Les caractères des contreforts ligériens vers l’Erdre et le segréen
Un plateau incliné vers la Loire entaillé de vallées orientées nord/sud :
Un paysage de plateau semi-ouvert
Le relief de l’unité est peu mouvementé et ses variations les plus importantes correspondent dans la majeure partie des cas à l’incision du réseau hydrographique. Légèrement incliné vers le sud, ce plateau privilégie les vues sur le coteau sud de la Loire, notamment en deçà d’une ligne de bascule visuelle que l’on peut localiser entre Mésanger et La Chapelle-Saint-Sauveur. Par ailleurs, on distingue des crêtes est/ouest plus importantes qui se démarquent sur l’horizon au niveau de Maumusson, entre Saint Mars du Désert et le Cellier et sur le coteau nord de l’Erdre amont.
Ces subtilités du relief trouvent directement leur explication dans le contexte géologique de l’unité. Relativement complexe, la zone s’articule autour du synclinal du Bassin d’Ancenis dont les jeux de failles importants témoignent des mouvements tectoniques armoricains qui se sont fortement exprimés dans la région.
Ils se traduisent dans le paysage par la planéité du bassin d’Ancenis (lié à des phénomènes de comblements sédimentaires dans les zones synclinales ou les bassins en "pull apart") et par les zones plus hautes liées à des jeux de failles (Horst de Pouillé les Coteaux) ou des batholites de roches plus dures qui forment de petites collines dans le paysage (Saint-Herblon). Ces mouvements géologiques, même s’ils renvoient à un paléorelief plus mouvementé et un paysage autrefois sub-tropical et côtier, se traduisent aujourd’hui par un relief pénéplané, modelé en creux et souvent couvert par des limons de plateaux.
Un plateau suspendu sur les vallées de la Loire et de l’Erdre
Le chevelu hydrographique qui incise le plateau présente la particularité d’être principalement orienté nord/sud (en dehors du cours de la Loire sud et de l’Erdre au Nord qui suivent eux les grandes directions géologiques décrites précédemment). Il dessine un paysage de vallons souvent très encaissés qui contrastent avec le contexte paysager général du plateau. Là, les vues sont courtes et les ambiances intimistes. La palette végétale change, les grandes cultures laissent places à des petites prairies bocagères ou à des pâtures suspendues sur le coteau où les allées et venues des bovins dessinent les courbes de niveaux serrées sur les pentes herbeuses. On retrouve le registre des arbres d’eau avec les saules et les frênes taillés en têtards, ainsi que les aulnes qui se distinguent par leur silhouette dressée. Souvent des peupleraies viennent obstruer le couloir visuel de la vallée.
Des paysages d’eau accompagnant l’Erdre et de marais
A l’est la vallée de l’Erdre
La vallée de l’Erdre prend en aval de Nort-sur-Erdre un profil où le fond de vallée s’élargit au profit de vastes étendues de marais inondables ou d’importantes étendues d’eau. Cette configuration originale de la vallée qui lui donne son caractère pittoresque vient de la mise en place de la chaussée de Barbin, construite au 6e siècle par l’évêque Saint-Félix. Cette chaussée, aujourd’hui remplacée par une écluse au confluent avec la Loire à Nantes, releva le niveau des eaux en amont ; ceci permit l’ennoiement des marais qui rendaient la vallée insalubre et la navigation possible jusqu’à Nort-sur-Erdre.
La rivière s’élargit ainsi en une succession de lacs et de « plaines », en particulier celles de Mazerolles et de Petit-Mars. L’Erdre devint alors, jusqu’au milieu du 19e siècle, une voie de communication majeure. La navigation commerciale déclina ensuite pour cesser en 1975. Dès le 18e siècle, les rives de l’Erdre attiraient à Sucé des nantais qui y construisirent de nombreux châteaux, folies ou villas.
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La vallée de l’Erdre est un site classé depuis 1998. Elle est un site privilégié pour les loisirs nautiques, et des croisières sont organisées afin de découvrir son patrimoine.
Au nord de la vallée de l’Erdre, une série de grands étangs ouvrent de vastes miroirs d’eau à la lisière de la forêt d’Ancenis. Ils correspondent à une série de retenues d’eau mise en place pour les besoins de l’industrie sidérurgique et pour l’alimentation du canal de Nantes à Brest. Pour garantir en continu son alimentation en eau à partir du lac de Vioreau, une « rigole alimentaire » court sur 21 kilomètres, de l’Étang de la Provostière jusqu’au lieu-dit Bout de Bois, pour rejoindre le point le plus haut du canal.
