Les dynamiques paysagères des vallées du Haut-Anjou
Exemple d’évolution caractéristique de l’unité sur le secteur du Lion d’Angers
Dans le cadre de l’analyse des dynamiques paysagères, pour chaque unité paysagère, un secteur particulier est choisi de manière à caractériser, en tant qu’échantillon représentatif de l’unité, une large partie des dynamiques vécues à l’échelle de l’unité. Cette analyse s’appuie notamment sur la comparaison des données cartographiques et des photographies aériennes à différentes époques données. Ce zoom est représentatif mais non exhaustif des dynamiques vécues à l’échelle de l’unité. Les dynamiques de l’unité qui ne s’illustrent pas à travers cet exemple sont donc détaillées à la suite.
Une implantation sur les rives de l’Oudon
Historiquement, l’agglomération du Lion d’Angers s’est installée sur la rive droite de l’Oudon, qui rejoint la Mayenne à quelques encablures plus au sud. Elle est au coeur d’un réseau de voie qui relie Candé à la Flèche dans un sens ouest-est et Château-Gontier (puis Laval) à Angers dans un sens nord-sud. Ce maillage est complété par un axe qui part du bourg vers le nord-ouest pour rejoindre Segré. La carte d’Etat-major de 1840 laisse apparaître un maillage d’habitat dispersé dont les plus grandes entités comportent une dizaine de constructions. Le bourg ancien se fonde sur un tissu resserré implanté à l’alignement sur la voie principale.
Une ouverture progressive des paysages avec les changements de pratiques agricoles
La comparaison des orthophoto de 1958 et 2012 permet de constater une simplification progressive de l’organisation parcellaire. D’un tissu parcellaire relativement homogène avec des tailles et des formes assez semblables, plus resserré à l’approche des cours d’eau, on passe à une organisation plus disparate. Ce phénomène de remembrement parcellaire est plus soutenu sur les plateaux, et notamment à l’est du bourg.
Cette évolution est liée à plusieurs phénomènes : restructuration liées aux développements urbains et des infrastructures, développement des activités de grandes cultures, notamment céréalières.
Avec l’intensification des activités de grandes cultures et la déstructuration du réseau bocager, les nouveaux bâtiments aux volumes imposants sont plus visibles. Ce phénomène est particulièrement visible autour de Brain-sur-Longuenée à l’ouest de la Mayenne.
L’affirmation de l’arboriculture fruitière
Le dynamisme agricole de cette unité passe notamment par le développement de l’arboriculture fruitière au centre de l’unité entre le Lion d’Angers et Châteauneuf-sur-Sarthe ou encore aux abords du Loir. Le secteur du Lion d’Angers en fournit un exemple avec l’implantation au nord-est du bourg, d’une grande exploitation.
Le regroupement des structures d’exploitation (hangar fruitier - silos agricoles…) sur certains points stratégiques évite les phénomènes d’éparpillement mais constituent des volumes importants parfois très visibles.
Cette visibilité est accentuée par :
- leur implantation, sur les lignes de crête, sur les plateaux agricoles ouverts ou encore dans les fonds de vallons mais toujours à proximité du bourg (participent à sa silhouette) ;
- leur volume imposant réalisé avec des matériaux et des couleurs (claires et brillantes) qui contrastent fortement avec la palette chromatique locale
Une fermeture des vallées
La comparaison des orthophoto de 1958 et 2012 permet de constater la fermeture progressive des vallées très visible notamment au niveau de l’île le Rideau Miné entre le bourg du Lion d’Angers et de Thorigné d’Anjou, mais également de part et d’autre de la Mayenne. Ces dynamiques de fermeture sont liées à l’enfrichement progressif, mais également au développement de la populiculture aux abords des cours d’eau. La silhouette si particulière et identitaire des frênes têtards est peu à peu supplantée par les rythmes graphiques des peupleraies, la transparence au niveau des troncs alignés selon une maille carrée. Ces bois d’exploitation revêtent de plus un caractère temporaire à l’échelle des paysages (exploitation d’une parcelle sur 20 - 25 ans).
Face au développement des peupleraies aux abords des cours d’eau, des initiatives ont été engagées en vue de limiter la fermeture des vallées depuis 20 ans.
La réglementation des boisements qui avait été négociée sur plusieurs communes des Basses Vallées Angevines, et qui est restée stable jusqu’en 2015, consistait en la délimitation de trois zones :
- Des zones interdites au boisement sur des secteurs d’intérêt écologique majeur et en particulier sur les prairies favorables aux Râles des genêts (environ 3250 ha).
- Des zones réglementées sur lesquelles les plantations sont soumises à autorisation du préfet (environ 1650 ha).
- Des zones où le boisement est libre.
Cette situation passée explique la moindre proportion des nouvelles plantations ces dernières années.
