L’agglomération mancelle (UP15)

publié le 22 décembre 2015 (modifié le 5 janvier 2017)

Pour en savoir plus sur les paysages types de l’agglomération mancelle

Un centre historique aux paysages urbains intimistes :
Cette entité urbaine, au très riche patrimoine, est la seule véritablement d’échelle intimiste. Les petites ruelles, que l’on découvre à pieds, serpentent dans la cité cadrant des vues sur de petits espaces publics ou dans le lointain sur les coteaux ouest de la Sarthe ou sur des vues courtes à l’est sur les paysages urbains plus récents (place des Jacobins…). Les maisons à pans de bois offrent sur leurs façades ocre aux teintes chaudes une richesse de détails architecturaux. La géométrie asymétrique des rues et leur étroitesse créent sans cesse des effets de surprise et leurs pavés racontent l’histoire ancienne de la cité. Au détour d’un porche ou d’une porte ouverte, on découvre une cour, un jardinet, sortes de sas entre espace public et privé qui témoigne de toute la complexité de cet enchevêtrement de ville. Cette identité de la cité Plantagenêts est d’autant plus forte que ce secteur est isolé, comme suspendu au-dessus de la ville. Dominée par la cathédrale, la vieille ville trouve, contrairement aux autres quartiers, plus d’entrées piétonnes que d’accès routiers.

Entre maisons à colombages et demeures renaissance, un paysage urbain intimiste et historique dans le vieux Mans en grand format (nouvelle fenêtre)
Entre maisons à colombages et demeures renaissance, un paysage urbain intimiste et historique dans le vieux Mans



Le centre urbain composite :
Cette entité, l’une des moins homogènes, s’identifie principalement par son tissu urbain dense de bâtiments mitoyens hauts (R+3 à R+8). Les rues sont cloisonnées par les façades et principalement vouées aux circulations et stationnements automobiles (à l’exception de certaines rues piétonnes et des espaces recomposés par le passage du tramway). L’architecture hétérogène retraduit l’histoire mouvementée des restructurations successives autour du carrefour urbain de la Place de la République. Ainsi se mêlent l’architecture des églises des anciens couvents, les façades classiques des anciens hôtels particuliers offrant tout le raffinement des pierres de taille calcaires, les ensembles d’immeubles de la Percée Centrale de l’Avenue François Mitterrand et de Gaulle aux volumes monumentaux et aux façades simples et les quartiers de quelques grandes Mancelles. Les ouvertures successives de pénétrantes donnent dans le paysage des rues d’aujourd’hui une échelle adaptée à la circulation automobile et offrent du recul et de la lumière aux façades. L’hétérogénéité architecturale crée sans arrêt des contrastes importants d’une rue à l’autre ou parfois même au sein d’une même rue. L’espace public est principalement traité comme espace de circulation ou de stationnement avec peu d’espaces de vie en dehors des rues réaménagées pour le passage du tramway, de la Place de la République et de la place de la gare véritables points de convergence fédérateurs de ces quartiers dont l’identité réside dans la densité et la diversité.

Un centre urbain marqué par une diversité architecturale témoignant des nombreux remaniements (Le Mans) en grand format (nouvelle fenêtre)
Un centre urbain marqué par une diversité architecturale témoignant des nombreux remaniements (Le Mans)



Le paysage urbain des Mancelles (maisons types de quartier populaire à partir du milieu du XIXème siècle) :
Les Mancelles sont des maisons d’habitations individuelles basses (R, R+1 ou R+2), mitoyennes et alignées directement sur la rue rectiligne refermant un ilot de petites parcelles jardinées découpées perpendiculairement à la rue. L’étroitesse de la composition de leur façade crée en alignement un rythme répétitif très significatif. Dans les alignements des petites mancelles, les lucarnes accentuent ce rythme par les saillies successives sur les pans d’ardoise des toits. Dans les alignements de grandes mancelles, la continuité des corniches crée un effet de gabarit linéaire, avec un rapport hauteur de façade largeur de rue équilibré. Bien que d’architecture très homogène, ces rues voient leur paysage varier au gré des notes de couleurs apportées par chacun sur son enduit, les fenêtres, les portes et volets. La place que prend la voiture dans la rue et l’enchevêtrement des réseaux aériens contribuent à compliquer la lecture de ces rues où le végétal est absent. En fait la minéralité de la rue contraste de façon étonnante avec le foisonnement jardiné des cœurs d’îlots. Ainsi l’alignement des façades cache une enfilade de jardins propices à l’échange et favorisant autant que la mitoyenneté l’esprit de quartier.

