Les caractères des plateaux du Baugeois
Un plateau calcaire aux matériaux diversifiés
Une ancienne zone côtière
Les plateaux du Baugeois se situent en zone côtière du bassin parisien, c’est-à-dire sur un secteur de fluctuation du niveau des mers successives (et de leurs limites), ce qui engendre d’importantes lacunes stratigraphiques et des dépôts grossiers (éléments d’érosion). Cette hétérogénéité géologique induit une hétérogénéité pédologique qui explique la diversité de qualité et de fertilité des terres des plateaux du Baugeois et leur large palette chromatique.
Une large palette chromatique et texturale Les plateaux du Baugeois offrent ainsi une palette de matériaux locaux diversifiés que l’on retrouve dans l’habitat, aussi bien au niveau des fermes que des maisons de bourgs ou encore au niveau des manoirs et châteaux :
- au sud (secteur orienté vers le val d’Anjou), dominance du tuffeau et des toitures en ardoise, nette perception dans le bâti de l’influence de l’architecture traditionnelle de la vallée de l’Anjou,
- au nord (secteur orienté vers la vallée du Loir), association de matériaux composites : silex, tuffeau, moellons calcaires, grès roussard, enduits ocres jaunes et ocres roux (secteur des Rairies). Les toitures sont alternativement en ardoise ou en tuile,
- dans l’ouest de l’unité, la tuile plate est utilisée sur les petites dépendances et annexes, elle se généralise sur l’ensemble du bâti au nord-est des plateaux du Baugeois. La tuile ‘tige de bottes’ n’est employée que très localement dans le secteur des Rairies (tuiles concaves avec joints à la chaux, technique spécifique de cette région).
Ces associations de matériaux induisent une palette de couleurs chaudes : ocre, roux, brun dans le nord de l’unité, et de couleurs froides et contrastées, gris/noir et beige dans le sud principalement. Le bâti rural s’identifie toujours comme un élément de ponctuation et d’animation dans le paysage agricole
Un plateau agricole ondulé, dessiné par de larges parcelles cultivées.
Un plateau découpé
L’érosion a démantelé l’ancien plateau tertiaire et mis à nu les roches crétacées sous-jacentes, mais elle a laissé subsister çà et là, à sa périphérie, quelques buttes « témoins » qui émergent de loin dans la campagne, malgré leurs altitudes modestes (exemples : la colline des Blinettes, à La Chapelle-Saint-Laud (100 m), la côte de Blou (109 m), ou encore la hauteur de Parçay les Pins (123 m).
Les plateaux du Baugeois sont délimités par le Loir au nord et l’Authion au sud. Une ligne de partage des eaux s’identifie au coeur du plateau qui bascule ainsi vers les deux rivières. Comme l’illustre la carte de relief ci-dessous, le Loir a de nombreux affluents directs qui entaillent le plateau. L’Authion compte quant à lui deux principaux affluents qui drainent ce plateau, le Lathan et le Couasnon, accueillant tous deux de très nombreux affluents qui découpent les contreforts du plateau et induisent une ondulation de ce dernier. Les coteaux de ces multiples vallées organisées en éventail, sont marqués (donc lisibles) mais pas abrupts. Si la vallée du Lathan est relativement large, les vallées du Couasnon et de leurs deux affluents sont relativement étroites.
D’amples ondulations cultivées induisant des vues longues et dégagées
Ainsi, ces très nombreuses vallées et vallons entaillent le plateau et engendrent des ondulations plus ou moins prononcées sur l’ensemble de l’unité paysagère. Quelle que soit leur importance, ces ondulations sont toujours soulignées par le patchwork des couleurs et textures des champs (aussi bien au niveau de la terre qu’au niveau des cultures) qui dessinent des lignes douces et souples mais aussi par quelques haies bocagères, de qualité et densité variable.
Ces plateaux du Baugeois se caractérisent par de larges parcelles agricoles, qui contribuent à l’ampleur des ondulations. Ces grandes surfaces cultivées induisent de grandes ouvertures et d’importantes covisiblités, mais l’horizon butte toujours sur un bois.