Sur la frange nord de l’unité, on distingue ainsi :
- les étangs du grand et du petit Vioreau qui constituent le plus grand réservoir du département. D’une superficie de 180 ha, c’est un barrage qui fait de lui en toute saison le réservoir d’eau du canal
- les étangs de la Provostière et de la Poitevinière fournissaient à l’origine l’énergie hydraulique nécessaire au fonctionnement des forges existant à proximité. Puis, ils ont été reliés à l’étang de Vioreau par la rigole des Ajaux, pour compléter les réserves d’eau disponibles
Outre leur caractère paysager spécifique, ces étangs constituent un élément patrimonial à la fois historique et naturel original et des sites touristiques de promenade et de découverte.
Les Marais de Grée aux portes d’Ancenis
Enchâssant la ville d’Ancenis en lui donnant l’hiver des allures insulaires, le marais de Grée est une vaste zone humide qui inonde l’hiver avec les crues de la Loire et les apports du bassin versant de trois ruisseaux. Vaste plaine où l’on retrouve les caractères paysagers du fond de vallée de la Loire, cet espace constitue une véritable particularité paysagère cerné par le plateau agricole, la frange urbaine ouest d’Ancenis, marquée par le bâti industriel et les coteaux de Saint-Herblon.
En période d’étiage, c’est le quadrillage des réseaux de fossés et de canaux qui structure l’espace, souligné parfois d’une procession de frênes têtards. En période d’inondation, un vaste lac se dessine dans le paysage et appelle le regard depuis l’autoroute, le train ou Ancenis par ses miroitements et le vol des oiseaux migrateurs qui s’y arrêtent.
Un plateau cultivé où le bâti constitue des repères à l’appui des reliquats bocagers
Paysage agricole ouvert rythmé par un bocage rélictuel
Sur l’ensemble du plateau, l’activité agricole prédomine. Au gré des remembrements successifs et des évolutions des pratiques agricoles, l’ancienne trame bocagère a laissé place à une vaste mosaïque de cultures qui se développent au cœur de l’unité, là où l’activité agricole est la plus dynamique. Ainsi, on embrasse souvent d’un seul regard l’immense patchwork alternant au gré des saisons, les aplats jaunes de colzas et les verts intenses des ray-grass, les rangs de maïs qui peuvent refermer ponctuellement le paysage ou le sol nu strié des sillons de charrue.
Seuls émergent quelques petits boisements et les rideaux d’anciennes haies bocagères dont il ne reste souvent que les arbres. Les zones prairiales se concentrent quant à elles, autour des vallées (notamment dans le sud de l’unité). Elles sont encore souvent quadrillées par un réseau bocager qui referme le paysage par endroits.
Pour en savoir plus sur les paysages de bocage
Une architecture rurale influencée par l’Anjou, la Bretagne et le val de Loire
Les sous-sols du sud de l’unité permettent d’extraire du calcaire, utilisé pour la construction locale, tandis que le nord de l’unité est dominé par les schistes qu’on observe sur les trois unités des marches de Bretagne.
Avec le franchissement de la Loire, on retrouve les toitures d’ardoise qui deviennent identitaires sur cette unité. Le contexte géologique offre des matériaux de construction, tels que les schistes, les gneiss et les grès, ainsi que les argiles qui donnent les briques d’encadrement et ponctuellement les tuiles de toitures. La proximité de la Loire influence également les matériaux de construction avec notamment l’utilisation du calcaire sur la frange sud de l’unité.
Les couvertures sont ainsi uniformément constituées d’ardoise, tandis que l’unité abrite deux types d’architectures différentes : le style Angevin, style Val de Loire, reposant sur l’usage de calcaire, qui en allant vers le Nord est peu à peu dominé par le style Breton et l’utilisation du schiste ou de la pierre bleue de Nozay. Le tissu rural présente une densité bâtie forte.