Des alignements de maisons très semblables qui délimitent des rues parfois austères et masquent des coeurs d'îlots jardinés (Le Mans) en grand format (nouvelle fenêtre)
Des alignements de maisons très semblables qui délimitent des rues parfois austères et masquent des coeurs d’îlots jardinés (Le Mans)



Le paysage pavillonnaire :
Occupant une grande partie du territoire urbanisé, ces quartiers se sont développés en couronne autour de la ville suivant les principaux axes de dessertes. Ils ont en général tous fait l’objet de réflexions dans le cadre d’une opération d’urbanisme ce qui leur confère à chaque fois une identité propre clairement lisible qui répond cependant aux critères communs suivants :

  • Des pavillons implantés de façon régulière plus ou moins dense (gradient des maisons mitoyennes au tissu plus lâche des quartiers périphériques)
  • Des volumes bâtis de petite taille (R à R+1) avec un traitement souvent similaire qui contribue à générer une identité propre au quartier.
  • Une implantation raisonnée le long des voies d’accès dessinées suivant une logique interne et toujours bordées d’un trottoir plus ou moins large supportant parfois du stationnement latéral ou des alignements arborés.
  • Une implantation en milieu de parcelle qui laisse entre le trottoir et la façade une clôture et un jardin d’agrément apportant une certaine diversité voir une grande hétérogénéité de la rue.
  • Des espaces publics d’échelle humaine proposant pour certains quartiers des squares et des placettes
  • Des différences sensibles entre les plans de lotissements et époques de constructions redécoupant cette unité en sous-espaces aux ambiances variées.

Ces ensembles pavillonnaires qui se sont étendus très rapidement ont composé un vaste labyrinthe sans véritable centralité ni repères, si ce n’est pour les quartiers est les quelques opérations de logement collectifs qui densifient ponctuellement et changent l’échelle de ces quartiers.

Un paysage pavillonnaire où les quartiers résidentiels s'étendent en première couronne de la ville centre, masquant ici visuellement la Sarthe (Le Mans – Coulaines ; Source photo aérienne : CUM, CAUE de la Sarthe, 2003) en grand format (nouvelle fenêtre)
Un paysage pavillonnaire où les quartiers résidentiels s’étendent en première couronne de la ville centre, masquant ici visuellement la Sarthe (Le Mans – Coulaines ; Source photo aérienne : CUM, CAUE de la Sarthe, 2003)



Le gradient urbain des quartiers sud-est :
Le secteur sud est de la zone agglomérée reprend exactement les composantes des paysages urbains décrits précédemment en les exprimant de façon graduelle sur des axes structurants rayonnants depuis la place Adrien Tironneau. Ainsi les volumes denses et hauts cernant la place et bordant la vallée de l’Huisne, laissent progressivement place à des quartiers de mancelles qui se transforment progressivement en tissu pavillonnaire ou en cités ouvrières. Bien que le réseau viaire étoilé sur lequel se déroule ce gradient urbain soit très structuré, le paysage que l’on perçoit est globalement assez hétérogène et le traitement banal de l’espace public en dehors des secteurs traversés par le tramway ne suffit pas à composer un élément unificateur. A cela s’ajoute une grande partie de la zone d’activités et de la zone ferroviaires (de la sous-unité voisine du paysage industriel du Mans) qui participent à la complexité de perception de ce secteur.

Paysage urbain du sud manceau où s'articulent dans la confluence Huisne Sarthe les quartiers ouvriers, les grands ensembles et les secteurs pavillonnaires avec l'amorce de la vaste zone industrielle accolée aux réseaux ferrés (Le Mans – source : CAUE de la Sarthe, 2003) en grand format (nouvelle fenêtre)
Paysage urbain du sud manceau où s’articulent dans la confluence Huisne Sarthe les quartiers ouvriers, les grands ensembles et les secteurs pavillonnaires avec l’amorce de la vaste zone industrielle accolée aux réseaux ferrés (Le Mans – source : CAUE de la Sarthe, 2003)



