Les sous-unités paysagères des clairières entre Sarthe et Loir
Cette unité paysagère se caractérise par une organisation systématique en « strates » :
- Bois et pinèdes sur les sables sur les hauteurs
- Cultures sur les pentes des moutonnements
- Pied de vallon bocager et prairial
- Ripisylve soulignant les rivières et cours d’eau
Elle trouve des variations par secteurs dans l’expression plus importante d’un de ces quatre critères ou au contraire dans l’absence de certains d’entre eux, mais aussi dans la présence plus ou moins marquée de châteaux, la typologie des bourgs, le développement de certaines cultures spécifiques… Cinq sous-unités paysagères s’identifient :
- La vallée de la Sarthe
- Les bosquets de Malicorne
- Les clairières humides de la vallée de l’Aune
- La clairière ouverte du Bélinois
- Les vallons boisés du Dué et du Narais
La vallée de la Sarthe
En aval de l’agglomération mancelle, la vallée de la Sarthe présente un profil dissymétrique au coteau lisible en rive droite. Il marque clairement une limite et présente un profil diversifié alternant des pentes plus ou moins fortes, des boisements, l’implantation de quelques manoirs et châteaux en belvédère sur la vallée. De nombreux bourgs y prennent aussi appui, bourgs patrimoniaux aux extensions urbaines souvent linéaires le long des axes permettant de « profiter » de la vue, comme par exemple Juigné-sur-Sarthe, Avoise, Noyen-sur-Sarthe ou Fercé-sur-Sarthe. D’autres la dominent quand le coteau devient promontoire urbain comme à Voivres-lès-Le-Mans.
De nombreux noyaux urbains s’implantent à l’appui de la rivière et déclinent un patrimoine historique urbain de qualité, un registre de quais, cales illustrant ainsi le caractère navigable de la rivière. Ils développent aussi un patrimoine spécifique industriel (moulins, anciennes industries). Sablé-sur-Sarthe, implantée à la confluence de l’Erve et de la Sarthe, constitue une véritable rotule urbaine sur la Sarthe et est relayée vers le Mans par d’autres villes importantes comme Malicorne-sur-Sarthe, La Suze-sur-Sarthe … (développement important des activités et parfois des quartiers pavillonnaires cf. volet des dynamiques paysagères).
Le coteau rive gauche est revanche très peu perceptible, coteau très doux relayé par les boisements de la plaine. La rivière décrit de larges méandres soulignés par une ripisylve très dense, et occupés soit par des boisements soit par de grandes cultures qui ouvrent ponctuellement le paysage et induisent de longues covisibilités.
Les bosquets de Malicorne
Cette sous-unité ne compte pas de grands boisements, sauf en limite sud-ouest (forêt de Pincé et de Malpaire) mais une multitude de petits bosquets implantés préférentiellement sur les pentes des moutonnements ou les fonds de talwegs par ailleurs investis par une trame bocagère. Les grandes cultures dominent. Il en résulte un paysage ouvert, ponctués de boisements créant des effets de lisières. Les masses des grands boisements limitrophes soulignent toujours l’horizon et semblent dessiner les contours de cette grande clairière.
Dans le secteur du Bailleul – Crosmières – Villaines-sous-Malicorne, les grandes cultures alternent avec l’arboriculture fruitière qui semble annoncer le Val du Loir au sud et les vallées du Haut Anjou au sud-ouest. Elle apporte au paysage le rythme et le graphisme des lignes taillées d’arbres fruitiers, la saisonnalité très marquée de cette culture (fleurs au printemps, couleurs des feuilles à l’automne, graphisme des troncs noirs en hiver). Les vergers sont parfois recouverts de filets qui occultent les rythmes des lignes d’arbres taillés les remplaçants par des surfaces homogènes blanches au fort impact paysager. Du fait de leurs volumes et du relief peu mouvementé, les vergers contribuent parfois au cloisonnement du paysage.
Les exploitations labellisées « Poulet de Loué » sont aussi nombreuses et impactent le paysage de leurs grands volumes implantés dans des parcs de plein air facilement identifiable (arbustes à l’arrière du bâtiment, ligne de fruitiers…)
Cette sous-unité est par ailleurs marquée par deux « objets » qui semblent posés dans ce paysage agricole et forestier, et qui contrastent par leur volume, leur usage avec leur environnement paysager :
- l’usine de Malpaire dans la forêt du même nom qui a peu d’impact visuel depuis le grand paysage
- la zone d’activités de l’échangeur Sablé – La Flèche sur l’A11, dont les volumes constituent aujourd’hui un point d’appel marquant dans le paysage, notamment au niveau du centre hospitalier et s’inscrivent en appui de l’A11 qui traverse la sous-unité selon un axe nord-sud. Cet ensemble souligne un certain dynamisme économique et prend appui sur quelques formations végétales résiduelles, confortées par d’importantes plantations et aménagements paysagers
Les clairières humides de la vallée de l’Aune
Cette sous-unité est densément boisée et présente un paysage forestier dans lequel les vallons ouvrent de grandes clairières. Chacune des quatre strates typiques de l’unité est parfaitement représentée et lisible. La perception du relief induit la perception de la structure étagée du paysage avec les fonds de vallées aux prairies humides bocagères, les pentes douces ouvertes par des grandes cultures et les crêtes boisées. Les boisements des buttes semblent parfois rejoindre les fonds de vallons, renforçant les jeux de contraste et d’alternance.