Deux typologies architecturales se dégagent dans l’unité :
- Le style Angevin, type val de Loire : cette typologie architecturale marque la transition avec la maison angevine. La pierre calcaire est soigneusement appareillée. On retrouve notamment du moellon et tuffeau du saumurois (utilisé pour les piédroits et linteaux des baies). Les façades sont souvent couronnées d’une corniche moulurée. On retrouve des cheminées en pierres appareillées sur le sommet des murs. Les habitations présentent parfois un étage avec grenier et lucarne à fronton
- L’habitat rural de style Breton : Schistes et ardoises sombres confèrent à la maison un aspect sévère, rappelant la maison du pays de Rennes. Les habitations adoptent un plan en longueur, d’où leur nom de longère, regroupant habitations et dépendances au sein du même bâtiment, avec parfois des appentis de part et d’autre de la construction principale. Le plus souvent, la construction ne présente qu’un seul niveau avec un grenier. On observe un léger exhaussement de la toiture au-dessus des lucarnes, et souvent des linteaux en poutres de bois
Un patrimoine spécifique de châteaux entourés de grands parcs près des vallées et des zones viticoles
Outre l’architecture rurale traditionnelle, le paysage est émaillé de nombreux châteaux qui s’implantent en belvédère sur les vallées. On retrouve là, à la fois l’influence ligérienne et du val d’Erdre aval. Ils se distinguent non seulement dans le paysage par la qualité de leur architecture mais aussi par leur grand parc paysager aux essences caractéristiques des parcs fin XIXème siècle (cèdres, magnolias, tulipiers, platanes…). Leurs longues perspectives souvent adossées de boisements jouent à mettre en scène l’horizon dans un paysage maîtrisé.
Des implantations de bourgs dominant les vallons et constituant des repères sur le plateau
Au Nord de l’unité, et notamment dans la vallée de l’Erdre, on retrouve essentiellement des bourgs de fonds de vallée, dont les développements récents remontent souvent le long des coteaux, avec un impact visuel parfois important dans le grand paysage. À Saint-Mars-la-Jaille par exemple, en charnière avec les paysages des marches entre Anjou et Bretagne, le développement récent s’effectue sur les plateaux et les pentes douces en continuité urbaine avec le noyau ancien.
Au sud de l’unité, les bourgs ligériens au développement contraint s’étendent souvent vers le nord, en direction des grandes infrastructures et suivant l’axe des vallées perpendiculaires à la Loire. L’exemple le plus marquant de ces pressions de développement induites par les axes viaires est certainement le paysage urbain de l’agglomération d’Ancenis : son cœur historique insulaire au bord de la Loire n’est plus lisible depuis le plateau où se sont développés non seulement les quartiers pavillonnaires au-delà de la voie ferrée mais aussi les zones d’activités qui ceinturent l’échangeur autoroutier au nord.
Au centre de l’unité, on retrouve de nombreux bourgs perchés ou bourgs de plateaux, dont la structure traditionnelle est souvent rendue difficilement lisible par les extensions récentes, organisées le long des axes routiers (développement linéaire ou étoilé) ou selon les opportunités foncières, enclavant ainsi parfois d’importants espaces agricoles « en dent creuse ».
Des éléments d’infrastructures marquants dans le paysage
Ces dernières décennies, de nouveaux éléments sont venus ponctuer de manière monumentale le paysage. Les infrastructures routières et notamment la nationale et l’autoroute ont imposé une rupture physique au sud de l’unité.
Elles ont dynamisé l’implantation des activités et développé l’habitat sur la frange sud (cf. volet sur les dynamiques des paysages). Empruntant quasiment le même linéaire d’implantation, les lignes haute-tension avec leur procession de pylônes marquent aujourd’hui fortement ce paysage sur la frange sud. Dans le registre de l’énergie, les parcs éoliens de la frange nord de l’unité constituent de nouveaux repères forts dans le paysage.
Pour aller plus loin sur le patrimoine culturel et naturel
Patrimoine culturel :
- Consulter l’article Les paysages institutionnalisés
- Consulter la rubrique "Sites et paysages" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Consulter l’Atlas des Patrimoines du Ministère de la Culture
- Consulter les Bases Architecture et Patrimoine du Ministère de la Culture
Patrimoine naturel :
- Consulter la rubrique "Patrimoine naturel" sur le Portail de données communales de la DREAL Pays de la Loire
- Trame verte et bleue : consulter le Schéma régional de cohérence écologique (SRCE) des Pays de la Loire
Sources bibliographiques
- VU D’ICI, AGENCE ROUSSEAU, ALTHIS, AQUALAN. Atlas des paysages de Loire-Atlantique. DREAL des Pays de la Loire, DDTM de Loire-Atlantique. 2010.
- BOSC & PIGOT, VU d’ICI, Bruno DUQUOC. Atlas des paysages de Maine-et-Loire. Département de Maine-et-Loire, DIREN, Pays de la Loire, DDE Maine-et-Loire Version éditée Le Polygraphe, 2002.