Les grands ensembles de logements : des paysages urbains monumentaux (l’exemple des Sablons)
Ces secteurs à l’origine tiennent leur particularité non seulement de leur échelle mais aussi de leur mode de création : pour faire face à une importante demande en logements sur l’agglomération dans les années 50-60, le secteur des Sablons notamment a fait l’objet d’une procédure de Zone à Urbaniser en Priorité. L’ensemble est donc conçu et dessiné dans le cadre d’une opération globale par un architecte et les premiers programmes de l’OPHLM apparaissent en 1964. L’organisation du quartier, résolument tourné vers la vallée de l’Huisne, met l’accent sur de vastes espaces verts et des espaces publics larges desquels émergent de grands collectifs allant de R+3 à R+17 mais aussi de l’habitat individuel dense. Il en ressort à la fois une notion d’espace, une échelle monumentale et surtout une identité propre. Les équipements et commerces intégrés à cet ensemble le font presque fonctionner en autonomie. La particularité de cet espace dans le tissu urbain manceau contribue à l’identifier comme une enclave dans la ville (presqu’au même titre que le vieux Mans). L’homogénéité est telle sur cette entité qu’elle manque de repères d’autant que l’architecture banale pour ce type de zone ne permet pas d’identifier un secteur plus qu’un autre. Seuls quelques alignements d’arbres structurants le long des voies marquent certaines directions. Cependant l’aménagement en 2007 de la première ligne de tramway sur le boulevard Winston Churchill a permis de désenclaver ce quartier et de lui redonner des repères identitaires.

Paysage de grands immeubles dans un écrin de verdure caractéristique des grands ensembles (les Sablons, Le Mans) en grand format (nouvelle fenêtre)
Paysage de grands immeubles dans un écrin de verdure caractéristique des grands ensembles (les Sablons, Le Mans)

Pour en savoir plus sur les séquences paysagères de la Sarthe et de l’Huisne

Les prairies inondables de la Sarthe au nord et au sud de l’agglomération :
Clairement cloisonnée avec ses coteaux souvent boisés, cette séquence paysagère est la plus ouverte des paysages d’eau. Occupée essentiellement par des prairies inondables, elle offre des dégagements visuels assez lointains souvent interrompus par de petites haies ou fermés ponctuellement par des peupleraies. Rompant littéralement avec le paysage urbain dense qui l’entoure et le cloisonne, ce paysage assez linéaire offre une véritable coupure verte marquée par une végétation typique des bords d’eau (aulne, frêne, saule…) et ponctuée d’une architecture traditionnelle particulière implantée souvent en pied de coteau. Notons ici les maisons d’écluse le long de la Sarthe qui tranchent littéralement avec les architectures plus simples et monumentales des zones industrielles ou grands ensembles proches. Elles constituent avec le canal des événements patrimoniaux qui vivent encore au gré du tourisme fluvial.

Paysage le long de la Sarthe de prairies inondables ouvertes sur le coteau boisé et la frange urbaine du Mans (Allonnes) en grand format (nouvelle fenêtre)
Paysage le long de la Sarthe de prairies inondables ouvertes sur le coteau boisé et la frange urbaine du Mans (Allonnes)

Des enclaves de jardins ouvriers se démarquent dans les prairies du fond de vallée par la concentration en l’enchevêtrement hétéroclite de clôtures, cabanons de toutes sortes et jardinets potagers ou de détente. La complexité et le fourmillement de matières, de couleurs ou de lignes en font un patchwork étonnamment contrasté qui fonctionne comme un îlot isolé et surprenant dans l’harmonie paysagère de la vallée.

Des secteurs de jardins familiaux qui accompagnent le cours de la Sarthe ou de l'Huisne (Le Mans) en grand format (nouvelle fenêtre)
Des secteurs de jardins familiaux qui accompagnent le cours de la Sarthe ou de l’Huisne (Le Mans)



Au sud (Spay, Arnage, Allonnes) la présence de nombreux plans d’eau liés à la mise en eau d’anciennes exploitations de sablières renforcent la présence de l’eau dans le paysage du fond de vallée. Certaines ont fait l’objet d’aménagements spécifiques pour les loisirs comme la base de la Gèmerie par exemple

La succession de miroirs d'eau laissés par les sablières encore en activité sur les terrasses de la Sarthe au sud du Mans. en grand format (nouvelle fenêtre)
La succession de miroirs d’eau laissés par les sablières encore en activité sur les terrasses de la Sarthe au sud du Mans.



