Les sous-unités paysagères des vallées des marches de Bretagne
Sur le socle du relief deux grands plateaux se distinguent naturellement, séparés par la vallée du Don très ample qui véhicule ses propres ambiances dans un large couloir visuel. Les plateaux se distinguent eux par la densité du bocage, le rythme des boisements voire des ensembles forestiers et de la densité de population. Trois sous-unités paysagères s’identifient :
- Le plateau semi-ouvert de Derval
- Le val du Don
- Le plateau boisé du Gâvre et val d’Isac
Le plateau semi-ouvert de Derval
Cette sous-unité s’appuie au nord sur la vallée de la Chère se distingue par
ses jeux de covisibilités (effets de promontoires sur la vallée depuis le plateau) et ses ambiances intimistes de prairies bocagères inondables. Au sud, c’est la vallée du Don qui marque la fin de ce plateau. A l’ouest, c’est la vallée de la Vilaine et ses vastes marais qui prennent le relai. A l’est, la limite
est beaucoup moins nette et l’on constate une transition très progressive des ambiances bocagères à conifères vers le bocage plus dense à feuillus de l’unité voisine.
Ce plateau, au bocage résiduel très ouvert, laisse souvent de longues perspectives sur un relief faiblement ondulé. Les grandes cultures alternent avec les pâtures souvent délimitées par un rideau transparent d’arbres de haut jet, reliques d’une haie autrefois plus dense. Dans ce paysage semi-ouvert, les éléments construits prennent une grande importance et notamment les éoliennes qui se distinguent en repère sur l’horizon de Derval. Les bourgs sont souvent positionnés en repère sur le plateau, soit en son coeur (comme Derval), soit en bordure (comme Pierric), s’étageant sur les coteaux et jouant de covisibilités lointaines.
La voie express Nantes-Rennes marque également le paysage de cette sous-unité de deux façons : par la rupture physique et visuelle qu’elle produit dans l’espace et par la pression urbaine qu’elle induit sur les bourgs à proximité (et notamment le bourg de Derval).
Le val du Don
La vallée du Don est cadrée par deux coteaux plus ou moins pentus qui se distinguent dans le paysage par les landes et le boisement de leur crête, ainsi que des aplombs rocheux de gneiss ou granit parfois spectaculaires comme le Rocher de la Fée Carabosse à Guéméné-Penfao. Ils délimitent une vallée relativement large quadrillée de petites prairies bocagères.
Le paysage est beaucoup plus fermé que sur le plateau. La trame bocagère raccourcit les vues et cadre de petites prairies inondables qui s’enfilent le long de la rivière. Comme sur le reste de l’unité, on retrouve le mode de taille des arbres spécifique du sud Bretagne : la ragosse. Il donne aux arbres une silhouette singulière en forme de "cactus" géant l’hiver qui se distingue particulièrement dans le paysage. Ces haies sont composées d’aulnes, de frênes, de saules, de chênes, complétée par des lignes de peupliers.
Les bourgs s’implantent d’une manière générale de façon étagée sur les coteaux et le plus souvent à l’appui d’un vallon secondaire du Don. C’est notamment, le cas du centre de Guéméné-Penfao dont l’urbanisation s’est ensuite développée en éventail sur le plateau. L’ensemble de la vallée est marqué par un riche patrimoine de châteaux et de parcs situés en promontoire sur les coteaux, ainsi que de puits, moulins à eau et lavoirs implantés le long des rivières.
Le plateau boisé du Gâvre et val d’Isac
Des ensembles forestiers confortés d’une multitude de petits bois
Fortement boisée, cette sous-unité accueille quelques grands massifs forestiers (Forêt domaniale du Gâvre, forêt de la Bretesche, forêt de la Madelaine) et une multitude de petits boisements de feuillus (ponctués de quelques pinèdes) qui donne à cette unité son caractère. Elle présente des paysages à l’horizon rapproché et aux vues courtes. Elle développe de belles ambiances forestières. Les allées forestières rectilignes ouvrent de longues perspectives dans les futaies de feuillus. Les ambiances changent au gré des essences majoritaires de boisement : chênes, hêtres, pins sylvestres et maritimes, bouleaux… L’ancienne forêt du Gâvre se distingue par ses ambiances de cathédrale végétale et la présence de nombreux ruisseaux qui la traversent : elle renvoie directement aux forêts légendaires de la culture bretonne par le mystère qu’elle dégage.