Des vallées fermées densément plantées
Ces évènements topographiques majeurs que sont les vallées, instaurent une dynamique physique et visuelle dans l’appréhension du paysage. Les vallées des plateaux du Baugeois sont densément végétalisées. Les cours d’eau sont soulignés par une ripisylve constituée d’aulnes, saules, frênes, peupliers… Ces lignes paysagères fortes constituent des éléments de repère important dans les paysages des plateaux du Baugeois. Les vallées sont notamment investies par de grandes peupleraies qui jouent un double rôle :
- d’une part, les peupliers dessinent une ligne végétale permettant de repérer de loin la présence de la vallée ;
- d’autre part, par leur densité, leur verticalité et l’importance de leur volume. Ils gomment visuellement les reliefs et contribuent à la fermeture et au cloisonnement du paysage.
Des forêts, bois et buttes boisées
Des surfaces et une répartition sur le territoire variable
De tailles variables, les bois et buttes boisées ferment ponctuellement le paysage et s’apparentent à des écrans visuels successifs donnant beaucoup de rythme et de profondeur au paysage. Ils instaurent une dynamique visuelle très forte. Plus que de simples relais visuels, ils donnent au paysage son échelle : une échelle humaine dans un paysage équilibré, rassurant. Au droit des lisières boisées, ces massifs font écrans, bloquent le regard et induisent un phénomène d’épaulement. Ils dessinent des clairières plus ou moins vastes.
Leur répartition sur le territoire est variable et intimement liée à la qualité de sols. Quelques grands massifs s’identifient comme les forêts domaniales de Chandelais, et de Monnaie en continuité du bois de Bel Air, de la forêt de Billot, ou encore la forêt de Pont-Ménard et le bois de la Graine de Sapin qui coiffe Parcay-les-Pins…
Une diversité de la palette végétale
Ces typologies le soulignent, la palette végétale est elle aussi diversifiée, et les pins maritimes et sylvestres sont aussi identitaires de ces boisements que les chênes, charmes, érables champêtres…

La diversité de la palette végétale induit une diversité des ambiances des bois et forêts des plateaux du Baugeois :
- des forêts de feuillus (chênes, châtaigniers) avec des troncs fins et élancés et un sous-bois généralement très entretenu, qui les valorise : tapis de feuilles, de graminées, de mousses, quelques fougères et arbrisseaux : Ambiance sombre et fraîche en été, lumineuse et graphique en hiver, forte opacité de la lisière, transparence à l’intérieur de la forêt ;
- des forêts de pins sur des tapis de fougères, de molinies ou encore sur un sous étage feuillus : rythme très graphique des troncs des pins sur un tapis alternativement vert, roux ou doré selon les saisons : Lumière constante, transparence (lisière et intérieur), importance du graphisme des troncs en toute saison ;
- des peupleraies (vallées et plateaux), proposant des ambiances contrastées, de la friche qui occupe souvent les jeunes plantations jusqu’à la majesté rythmée des plantations adultes sur tapis herbeux. La végétation étagée peut induire des effets de transparence au niveau des troncs, filtre (en hiver) ou écran (en été) au niveau des houppiers.
Au cœur de ces formations, dans ce paysage très fermé, ces changements d’ambiance sont très importants, ils rompent toute monotonie et génèrent des effets de surprise. La principale perception du cœur de ces massifs se fait depuis les voies de communication (organisation étoilée, axes rectilignes dans les forêts domaniales) traversant ces forêts. Elle dévoile des troncs élancés, mis en valeur par le recul créé par les bandes enherbées larges situées de part et d’autre des voies, et induit une échelle à la fois intime et monumentale.
A l’appui de ces boisements, dans des clairières ou en lisière, on retrouve des bandes souvent rélictuelles d’ensembles autrefois plus importants.
Animation et ponctuation par des formations végétales caractéristiques (autre que les bois)
Des arbres isolés repères et marqueurs :
Noyers, peupliers d’Italie, cèdres… sont implantés en isolé dans les champs ou le long des routes mais aussi à proximité des fermes Ces éléments ponctuels, outre leur rôle de repère et d’animation, constituent des relais visuels et induisent une dynamique visuelle intéressante.
Des parcs de châteaux et manoirs
Implantés sur des buttes ou dans le plateau, les parcs s’identifient facilement par leur variété végétale, la présence de grands conifères (type cèdres), les registres de murs, les effets de mise en scène de la demeure qu’ils accompagnent. Ils constituent de véritables relais visuels, des points d’appel et de repères majeurs dans le paysage des plateaux du Baugeois et soulignent l’attractivité de ce territoire. Le parc du château de Montgeoffroy se distingue particulièrement dans le département du Maine-et-Loire par son dessin à la française.