Deux grands ensembles boisés marquent les limites est et ouest de la sous-unité :
- à l’ouest, la forêt de Courcelles dominée par les pins, implantée sur les hauteurs
- à l’est l’ensemble, constitué par le bois de Saint-Hubert et les boisements humides de la vallée de l’Aune, présente la particularité de s’inscrire (du fait de jeux de cuesta lors de la création de la boutonnière du Bélinois) en contrebas du plateau ouvert. Ainsi depuis les hauteurs au paysage de grande culture ouvert d’Yvré-le-Pôlin – Requeil, le regard semble glisser au-dessus de la forêt
On note par ailleurs quelques spécificités de cette sous-unité :
- La présence significative d’un patrimoine de châteaux et parcs qui viennent souvent en appui sur les lisières boisées et constituent des éléments de repère dans les clairières
- Des bourgs « forestiers », lovés au coeur de petites clairières, à l’image de Parigné-le-Pôlin. Le bourg historique, villagerue, est en appui sur le bois. Le développement résidentiel s’étire le long des axes en appui d’anciennes fermes, profitant sans doute du cadre paysager. Le paysage est fortement impacté par ce mitage de l’espace agricole, réduisant de façon notable les surfaces de grandes cultures qui investissent le reste de la clairière
- Quelques parcelles d’arboriculture fruitière et surtout la spécificité du châtaignier : Le châtaignier est un des arbres remarquables de la frange sud-est de l’unité paysagère des clairières entre Sarthe et Loir. Sous forme de haies, de taillis, en arbre isolé ou en verger, il doit sa présence d’une part à la nature des sols qui lui sont favorables et d’autre part à l’activité humaine qui a su tirer profit de ses nombreux atouts (bois de charpente, bardeaux, bois de chauffage, piquets pour les clôtures, récolte de la châtaigne…). Un site Natura 2000 vient protéger cet ensemble patrimonial.
La clairière ouverte du Bélinois
Dessinant une amande de quinze kilomètres sur dix, la région du Bélinois, argilo-calcaire, très fertile, contraste par son échelle et ses cultures de céréales avec les régions sableuses qui l’entourent. La ceinture boisée dessine l’horizon de cette vaste clairière ondulée. Celle-ci est confortée, notamment sur les franges est et ouest, par des buttes témoins et des reliefs de cuesta qui se traduisent par des ondulations de l’horizon. Elles constituent par ailleurs des promontoires qui ouvrent de grands panoramas surplombant le Bélinois.
Cette sous-unité est particulièrement impactée par :
- L’ampleur des bâtiments d’exploitations (polyculture-élevage et céréales)
- La proximité de l’agglomération mancelle : la forte pression urbaine induit un mitage du paysage et des terres agricoles morcelées, ainsi que le développement des infrastructures (cf. chapitre sur les dynamiques paysagères)
Au nord de la sous-unité, à proximité de l’agglomération mancelle, le maraîchage de plein champ développe quelques parcelles.
Une architecture rurale spécifique caractérise cette sous-unité et a été identifiée dans les livrets des Architectures rurales en Sarthe – unité 2 du Bélinois – CAUE de la Sarthe (1991). « L’ensemble s’articule en général autour d’une cour rectangulaire, ouverte vers le Sud ou le Sud-Ouest, et les différents édifices ont été élevés au fil de plusieurs campagnes de construction, jusqu’au XIXème siècle. Dans ce pays où l’on a cultivé tard le chanvre, un four à chanvre, petite construction carrée ou circulaire, peut s’ajouter aux éléments habituels. […] Couverture de tuile plate sur lattes de chêne. […] Le matériau utilisé par excellence pour l’édification de ces logis est le grès roussard (chaînage d’angle, encadrement des ouvertures) même si la brique apparue plus tard a eu les mêmes usages. »
Les vallons boisés du Dué et du Narais
Cette sous-unité se caractérise par un relief plus mouvementé, les vallons du Dué et du Narais et leurs nombreux affluents ayant entaillé le plateau en dessinant des vallées profondément encaissées. Les clairières ouvertes se succèdent et sont marquées par des lignes bocagères plus fortes dessinant de réelles mailles (on note de réelles continuités). L’habitat diffus s’implante préférentiellement sur la partie haute des pentes.
Si les bois habillent toujours les hauts de buttes, ils investissent aussi tous les fonds de vallons, notamment dans le vallon du Narais. Les phénomènes d’alternance entre paysages fermés des bois et fonds de vallons et paysages ouverts des clairières sont renforcés.
La sous-unité se caractérise aussi par la présence de bourgs de vallée. Certains présentent une structure historique linéaire de village-rue (exemple Volnay à la confluence de la Hune et de l’Arche, …). Les vallons accueillent par ailleurs de nombreux plans d’eau et moulins (notamment sur le Dué). Sous l’influence de l’Huisne, un patrimoine de châteaux et manoirs investit les vallons.
A l’ouest de la sous-unité, à proximité de l’agglomération mancelle, le maraîchage de plein champ se développe sur quelques parcelles. A l’est, ce sont les bâtiments d’élevage avicoles qui se développent. La limite nord de la sous-unité se caractérise par quelques fenêtres visuelles sur la vallée de l’Huisne.