Saint-Calais – Orthophoto 1958 (source : IGN) en grand format (nouvelle fenêtre)
Saint-Calais – Orthophoto 1958 (source : IGN)

Saint-Calais – Orthophoto 2010 (source : IGN) en grand format (nouvelle fenêtre)
Saint-Calais – Orthophoto 2010 (source : IGN)

L'ouverture des paysages à l'est de Saint-Calais accentue la visibilité sur les flux routiers supportés par le contournement de la ville (Saint-Calais – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
L’ouverture des paysages à l’est de Saint-Calais accentue la visibilité sur les flux routiers supportés par le contournement de la ville (Saint-Calais – 2015)

Sur les plateaux occupés par les grandes cultures, la déstructuration de la maille bocagère contribue à ouvrir le paysage (Saint-Vincent-du-Lorouër – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Sur les plateaux occupés par les grandes cultures, la déstructuration de la maille bocagère contribue à ouvrir le paysage (Saint-Vincent-du-Lorouër – 2015)



La fermeture lente des paysages de vallée
A l’inverse de ce que l’on observe au niveau des plateaux agricoles, c’est une fermeture des paysages qui s’observe dans la vallée, bien que celle-ci reste modérée dans le cas de Saint-Calais. Les vallées présentent désormais un paysage assez diversifié avec des haies bocagères qui tendent à se densifier et des peupleraies qui se développent. A ces éléments qui viennent masquer les vues lointaines du paysage des vallées, se mêle un petit parcellaire agricole associé à des activités de polyculture et notamment des espaces de prairies pâturées par des bovins et quelques ovins.

Le renforcement des boisements au niveau des vallées contribue à fermer le paysage (Saint-Vincent-du-Lorouër – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Le renforcement des boisements au niveau des vallées contribue à fermer le paysage (Saint-Vincent-du-Lorouër – 2015)



Le développement diffus de l’urbanisation sur les coteaux
Les orthophotos de 1958 et 2010 montrent une diffusion de l’urbanisation sur les coteaux surplombant la vallée de l’Anille et le centre historique. Le développement industriel de Saint-Calais autour des années 1960 nécessite d’accroître l’offre en logements et progressivement de nouvelles formes urbaines s’inscrivent dans le paysage de la ville (développement du quartier d’habitat ouvrier de Tiron rouge, construction de logements collectifs…), ainsi que des équipements d’envergure comme l’hôpital de Saint-Calais.
Les extensions urbaines se sont majoritairement développées par petites opérations de pavillons individuels, qui ont investi progressivement le haut des coteaux de la rive gauche mais aussi de manière linéaire l’ensemble des axes qui convergent vers le bourg. A noter que l’ardoise, traditionnellement utilisée sur le secteur, est de plus en plus délaissée en faveur des tuiles sur les toits des constructions récentes.

La diffusion de l'urbanisation a investi les coteaux surplombant la vallée et renforce ainsi les phénomènes de covisibilité (Saint-Calais – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
La diffusion de l’urbanisation a investi les coteaux surplombant la vallée et renforce ainsi les phénomènes de covisibilité (Saint-Calais – 2015)

Les développements urbains contemporains sous forme pavillonnaire continuent à se diffuser sur les coteaux surplombant la rivière (Saint-Calais – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Les développements urbains contemporains sous forme pavillonnaire continuent à se diffuser sur les coteaux surplombant la rivière (Saint-Calais – 2015)



Des voies de contournement comme support d’un développement à grande échelle

Carte IGN 2013 du secteur de Saint-Calais (source : Scan 25 - IGN) en grand format (nouvelle fenêtre)
Carte IGN 2013 du secteur de Saint-Calais (source : Scan 25 - IGN)



La RD 357 qui traverse la ville dans un sens est-ouest relie le Mans à Orléans et supporte un trafic grandissant, notamment de poids lourds. Ces nuisances pour le centre urbain ont encouragé l’aménagement d’un contournement de la ville sur la partie nord-est. Cette déviation, qui prend l’apparence d’une ceinture de la partie agglomérée de la rive gauche, contribue à enclaver des terres agricoles qui, par conséquence, font l’objet d’une urbanisation accélérée. Avec une bonne accessibilité et peu de contraintes, cet espace accueille des constructions résidentielles, mais aussi et surtout de grands équipements, notamment sportifs et scolaires, et des bâtiments d’activités de très grande envergure. Le paysage de l’entrée est de la ville a ainsi été radicalement bouleversé durant les dernières décennies. Malgré un potentiel d’urbanisation encore important à l’intérieur de la voie de contournement, cette dernière ne constitue pas une limite au paysage urbain. Récemment, une nouvelle zone d’activités à émergé à l’extérieure de cette ceinture urbaine.