Au sud de l’Isac, les boisements s’appuient systématiquement sur des vallons où des retenues créent des mares ou des étangs. Les ambiances de clairières d’eau sont alors remarquables avec ces lisières colorées qui se reflètent dans un miroir où le ciel semble s’être posé au beau milieu la forêt.
Ces ambiances sont par ailleurs confortées par les boisements linéaires du bocage. Seules les zones bocagères ouvertes par les grandes cultures dégagent de longues perspectives très vite cadrées par des rideaux d’arbres. Ce territoire est quadrillé par un réseau encore relativement dense de chemins creux bien conservés dans leur structure. Ils sinuent dans la campagne et proposent sous les frondaisons denses des chênes des voies ombragées ouvrant çà et là des fenêtres sur les prairies alentour.
Un réseau dense de vallons induisant des ondulations des plateaux et support d’urbanisation
De nombreux petits vallons secondaires créent sur cette fin de plateau des ondulations amples qui donnent une impression par endroits de relief collinaire. Si la forêt du Gâvre est inhabitée, sa lisière est soulignée de nombreux villages et bourgs. Les bourgs perchés s’implantent préférentiellement sur les coteaux ou les crêtes de ces petits vallons secondaires. De nombreux gros hameaux prolongent, dans la campagne, les ambiances villageoises.
Le val d’Isac et le canal de Nantes à Brest
La particularité de cette vallée réside aussi dans la navigabilité du cours de l’Isac qui constitue là une section du canal de Nantes à Brest. Cette voie d’eau révèle toute la richesse de cette sous-unité au travers de son histoire : le gabarit relativement régulier de la rivière, la présence de chemins de halage le long souvent soulignés d’alignements d’arbres et de quais ou d’appontements.
Sur la partie aval proche de l’embouchure le canal se dissocie du cours de l’Isac. Ce dernier prend un gabarit plus petit et un dessin plus sinueux. Le canal quant à lui prend son dessin plus rectiligne et longe le coteau. Le paysage dessiné par ces deux voies d’eau parallèles parfois très proches est assez singulier.
Le Val d’Isac, se distingue de sa partie en amont de Guenrouët par un gabarit qui s’ouvre plus largement pour laisser place à des prairies bocagères inondables. Ces prairies alternent avec des faciès de marais à phragmites qui se révèlent particulièrement dans le paysage par leurs chaumes dorés en hiver ou leur vert tendre en été.
La silhouette singulière des frênes têtards s’identifie : taillés quasiment à hauteur d’homme (souvent à deux ou trois mètres), ils développent un large tronc court qui se termine de façon renflée (comme une tête). Les charpentières qui se développent de manière uniforme autour de ce renflement, donnent à l’arbre un port boule régulier.
En relation directe avec le marais, de nombreux hameaux se sont installés en pied de coteau et s’étagent en remontant sur la pente (à l’abri des inondations). Les bourgs quant à eux s’implantent plus en haut de coteau avec des connexions descendantes vers le canal. Ils jouent ainsi des covisibilités d’un coteau à l’autre et sur le plateau.
Au sud, expression de la pression urbaine liée aux infrastructures
Sous l’influence de l’axe Nantes/Brest et de la jonction Pontchâteau/Redon, ce territoire présente une forte diffusion urbaine qui s’est agrégée non seulement aux bourgs mais aussi aux hameaux en les étirant le long des axes. Si l’architecture traditionnelle sur ce territoire (avec un riche patrimoine vernaculaire parfois remarquable) est d’influence bretonne, les extensions urbaines récentes renvoient au paysage plus banal des zones pavillonnaires périurbaines. De même, la pression de ces axes a induit l’essaimage des zones d’activités le long des voies qui marquent, depuis la campagne, les horizons boisés.