L’évolution des boisements
Entre la Mayenne et l’Oudon, le parc de 180 hectares du haras national de l’Isle-Briand au Lion d’Angers est classé Espace naturel sensible et Zone Natura 2000. La comparaison des orthophotos de 1958 et 2012 affiche une certaine stabilité du tissu boisé. Les initiatives locales visent à préserver les arbres de la chênaie par des opérations de reboisement.
Par ailleurs, les vallées du Haut Anjou pourraient être concernées à plus ou moins court terme par l’arrivée d’une maladie qui touche les frênes, espèce identitaire des basses vallées angevines : la chalarose du Frêne. Une observation précise de l’évolution des arbres est nécessaire pour identifier le cas échant la maladie et pouvoir répondre de façon adéquate aux enjeux en termes de préservation et de replantation éventuelle.
La prise en compte du risque inondation
A l’instar du Lion d’Angers, l’unité paysagère est concernée par le risque inondation qui contribue à orienter les développements urbains en limitant les possibilités d’extension sur certains secteurs et en favorisant donc les extensions vers d’autres. Au niveau du Lion d’Angers, ce risque est particulièrement fort au niveau de l’Isle Briand et dessine autour de l’Oudon une zone qui encercle l’espace urbanisé sur sa frange ouest.
Un développement urbain pavillonnaire sur les coteaux
La comparaison des orthophotos de 1957 et 2012 montre l’orientation des développements urbains sur les dernières décennies. Ainsi, du noyau originel installé sur la rive droite de l’Oudon, la ville s’étend progressivement vers l’ouest en investissant les coteaux surplombant la rivière. Le développement de lotissements importants témoigne d’une certaine pression urbaine sur l’axe Angers-Laval. Au sud-ouest du bourg, et plus récemment au nord-ouest, un tissu pavillonnaire se développe et contribue à repousser les limites de la ville. L’axe de contournement semble créer une limite à ce développement mais ouvre également d’assez vastes terrains vierges et enclavés dont la future urbanisation semble (en dehors des zones inondables) se dessiner. De nouveaux enjeux émergent en lien avec la perception des franges urbaines.
La diffusion urbaine sur les coteaux est un phénomène que l’on retrouve dans d’autres secteurs de l’unité, notamment aux abords de la Sarthe (Écouflant, Briollay) et du Loir (Seiche-sur-le-Loir). Au-delà des problématiques d’accessibilité aux vallées que ces phénomènes de diffusion génèrent, la question des phénomènes de covisibilité de coteau à coteau s’accentue.
Le développement de formes urbaines nouvelles
Sujette à des pressions urbaines grandissantes, le Lion-d’Angers propose un développement urbain avec de l’habitat individuel dense, cohérent avec des objectifs de limitation de la consommation foncière : constructions mitoyennes, alignement sur l’espace public, hauteur à R+1 minimum…
L’unité paysagère des vallées du Haut Anjou connaît d’autres exemples de ces évolutions urbaines, notamment à proximité de l’agglomération angevine, en proie à des pressions urbaines très fortes. Le secteur d’Écouflant notamment connaît un développement de ces nouvelles formes urbaines.
Des infrastructures en développement
Ainsi le secteur du Lion-d’Angers connaît un développement des infrastructures routières principales avec l’aménagement du contournement du bourg à l’ouest. Cet axe structurant fait par ailleurs l’objet d’une mise en 2x2 voies entre La Membrolle-sur-Longuenée et le Lion-d’Angers.
Un développement des zones d’activités
Le secteur du Lion-d’Angers connaît par ailleurs un développement des zones d’activités au nord et au sud du bourg. Plus récent, le développement de la zone d’activités au sud du bourg s’appuie notamment sur le renforcement de la RD 775. L’aménagement et la viabilisation de la zone se sont accompagnés des premières installations des bâtiments d’activités qui composent le paysage de l’entrée de ville sud. Pour autant, des espaces aménagés laissés vacants créent une forme de paysage en attente peu qualitatif.
Le développement des activités aux abords des axes principaux est une constante que l’on retrouve notamment au niveau de l’entrée est de Tiercé. L’unité paysagère des vallées du Haut Anjou livre également des exemples de développements des bâtiments d’activités selon un schéma très diffus au niveau de la RD 323 qui relie Angers à Seiches-sur-le-Loir. Cette forme de développement assez ancienne évolue aujourd’hui avec une augmentation du nombre bâtiments sans activités qui contribue à faire émerger l’image de friche urbaine.
Par ailleurs, le secteur du Lion d’Angers a connu le développement d’un site de carrière au nord-ouest du bourg. L’accompagnement paysager limite la présence visuelle de cette activité dans le paysage. D’autres exploitations de carrière ont investi les paysages de l’unité, notamment dans le secteur de Seiches-sur-le-Loir avec activité de sablière.