Malgré la qualité de ce paysage, les chemins de randonnées ne sont pas forcément très lisibles ou aménagés ce qui rend ces espaces pas toujours facilement accessibles à pieds depuis la ville. Cependant les projets et les aménagements récents développent progressivement un réseau de voies douces comme le Boulevard Nature, voie verte autour de l’agglomération mancelle (41 km réalisés sur les 72 prévus), et le projet de chemin communal sur Arnage (enquête publique début 2015).

Les vallées espaces verts ou coulées vertes urbaines
Cette unité s’appuie en fait sur la structure du paysage décrit précédemment dans la mesure où elle en constitue une évolution. Tournées vers la Sarthe ou l’Huisne, ces zones occupent les anciennes prairies inondables et ont été plus ou moins fortement aménagées en parcs, promenades, zone de loisirs ou de sport. Le bâti y est faiblement représenté et c’est résolument le végétal qui domine : soit avec des espèces spontanées que l’on retrouve traditionnellement sur la ripisylve de ces deux rivières (aulne, saule, frênes…) soit avec des espèces plus ornementales plantées pour agrémenter les promenades ou mettre en scène les zones d’eau et son patrimoine spécifique (manufactures, écluses). Ainsi lorsque l’on traverse les ponts sur ces secteurs, c’est généralement une impression de couloir vert qui domine. L’identité de ces paysages est très liée à la présence de l’eau et du végétal mais la différence de traitements au gré des opérations d’aménagement (Les Sablons, Gué de Maulny, promenade du canal…) apporte une certaine diversité. On notera plus particulièrement l’aménagement de l’île aux sports et les abords de l’abbaye de l’Épau qui avec leurs plans d’eau et leurs espaces prairiaux ou naturels ouvrent complètement l’espace et remettent en premier plans l’élément aquatique dans sa dimension patrimoniale dans la vallée de l’Huisne.

L'abbaye de l'Épau, un site patrimonial dans les boucles de l'Huisne, qui s'accompagne de parcs, espaces naturels et nombreux équipements sportifs ou de loisirs (Yvré-l'Évêque) (source : CAUE de la Sarthe, 2003) en grand format (nouvelle fenêtre)
L’abbaye de l’Épau, un site patrimonial dans les boucles de l’Huisne, qui s’accompagne de parcs, espaces naturels et nombreux équipements sportifs ou de loisirs (Yvré-l’Évêque) (source : CAUE de la Sarthe, 2003)



L’intérêt primordial de ces espaces est qu’ils permettent par leurs promenades sur berge de profiter des deux cours d’eau majeurs de la ville. Même si la continuité entre les parcours est loin d’être assurée, la présence de passerelles piétonnes rend ces coulées vertes facilement accessibles. Ce réseau de promenade s’est étendu avec l’aménagement du Boulevard Nature, voie verte autour de l’agglomération mancelle et le projet de chemin communal sur Arnage. La zone de confluence entre les deux rivières, peu valorisée sauf pour l’allée des pêcheurs, présente un potentiel important de charnière entre les deux coulées vertes et non exploité actuellement. Un projet d’aménagement y est prévu pour lutter contre les inondations.

La vallée urbaine historique
La séquence est marquée par le rapport direct entre la Sarthe et la vieille ville perchée derrière ses murailles. La rivière, canalisée et maîtrisée sur ce secteur, joue le rôle de miroir d’eau et démultiplie l’espace. La présence de jardins sur d’anciennes emprises bâties entre la Sarthe et la muraille contribue également à ouvrir l’espace et à mettre en valeur l’enceinte. Sur la rive droite, le front bâti simple et homogène, s’efface un peu face à la vieille ville. Les quais assez larges offrent un recul intéressant et des points de vue uniques où l’on peut apprécier les enchevêtrements de toits d’ardoises, les jeux de niveaux des pans de murs ocres du Vieux Mans perché sur les motifs géométriques de son enceinte et dominé par la dentelle architecturale de la cathédrale. Les jardins en pied de muraille ou le long de la Sarthe offrent un écrin vert à la vieille ville et cadrent les vues au gré des vieux cèdres et des saules. Seule la présence importante des infrastructures routières perturbe la lecture de ce rapport presque oublié entre la vieille ville et son site d’implantation.

