Les pratiques sociales touristiques et images de paysages véhiculées
Le paysage, support privilégié de représentations touristiques
Préambule
Le tourisme est sans conteste une des pratiques sociales du paysage la plus commune et la plus développée. Qu’il soit tourisme de masse, saisonnier ou de proximité, l’association « tourisme et paysage » détermine un ensemble de pratiques constituant un véritable rituel social.
Les représentations véhiculées par l’économie touristique font du paysage un support privilégié qui identifie une destination, un lieu de résidence ou de loisirs. Il devient l’image de carte postale, le cadre idéal ou sublimé des vacances, des loisirs … Ces images renseignent sur ce qui est attractif dans le paysage à l’époque où elles sont éditées.
Comme pour l’analyse culturelle, le cadre des recherches a dû être défini pour un travail cohérent à l’échelle de la région, avec une couverture suffisamment significative sans tomber dans la collecte infinie difficile à interpréter.
Pour en savoir plus sur la méthodologie liée à l’étude des représentations touristiques
Une région touristique aux attraits diversifiés
Le caractère pluriel de la région se traduit dans la bibliographie touristique par une multitude de guides thématiques, principalement sur les châteaux de la Loire avec des parutions dès 1922 de Guides bleus, mais également sur des territoires typés d’échelle géographique inférieure tels que le Val de Loire. Cependant, un guide Joanne est recensé par département.
Pour les Pays de la Loire, on ne dénombre qu’un seul guide vert contemporain et des Guides bleus. Les guides du routard sur la région n’apparaissent qu’à partir des années 2000.
Les représentations véhiculées par les offices de tourisme permettent d’appréhender les représentations des Pays de la Loire sous un volet touristique. La carte de ces représentations permet de voir différentes ambiances selon les départements, ce qui confirme le caractère pluriel du territoire. Ainsi en Mayenne et en Sarthe, on remarque une ambiance plus forestière, liée à un tourisme vert durable sur l’année. Au contraire, en Vendée, on suggère plus un tourisme d’été, focalisé sur le littoral. Cependant, comme pour les guides touristiques, l’eau se présente comme l’élément récurrent dans la plupart de ces représentations, se positionnant comme un moyen d’unification de la région.
Cependant, dans une moindre mesure, chaque département est également représenté pour ses villes, leurs spécificités, leur patrimoine et les manifestations qui y sont organisées. La Sarthe est reconnue pour ses manifestations avec les 24h du Mans. A l’inverse, la communication touristique du Maine et Loire repose principalement sur son patrimoine et des itinéraires vélos le long du fleuve mettant en avant ses paysages ligériens. Le Maine et Loire, la Mayenne, la Sarthe sont également reconnus pour leurs cités de caractères, valorisant leur petit patrimoine. Elles constituent d’ailleurs un troisième axe nord sud, plus diffus et moins médiatisé au niveau régional, centré sur le rural patrimonial et pittoresque.
Le Conseil Régional mise sur le train pour faire découvrir son patrimoine
Le conseil régional communique sur la découverte du patrimoine régional au travers de deux actions associant les transports régionaux ferroviaires :
- « Regards Sur » avec deux parcours commentés et illustrés : Saumur - Nantes et Nantes - Saint- Gilles-Croix-de-Vie. Là encore ressortent les deux axes forts des paysages régionaux l’axe ligérien et le littoral. Les supports sont richement illustrés et mettent l’accent sur les paysages naturels remarquables, le patrimoine bâti, les paysages ligériens, les produits locaux
- « Une gare – une randonnée en Pays de la Loire » : la Fédération Française de Randonnées a créé une douzaine de circuits au départ des gares des Pays de La Loire, des parcours variés et accessibles de 7,5 à 21 km, en ville, à la campagne et sur le bord de mer. Vous allez prendre le train pour découvrir des villes au riche passé historique, appréhender l’espace et ses paysages modelés par les hommes au fil des siècles. Dans cette action, ce sont de nouveaux l’axe ligérien, les villes majeures de la région et le littoral sont mis en exergue
Zoom sur le motif de l’eau comme emblème de la région
L’analyse de tous ces supports (guides, cartes postales …) montre qu’ils mettent l’accent sur les paysages d’eau, en particulier du littoral avec des images de côte rocheuse, d’océan ou plus subtilement avec la présence de barques de pêcheurs. C’est ce motif de l’eau, métonymie du fleuve et de l’océan qui semble servir d’emblème.