Des équipements structurants qui renforcent l’attractivité du Lion d’Angers
Au confluent des deux rivières s’étend l’Isle-Briand, écrin végétal de 160 hectares, accueillant des activités hippiques de renommée mondiale grâce au haras national et à l’hippodrome. Au-delà de ces installations imposantes (gradins, hangars, stade…), de nouveaux équipements et aménagements se sont ainsi greffés au sein ou à proximité du site. Ce sont notamment les sentiers de promenade, les aires de jeux, ainsi que le camping.
Mayenne. De nouveaux équipements dédiés à la randonnée pédestre et cyclable sont ainsi mis en place dans ce secteur.
Le secteur du Haut Anjou se caractérise par un patrimoine bâti de qualité, d’échelle différente. Il apparaît que ce patrimoine est souvent réhabilité et repris.
L’île Saint-Aubin, déjà évoquée dans le cadre des dynamiques de préservation des modèles de pâture, constitue également un site lié au développement touristique. L’île Saint-Aubin constitue ainsi un milieu agricole écologiquement riche. C’est aussi pour le visiteur un lieu d’éducation à l’environnement et de détente (guinguette, ferme pédagogique, sentier d’interprétation …). Pour accéder à l’île, il faut emprunter un bac situé au « Port de l’Île », au bord de la Mayenne.
Des pressions accentuées à proximité de l’agglomération angevine
La proximité d’Angers, le cadre de vie… sont autant d’atouts pour expliquer une forte pression urbaine qui s’est traduit par un développement des extensions sous forme de lotissements (Écouflant, Cantenay-Épinard) mais aussi sous forme de mitage dans le système bocager des coteaux (Briollay, Vérigné, Soucelles).
Les phénomènes de diffusion urbaine sont particulièrement visibles dans le secteur de Briollay qui connaît des développements pavillonnaires soutenus aux abords des voies, notamment sur la route de Tiercé.
Des dynamiques de déprise agricole sur les pâtures
Une des dynamiques agricoles de l’unité paysagère est la diminution de la pâture sur le plateau. Tandis que dans les secteurs de vallées, ces activités se maintiennent. Elles font depuis plusieurs années l’objet d’initiatives nouvelles visant à la promotion de système extensif, pour lequel l’île Saint-Aubin fait figure de laboratoire, notamment pédagogique.
En 1976, pour éviter que le site ne devienne friche ou gigantesque peupleraie, la Ville décide d’y créer une zone d’aménagement différé. Elle peut ainsi préempter les terrains mis en vente et devient propriétaire d’une quarantaine d’hectares. En 2000, afin de sensibiliser les angevins à la protection de ce milieu naturel remarquable, la municipalité souhaite valoriser l’île Saint Aubin, située sur sa commune, et rénover le corps de ferme. En 2005, la rénovation du corps de ferme est lancée et devient en 2008 un espace dédié à l’éducation à l’environnement et au patrimoine culturel et traditionnel de l’île.
Lieu de jonction entre la Sarthe et la Mayenne qui forment ensuite la Maine, l’ile sert de zone tampon lors des crues parfois importantes de ces rivières. Inondée une centaine de jours par an en moyenne, l’ile est constituée de prairies ou l’élevage bovin allaitant domine. Fauche et pâturage y sont pratiqués de manière extensive, permettant ainsi au site de constituer une réserve importante de biodiversité. Ces mesures de protection de l’environnement et de la biodiversité impactent l’exploitation agricole du site, presque exclusivement recouvert de prairies. L’élevage bovin viande y est extensif, le nombre d’animaux présents par unité de surface étant faible.
A noter que des démarches locales en lien avec le maintien de l’élevage dans un cadre environnemental préservé émergent. Regroupés en juin 2001 dans l’association « Eleveurs des Vallées Angevines », des éleveurs ont créé un contexte d’élevage unique en adaptant leurs techniques au milieu à protéger (conduite de pâturage selon les crues, alimentation des bovins basée sur l’herbe, entretien des haies, fenaisons…). La marque « l’Eleveur & l’Oiseau, le bœuf des vallées » lancée en août 2001 montre le lien étroit qui unit le métier d’éleveur et ses actions en faveur de l’environnement et la survie d’une espèce menacée. Une charte particulière à « l’Eleveur & l’Oiseau » propose aux exploitations adhérentes établissent un lien direct entre les systèmes de production (importance de l’herbe) et leur engagement vis à vis de l’environnement avec leurs surfaces en contrat dans les vallées inondables. Actuellement une trentaine d’élevages adhèrent à l’association (sur un potentiel d’environ 200 exploitations).
Depuis la mise en place des mesures agri-environnementales la situation a changé au niveau de l’entretien (maintien des exploitations, diminution des friches), des plantations de peupliers (réglementation des boisements) et pour les habitats botaniques et ornithologiques sauvegardés
Pour en savoir plus sur la démarche « l’Eleveur & l’Oiseau »
Sources bibliographiques
- J.-B. HUMEAU et H. DAVODEAU. Dossier Étude de l’Atlas de paysages de Maine et Loire