Paysage emblématique du Vieux Mans dominant la vallée de la Sarthe du haut de ses murailles entourées d'un parc urbain (Le Mans) en grand format (nouvelle fenêtre)
Paysage emblématique du Vieux Mans dominant la vallée de la Sarthe du haut de ses murailles entourées d’un parc urbain (Le Mans)



La vallée urbaine monumentale
Canalisé comme dans la séquence précédente, le cours de la Sarthe paraît ici encore plus artificiel dans la mesure où il est cadré par des fronts urbains parfois monumentaux. Ainsi, à l’horizontalité du couloir d’eau répond la verticalité des immeubles ou des bâtiments industriels et ce dans des proportions équilibrées créant un rapport brutal de monumentalité. Seules les plantations du quai de l’Amiral, Lalande et le liseré boisé longeant le boulevard Demorieux contrebalance la minéralité urbaine et offrent un guide visuel vert adoucissant les lignes de la ville. Le contraste avec la séquence précédente est assez saisissant d’autant que le piéton trouve difficilement sa place notamment sur les quais où le stationnement encombre le passage.

L’ancienne friche industrielle de l’île aux Planches, entre la Sarthe et son canal, réhabilitée en parc offre une ouverture intéressante dans le paysage urbain.

Un rapport de monumentalité avec la Sarthe des grandes barres de logements qui longent la rivière (Le Mans) en grand format (nouvelle fenêtre)
Un rapport de monumentalité avec la Sarthe des grandes barres de logements qui longent la rivière (Le Mans)



La vallée pavillonnaire
Cette séquence se caractérise par une organisation quasi-symétrique de part et d’autre de l’axe du cours d’eau. Ourlée d’une mince ripisylve de frênes, d’aulnes et de peuplier, la rivière ouvre un véritable couloir vert marqué par la bande hétéroclite des jardins potagers ou d’ornement. Derrière cette enfilade jardinée apparaissent les toitures alignées des pavillons. Ce foisonnement végétal, amplifié par la réflexion de l’eau est d’autant plus surprenant qu’il contraste avec l’absence de végétation dans les rues des quartiers limitrophes. La présence de ces jardins privés jusque sur la berge notamment de l’Huisne amène deux conséquences sur l’organisation spatiale et la perception de cette séquence :

  • Les continuités piétonnes le long des rivières sont interrompues ponctuellement ce qui à l’échelle de la ville se traduit par la difficulté d’affirmer deux axes piétons forts nord sud et est ouest s’appuyant sur le potentiel des coulées vertes des deux cours d’eau.
  • Le morcellement des parcelles privées aménagées aux goûts et moyens des propriétaires se traduit par une succession hétérogène plus ou moins heureuse de cabanons, pontons, abris de jardins et associations végétales qui composent des cimaises rivulaires de qualités très inégales.

Notons ici la présence du quartier des Sables d’or qui amène dans cette séquence des caractères paysagers plus propres à la séquence urbaine et prend du coup par son échelle un rôle de repère.

Des quartiers pavillonnaires qui semblent privatiser la Sarthe au fond de leurs jardins (Le Mans) (source : CAUE de la Sarthe, 2003) en grand format (nouvelle fenêtre)
Des quartiers pavillonnaires qui semblent privatiser la Sarthe au fond de leurs jardins (Le Mans) (source : CAUE de la Sarthe, 2003)

Pour en savoir plus sur l’histoire du développement des paysages urbains du Mans

L’objectif de ce volet n’est pas de composer un inventaire exhaustif de l’histoire urbaine du Mans mais plutôt de comprendre le rythme d’évolution de la ville et les traces les plus évidentes laissées par chaque époque sur les paysages urbains d’aujourd’hui.