A Saint-Calais, les silhouettes d'entrée de ville sont de plus en plus imposantes (Saint-Calais – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
A Saint-Calais, les silhouettes d’entrée de ville sont de plus en plus imposantes (Saint-Calais – 2015)



Cette première déviation, mise en place en 1985, a ainsi contribué à étendre l’urbanisation sur le plateau. Déclarée d’utilité publique en 2012, une nouvelle déviation de quatre kilomètres est prévue en vue de contourner la ville par le nord, en passant au bout du lac grâce à un viaduc de plus de cent mètres de longueur qui permettra de franchir l’Anille. Cette nouvelle déviation devrait pouvoir être mise en service en 2017.

Source : Les travaux de la déviation de Saint-Calais (RD 357) commencent par le rond-point de la Pocherie, Conseil Général de la Sarthe, Communiqué de presse, 10 décembre 2012 en grand format (nouvelle fenêtre)
Source : Les travaux de la déviation de Saint-Calais (RD 357) commencent par le rond-point de la Pocherie, Conseil Général de la Sarthe, Communiqué de presse, 10 décembre 2012



L’aménagement récréatif de la vallée
En amont du bourg de Saint-Calais, des aménagements ont permis de créer un plan d’eau dans le lit de la vallée de l’Arnille. L’orthophoto de 1958 montre qu’avant cette intervention, le lit majeur de la vallée prend la forme d’une prairie humide au sein de laquelle le bâti à vocation résidentielle et d’activités n’a pas sa place du fait du risque d’inondabilité de la zone. Ce site fait aujourd’hui l’objet d’une mise en valeur à but récréatif avec la réalisation d’une base nautique, de parcs de jeux, mais également le développement d’un parc d’hébergement de plein air.

La présence de la retenue d'eau au nord du bourg de Saint-Calais favorise le développement des équipements à vocation ludique et touristique (Saint-Calais – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
La présence de la retenue d’eau au nord du bourg de Saint-Calais favorise le développement des équipements à vocation ludique et touristique (Saint-Calais – 2015)

Des dynamiques de valorisation des paysages boisés de l’unité

La forêt de Bercé connaît aujourd’hui des usages multiples : production de bois, chasse, loisirs… Par ailleurs, le massif est réputé pour la production de chêne de très haute qualité, mais de plus en plus rare en forêt. La tendance aujourd’hui évolue vers un raccourcissement des cycles de production avec un prélèvement plus soutenu de la matière. Le maintien de la production de chêne dans la forêt de Bercé constitue une problématique forte sur le territoire.
Aujourd’hui, les activités se tournent de plus en plus vers le tourisme vert qui se traduit notamment par une augmentation de la fréquentation de la forêt pour les loisirs. Les aménagements destinés à faire découvrir ces boisements ou à y pratiquer des activités sont de plus en plus présents dans le secteur. Certains sites sont ainsi particulièrement concernés : la futaie du Clos (chênes plantés au XVIIème siècle), la fontaine de la Coudre accompagné d’un circuit découverte, la source de l’hermitière (entrée magistrale en forêt depuis Saint-Vincent-de-Lorouër), des arbres identifiés - chêne Boppe foudroyé en 1934 mais dont la souche est conservée, et chêne du Rouleau de la Roussière (qui atteint 43 mètres de hauteur), la vallée des pierres (alternance chêne sessiles et douglas).
280 kilomètres de circuits balisés s’offrent aux visiteurs pour parcourir le massif à pied, en vélo, à cheval. La mise en avant du patrimoine forestier est par ailleurs relayée par le musée Carnuta de Jupilles consacré au rapport entre l’homme et la forêt.
Par ailleurs, ce type de production de chênes de très haute qualité est très demandée et de plus en plus rare en forêt. Le maintien de cette production est donc assuré. Les cycles de production du chêne vont probablement être raccourcis avec des prélèvements plus élevés à l’hectare, ce qui va conduire à des rotations plus rapides. (Source : Centre Régional de la Propriété Forestière des Pays-de-la-Loire)

La forêt de Bercé accueille des équipements à vocation récréative : Futaie des Clos Chêne Rouleau de la Roussière (forêt de Bercé – 2015) (Source : CAUE de la Sarthe) en grand format (nouvelle fenêtre)
La forêt de Bercé accueille des équipements à vocation récréative : Futaie des Clos Chêne Rouleau de la Roussière (forêt de Bercé – 2015) (Source : CAUE de la Sarthe)

La forêt de Bercé accueille des équipements à vocation récréative : le Chêne Boppe (forêt de Bercé – 2015) (Source : ONF) en grand format (nouvelle fenêtre)
La forêt de Bercé accueille des équipements à vocation récréative : le Chêne Boppe (forêt de Bercé – 2015) (Source : ONF)