Quelques lignes végétales arbustives et arborées
Quelques lignes végétales arbustives et arborées dessinent parfois la limite d’une vaste parcelle. Si la dispersion du bâti identifie une tradition bocagère, ces haies s’apparentent aujourd’hui plus à une particularité qu’à un élément majeur de la structure paysagère baugeoise.
Une diversification des productions agricoles et donc des motifs paysagers
Horticulture, maraîchage, arboriculture fruitière viennent ponctuellement apporter une variation paysagère par la palette des couleurs, par le rythme et la régularité des lignes de cultures …
Une architecture de qualité : animation et ponctuation
Un habitat rural dispersé
L’habitat rural est très dispersé, laissant de vastes espaces boisés inhabités et se concentre à proximité des villages. Les bâtiments ruraux ne s’organisent pas toujours suivant une forme urbaine constante et identifiable : formes en L, en U ou constructions dispersées au gré des besoins.
La maison d’habitation est traditionnellement liée aux bâtiments d’exploitation et de stockage. Construite durant de nombreux siècles à partir de matériaux divers, la façade principale s’est enrichie au XIXe siècle d’encadrements et de modénatures en tuffeau, les lucarnes en pierres calcaires ont remplacé les traditionnelles lucarnes en bois. Les volumes sobres et simples soulignent une certaine pauvreté : Maison d’habitation d’une pièce ou deux, attenante aux bâtiments d’exploitation (étable et écuries) avec un grenier sur l’ensemble pour le stockage de tout ou partie du foin et des céréales. Four construit souvent attenant à la pièce de vie.
Quelques logis médiévaux s’identifient encore. Les fermes, dont l’activité agricole perdure, sont aujourd’hui entourées de grands hangars agricoles, ou de structures horticoles dont l’intégration paysagère pourrait être facilitée par les nombreuses formations arborées caractéristiques (arbres isolés, bois, haies).
Des manoirs et châteaux
Les manoirs, nombreux, présentent une architecture caractérisée par des jeux de volumes imposants. De hauteur conséquente, avec des pentes de toiture prononcées, ils sont souvent agrémentés de tours rondes ou carrées. De nombreux châteaux d’époque et de style différents, soit lovés dans les bois épais, soit mis en scène sur les hauteurs des vallons, ponctuent et animent les paysages de l’unité.
Des bourgs et villages
Les villages et bourgs de l’ouest de l’unité sont généralement perchés, sur les hauteurs. Ils présentent une silhouette caractéristique, souvent équilibrée et dominée par le clocher de l’église : étagement des maisons sur le coteau, imbrication et enchevêtrement des toits, équilibre des volumes et ponctuation par la végétation. L’urbanisation s’est faite en harmonie avec la topographie.
Les villages et les bourgs de l’est sont quant à eux implantés sur le plateau, sans topographie marquée et organisés autour des éléments majeurs (mairie, église, commerces…)
L’ambiance intérieure des villages et bourgs s’apparente soit à celle d’un hameau, soit à celle d’une petite ville. La diversité de l’architecture témoigne d’une histoire riche dans chaque village et d’une activité autrefois importante (notamment commerciale et agricole). La majorité des villages offre un patrimoine bâti intéressant, ainsi que des extensions résidentielles en périphérie des bourgs (Cf. chapitre sur les dynamiques paysagères).
- Structure urbaine de petite ville : Alignement des façades en bordure de rue avec souvent un travail d’ornementation important sur les lucarnes, les corniches, présence de maisons à étages, de places organisées, rues soulignées par des trottoirs (Exemples : Jarzé, Vieil-Baugé, Cornillé-Les-Caves, Fontaine Guérin…)
- Structure urbaine de hameau : Rues dessinées par les maisons et leurs dépendances, sans alignement, orientées différemment avec alternance de maisons hautes et basses, de vides et de pleins, ruelles parfois étroites et de largeur variable. (Exemples : Les Rairies - Saint Quentin Les Baurepaires – Fougeré …)
Une ville au coeur de l’unité : Baugé
Implantée sur les coteaux et dans la vallée du Couasnon, la ville, si elle constitue un carrefour majeur d’un point de vue fonctionnel, n’offre pas sa silhouette aux regards (à l’image de nombreux villages). Le clocher, le château ou l’hôpital attirent ponctuellement le regard (points d’appel relativement rares). Son patrimoine architectural et urbain témoigne d’une certaine importance économique et administrative. La ville a su jouer avec la topographie dans son urbanisation enjambant le Couasnon. Elle offre des visages multiples et de qualité, découverts en parcourant le dédale des rues et des places intérieures (cf. développement dans la partie des dynamiques paysagères).