Une implantation gallo-romaine et l’émergence d’une place forte
La naissance de la ville du Mans renvoie directement à la lecture de la topographie. En effet, la butte du « Vieux Mans », située au bord de la Sarthe, non loin du confluent de celle-ci avec l’Huisne, présente des atouts évidents de protection et de communications qui ont valu la création de la place forte gallo-romaine dès le début de notre ère. Ainsi, la ville s’est installée sur cette butte naturelle pour s’étendre dans le creuset formé par le vallon d’Isaac. En relation directe avec le port sur la Sarthe (au niveau de l’actuel pont Gambetta), la ville gallo-romaine se développe, en atteste les grands travaux réalisés pour l’approvisionnement en eau avec les aqueducs des Fontenelles et d’Isaac, les thermes et les axes de circulation qui commencent à se former.
Au IIIème siècle, consécutivement aux invasions germaniques qui désorganisèrent le pouvoir central, sont édifiées les murailles de défense encore lisibles actuellement. L’enceinte de Vidunum dessine ainsi un quadrilatère irrégulier qui détermine une surface de 9 Ha en suivant la topographie. L’enceinte gallo-romaine en partie conservée et de par sa couleur, donne le nom de « ville rouge » au Mans. Ce site topographique fait de la cité un haut lieu de convergence, notamment traversée par deux grandes routes de Neustrie (Vème siècle).
Georges PILLEMENT (1898-1984) lance dans son ouvrage « Saccage de la France » un véritable cri d’alarme pour sauver le vieux Mans : « Malgré les avertissements, un crime stupide et abominable se prépare : au lieu de cureter et d’assainir cette admirable ville d’art si mal connue qu’est le vieux Mans, on le livre au massacre. […] on ignore habituellement que Le Mans est une des villes d’art les plus captivantes de France. […] Le vieux Mans qui se dresse sur son éperon en bordure de la Sarthe […] est divisé en deux tronçons par ce qu’on appelle la grande tranchée, une énorme voie construite il y a une cinquantaine d’années pour relier directement aux quartiers neufs le faubourg de Notre Dame du Pré, qui se trouve sur l’autre rive de la Sarthe. […] on a perdu du même coup une des tours de l’enceinte, car le vieux Mans conservait à peu près intactes ses murailles en grande partie galloromaines, notamment sur toute la longueur qui domine la rivière ». Il pousse même la comparaison sur cet édifice, « le seul capable en France de rivaliser d’allure avec la Cité de Carcassonne. »
Heureusement, depuis ce texte datant du début des années 40, comme l’explique Jacques BOISLEVE, « le vieux Mans est désormais sauvé. L’enceinte gallo-romaine a été dégagée et mise en valeur, les logis anciens ont, non seulement, été restaurés, mais leurs boiseries ont retrouvé leurs couleurs. […] Surtout, la cathédrale du Mans, romane par sa nef, gothique par son chœur, et qui a arraché à Paul Claudel un bien légitime cri d’admiration, a conservé ainsi un cadre d’époque. »

Les vestiges de l'ancienne muraille gallo-romaine qui ceinture encore le coeur historique de la ville (source : CAUE de la Sarthe) en grand format (nouvelle fenêtre)
Les vestiges de l’ancienne muraille gallo-romaine qui ceinture encore le coeur historique de la ville (source : CAUE de la Sarthe)



Au Moyen-Age, les Manceaux explorent les terrains situés au bas de la muraille et joignent ces foyers d’urbanisation en créant des chemins au gré de la topographie. Ainsi naît la première ossature de la ville que l’on peut encore lire dans le paysage urbain dans les anciennes rues encore sinueuses : rues des Ponts neufs, Marchande, Saint Jacques, Perle…

Une ville carrefour ceinte par les abbayes et couvents
Véritable carrefour commercial, la ville s’étire suivant ses axes de communication majeurs vers Paris, Laval, Alençon, Nantes et Tours. La place des Halles (actuellement place de la République) devient un lieu majeur d’échange dans la ville. L’artisanat se développe avec notamment les activités en rapport avec l’eau et le monde rural (tanneurs, tisserands, négoce) et avec lui une architecture particulière où se mêlent dans le même bâtiment l’atelier et la maison d’habitation. C’est cette époque qui laissera ainsi le plus de marques dans le paysage de la vieille ville avec notamment les rues commerçantes des maisons à pans de bois témoignant du rôle de plaque tournante commerciale de la ville entre Paris, la Bretagne et le Centre.
Cependant, ce développement est contraint par la présence de nombreuses enceintes religieuses autour de la ville, notamment sur la rive droite. Encloses dans des murs, ces communautés vivaient en quasi autarcie sur leurs champs, vergers et potagers qui entouraient les lieux de culte et d’habitat communautaire. Les églises constituent les repères de cette époque dans le paysage de la ville d’aujourd’hui mais l’organisation spatiale particulière qui les accompagnait n’est souvent plus guère lisible.