L’évolution des paysages de culture tournée vers la vallée du Loir

Caractérisée par la présence des grandes cultures qui composent un paysage de champs ouverts, l’unité paysagère du plateau calaisien est marquée sur ses franges méridionales par le développement des cultures arboricoles qui se positionnent sur les coteaux bordant les cours d’eau qui rejoignent le Loir. Cette dynamique a tendance à créer, notamment dans le secteur de Luceau ou de La Chapelle-Huon, des paysages d’agriculture spécifiques mêlant grandes cultures céréalières et cultures arboricoles. En revanche, la présence de l’activité ancienne de l’activité viticole semble se déliter progressivement, notamment dans des secteurs où l’activité était prégnante comme à Saint-Vincent-du Lorouër ou à Luceau.

Les secteurs culture arboricole se mêlent aux paysages de champs ouverts à l'est de l'unité (Luceau – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Les secteurs culture arboricole se mêlent aux paysages de champs ouverts à l’est de l’unité (Luceau – 2015)

Des dynamiques urbaines très modestes

L'unité paysagère du plateau calaisien connaît des dynamiques constructives très modérées (Source : DREAL, SIGLOIRE indicateurs habitat 2007-2011) en grand format (nouvelle fenêtre)
L’unité paysagère du plateau calaisien connaît des dynamiques constructives très modérées (Source : DREAL, SIGLOIRE indicateurs habitat 2007-2011)



N’étant pas directement concernées pas les influences mancelles, les extensions urbaines récentes restent limitées sur le territoire de l’unité paysagère du plateau calaisien, à l’exception de la commune de Château du Loir où les dynamiques sont davantage marquées. Toutefois, l’unité se trouve en frange des pressions urbaines du Mans, notamment à l’ouest, ce qui pourrait se traduire par une augmentation des dynamiques constructives dans les années à venir. Cependant, du fait d’une densité urbaine très faible, le développement de l’enveloppe urbaine est particulièrement important. Au-delà de la diffusion progressive qui s’exerce au niveau des coteaux surplombant les vallées, comme le montre l’exemple de Saint-Calais, une diffusion urbaine est également en cours autour des bourgs historiques, sous une forme très peu dense, qui contribue à étendre la ville de manière exponentielle, comme le montre l’exemple du Grand-Lucé ci-dessous.

La diffusion urbaine autour des bourgs historiques se fait de manière très peu dense et contribue à étendre de manière exponentielle les limites de la ville (Le Grand-Lucé – 2010) en grand format (nouvelle fenêtre)
La diffusion urbaine autour des bourgs historiques se fait de manière très peu dense et contribue à étendre de manière exponentielle les limites de la ville (Le Grand-Lucé – 2010)

Des dynamiques de valorisation du centre ancien : entre patrimoine architectural et paysage de vallée

Saint-Calais se caractérise par un paysage urbain de qualité fondé sur un patrimoine architectural riche et la présence de l’eau. Le développement soutenu et tardif de la ville a favorisé l’installation d’équipements nouveaux dans le tissu urbain, tel que la halle aux grains qui constitue un élément phare (par ailleurs monument historique) du paysage urbain. La morphologie urbaine du XIXème siècle valorise également la présence de l’eau avec la canalisation du ruisseau qui traverse l’espace urbanisé.
La dynamique de valorisation du patrimoine urbain s’est accélérée depuis quelques années. Saint-Calais est membre de la communauté de communes du Pays Calaisien, du Pays du Perche Sarthois (pays d’art et d’histoire) et possède le label Petites cités de caractère. La ville s’est par ailleurs dotée d’une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) en 1999 pour assurer la préservation et la mise en valeur de son patrimoine. Ces outils de préservation du patrimoine se traduisent par un maintien de paysages urbains qualitatifs dans le centre des bourgs concernés.

La préservation des Halles de Saint-Calais en tant qu'élément phare du patrimoine historique participe à la valorisation du paysage urbain (Saint-Calais – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
La préservation des Halles de Saint-Calais en tant qu’élément phare du patrimoine historique participe à la valorisation du paysage urbain (Saint-Calais – 2015)

La canalisation ancienne de la rivière de l'Anille est une des composantes principales du patrimoine urbain de Saint-Calais (Saint-Calais – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
La canalisation ancienne de la rivière de l’Anille est une des composantes principales du patrimoine urbain de Saint-Calais (Saint-Calais – 2015)

Sources bibliographiques

  • CERESA. Atlas des paysages de la Sarthe. Conseil Général de la Sarthe, DDE de la Sarthe, DIREN Pays de la Loire, 2005.
  • CNPF. La prise en compte du paysage en gestion forestière. 2011.