Impact modéré des infrastructures
Les voies de chemin de fer désaffectées
Deux voies de chemin de fer irriguaient anciennement les plateaux du Baugeois depuis Saumur, l’une vers Baugé, l’autre vers Château-La-Vallière et sont aujourd’hui désaffectées, mais leur impact visuel reste très marquant dans le paysage :
- des ouvrages : ponts (comme sur le giratoire de Baugé), anciens rails sur des petites levées empierrées (comme sur le coteau du Couasnon en face de Vieil Baugé) ;
- des lignes vertes très denses constituées pour partie d’acacias que l’on croise au détour d’une route tel un large chemin enherbé cerné de haies hautes et denses (exemple dans le secteur de Lignières Bouton - Vernantes) ;
- des constructions : anciennes gares, hôtels accompagnés parfois de bâtiments à vocation industrielle ou d’hôtellerie (comme à Meigné-le-Vicomte).
Les deux autoroutes (à l’ouest et au sud-ouest de l’unité)
L’implantation et l’intégration des autoroutes ont su jouer avec la structure paysagère de ces plateaux. Rupture physique dans le réseau communal, elles ne constituent que rarement une barrière ou rupture visuelle et proposent même de belles ouvertures visuelles sur les paysages de buttes et contreforts boisés. Les structures connexes comme les ponts et passerelles ont un impact ponctuel dans le paysage.
Depuis l’A85, des ouvertures sur le grand paysage offrent une perception des buttes et contreforts des plateaux du Baugeois, avec en points d’appel les silhouettes étagées de certains bourgs comme le clocher de Saint-Georges-du-Bois.
L’aéroport Angers-Marcé et son parc d’activités
Implanté en appui des bois, de l’autoroute A11 et de la RD 766 (axe de desserte majeure de ce territoire), l’aéroport reste aujourd’hui discret dans le paysage.
Si ces infrastructures constituent des caractères identitaires de l’unité paysagère, elles sont développées dans la partie dynamique.
Un paysage d’alternance
La succession de vallées densément végétalisées et de buttes boisées dans ce paysage ondulé, l’importante des covisibilités engendre des plans végétaux successifs qui accentuent et soulignent la profondeur du paysage. L’alternance se traduit :
- dans le degré d’ouverture, entre le plateau ondulé ouvert et les bois et forêts denses et fermés, entre ombre et lumière ;
- dans les échelles : entre une échelle ample et majestueuse sur les plateaux et une échelle très intime dans les bois, forêts et vallées ;
- dans la diversité végétale : entre les formations liées à la production comme les bois, les peupleraies, les vergers et les formations végétales liées à la création d’un décor, à la personnalisation du paysage comme les parcs ou les arbres isolés.
Pour aller plus loin sur le patrimoine culturel et naturel
Patrimoine culturel :
- Consulter l’article Les paysages institutionnalisés
- Consulter la rubrique "Sites et paysages" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Consulter l’Atlas des Patrimoines du Ministère de la Culture
- Consulter les Bases Architecture et Patrimoine du Ministère de la Culture
Patrimoine naturel :
- Consulter la rubrique "Patrimoine naturel" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Trame verte et bleue : consulter le Schéma régional de cohérence écologique (SRCE) des Pays de la Loire
Sources bibliographiques
- BOSC & PIGOT, VU d’ICI, Bruno DUQUOC. Atlas des paysages de Maine-et-Loire. Département de Maine-et-Loire, DIREN, Pays de la Loire, DDE Maine-et-Loire Version éditée Le Polygraphe, 2002.
- BOSC & PIGOT, VU d’ICI, Bruno DUQUOC (Architecte). Dossier Etude de l’Atlas de paysages de Maine et Loire. 1999 – 2001.