Les représentations des cartes postales du XXe siècle et du début du XXIe siècle sont majoritaires sur le littoral et dans les grandes agglomérations des Pays de la Loire. On remarque que les communes du littoral ont le monopole iconographique, au détriment des villages au sein des terres des deux départements côtiers. Cette concentration de prises de vue forme l’axe majeur qui se dégage de la carte de répartition.
Un second axe se dégage entre Nantes, Pouzauges et le secteur de Saumur, à l’appui de la vallée de la Sèvre Nantaise et des collines vendéennes.
D’une Loire vivante et industrielle à une Loire sauvage
Au XXème siècle, au cœur du rural comme de l’urbain, la vision prédominante des cartes postales est celle d’une Loire pratique, circulable, un pont la traversant, des barques ou des chalands amarrés en contrebas pour la pointe de pittoresque. Les Ponts et Chaussées mettent en œuvre d’ingénieux projets de ponts, plus grands, plus solides, qui deviennent image de richesse et de prospérité.
On ne met en avant que le commerce fluvial à grande échelle, montrant le rayonnement de la ville à l’échelle nationale et internationale. Cependant l’amont de la chaîne industrielle que l’on faisait figurer sur les peintures est dissimulé pour les cartes postales.
Pour en savoir plus sur les témoignages des participants aux entretiens sur leur attrait pour les paysages littoraux ->art6588]
La promotion du littoral
Les premières représentations du littoral sur les cartes postales, en noir et blanc, montrent soit une plage naturelle, soit des bateaux amarrés dans un petit port de pêche à marée haute. Les paysages de plages sont supérieurs en nombre par rapport aux paysages de ports.
L’angle de prise de vue dirige le regard de la côte vers la mer. A l’inverse, les vues aériennes sont prises de l’océan vers le front de mer, ce qui montre l’étendue du littoral. Le camping dans un cadre naturel "sauvage", la pinède, constitue une autre image de ce bord de mer qui s’ancre alors fortement dans les représentations des vacances dans la région. Pour ces iconographies, datant du début de l’ouverture du littoral au tourisme, le paysage est aussi bien le sujet de la carte postale que le décor de fond qui sert à faire passer un message aux touristes.
La Vendée est le premier département touristique de la façade atlantique avec 35,8 millions de nuitées touristiques en 2013. (Source : dossier de presse 2013 CDT Vendée). Les aménagements ont été construits en conséquence, une majorité de camping en Vendée pour un tourisme de masse et une dominance des hôtels en Loire-Atlantique pour un tourisme moins populaire en Nord Loire. (http://pays-de-la-loire.direccte.gouv.fr/bilan-de-la-saison-touristique-2012-en-pays-de-la-loire )
En parallèle, la reconquête de ces paysages du début du 20e siècle passe aussi par le tourisme vert et plus particulièrement le cyclotourisme le long du littoral. Le Vélocéan, circuit de 160km a par exemple pour vocation de relier les villes littorales entre elles, du Morbihan à la Vendée et de faire redécouvrir les paysages rétro-littoraux qui font aussi partie du charme de la façade Atlantique. En Pays de Loire, de Piriac-sur-Mer aux Moutiers-en-Retz, le long du littoral de la Loire-Atlantique, le parcours Vélocéan développe près de 112 kilomètres de pistes cyclables.
Les marais : de l’artisanat au tourisme vert
Les marais, localisés plus spécifiquement à Guérande, sur l’arrière littoral et dans le sud de la Vendée, n’existent dans les représentations sur cartes postales qu’à travers le folklore, le pittoresque et l’artisanat. Seules les représentations les plus récentes mettent en scène un paysage dépourvu d’hommes ou le marais est le sujet photographique. Il n’est autrement que le décor qui met en lumière les paysans locaux et leur artisanat. Qu’il s’agisse par exemple des marais salants à Guérande ou de bateliers en yole en Vendée.