Plan de la ville du Mans : [dessin] / [Louis Boudan] – 1695 montrant les enceintes religieuses autour de la ville (Source Bibliothèque nationale de France, département Estampes et photographie, EST VA-72 (3)) et vue aérienne du domaine de l'abbaye de L'Épau (Source : CAUE de la Sarthe, 2003) en grand format (nouvelle fenêtre)
Plan de la ville du Mans : [dessin] / [Louis Boudan] – 1695 montrant les enceintes religieuses autour de la ville (Source Bibliothèque nationale de France, département Estampes et photographie, EST VA-72 (3)) et vue aérienne du domaine de l’abbaye de L’Épau (Source : CAUE de la Sarthe, 2003)



De la renaissance à la Révolution, du cœur de ville aux faubourgs
Le centre de la ville du Mans s’est structuré à travers les époques et conserve des édifices bâtis qui font aujourd’hui la renommée de la cité. Les activités économiques sont repoussées sur la rive gauche de la Sarthe et ne commenceront à s’émanciper qu’au début du XVIIème siècle. L’extension du tissu urbanisé est alors freinée par les terres cultivées qui entourent la ville, aux mains des monastères. Les quartiers au Sud et à l’Est se créent lorsque les élites deviennent bourgeoises et les riches commerçants quittent les murailles pour se rapprocher de la vallée de l’Huisne.

La Révolution et l’avènement des grands travaux d’urbanisme
La Révolution a pour effet de faire éclater la barrière des couvents à l’intérieur de laquelle la ville était circonscrite. De grands travaux urbains vont être engagés, terminés, pour la plupart, sous l’Empire. C’est véritablement à cette époque qu’apparaît la notion d’urbanisme au Mans. Les rues sont frappées d’alignement et les recompositions ou les extensions urbaines sont confiées à des architectes et des ingénieurs qui organisent la ville en appliquant les méthodes de l’urbanisme classique basé sur le schéma de la grille orthogonale et les axes rayonnants. L’espace urbain est alors maîtrisé par les autorités municipales. Ainsi l’enclos des Ursulines fait l’objet d’un vrai plan de lotissement et devient le quartier de l’Étoile où cinq rues débouchent sur la Place L. Lecouteux suivant une composition circulaire.

Des artères rectilignes qui tracent de nouvelles perspectives dans la ville au-delà des murs - Le Mans. Sarthe : H. Clerget (1818-1899). (Source : H. CLERGET. BNF, département Estampes et photographie, EST RESERVE VE-26 (L)) en grand format (nouvelle fenêtre)
Des artères rectilignes qui tracent de nouvelles perspectives dans la ville au-delà des murs - Le Mans. Sarthe : H. Clerget (1818-1899). (Source : H. CLERGET. BNF, département Estampes et photographie, EST RESERVE VE-26 (L))



Ces nouveaux plans qui structurent la ville témoignent d’une organisation urbaine radicalement différente. Les nouveaux quartiers sont parcourus de rues droites. La municipalité impose les alignements bâtis et l’unité architecturale. Les parcelles vastes sont organisées perpendiculairement à la rue et l’architecture sobrement classique est soignée. Parallèlement, les voies de communication sont améliorées toujours en convergeant vers la place des Halles. Le nouveau pont de Pontlieue est créé et la chassée est élargie et plantée. De même le pont Gambetta marque également le renforcement d’un nouvel axe urbain direct.
Les promenades publiques sont également créées (promenades des Jacobins et du Greffier) et abondamment plantées de tilleuls, arbre fétiche de l’ingénieur Bruyère.

L'amorce d'un urbanisme végétal avec la promenade des Jacobins qui structure encore aujourd'hui le centre-ville (le Mans) en grand format (nouvelle fenêtre)
L’amorce d’un urbanisme végétal avec la promenade des Jacobins qui structure encore aujourd’hui le centre-ville (le Mans)


La ville commence à s’étaler et elle porte en germe les mutations du tissu économique qui se font sentir : le passage d’un artisanat local à une économie plus industrielle.