Les dynamiques paysagères du marais breton vendéen

publié le 7 décembre 2015 (modifié le 2 janvier 2017)

Exemple d’évolution caractéristique de l’unité sur le secteur de Bouin

Dans le cadre de l’analyse des dynamiques paysagères, pour chaque unité paysagère, un secteur particulier est choisi de manière à caractériser, en tant qu’échantillon représentatif de l’unité, une large partie des dynamiques vécues à l’échelle de l’unité. Cette analyse s’appuie notamment sur la comparaison des données cartographiques et des photographies aériennes à différentes époques données. Ce zoom est représentatif mais non exhaustif des dynamiques vécues à l’échelle de l’unité. Les dynamiques de l’unité qui ne s’illustrent pas à travers cet exemple sont donc détaillées à la suite.

L’île de Bouin, support des premières installations
Au cœur du marais breton vendéen, sur l’axe reliant Nantes à Noirmoutier, l’implantation historique des premières constructions s’effectue sur ce qui est alors l’île de Bouin. Le caractère insulaire des lieux est révélé par la structuration dense du bâti autour d’une organisation urbaine géométrique avec en point d’orgue la présence des bâtis historiques de l’ancien château du Sénéchal de Poitou (derrière l’église), l’ancien présidial (devenu la mairie) et l’hôtel du Sénéchal de Bretagne (dans la Grand’Rue). Tels des remparts dessinant les contours de la ville ancienne, les berges de l’ancienne île délimitèrent le périmètre de l’agglomération. Autour, les marais prennent la forme d’un amas de bassins rectangulaires.

Carte d'état-major (1866) - (SCAN Historique à l'échelle du 1 : 40000) en grand format (nouvelle fenêtre)
Carte d’état-major (1866) - (SCAN Historique à l’échelle du 1 : 40000)



Les anciennes limites insulaires franchies par les extensions pavillonnaires
La comparaison des photographies aériennes de 1958 et 2010 montre que le développement urbain du bourg historique s’effectue sur l’intégralité de l’ancien territoire insulaire de Bouin. La construction d’une digue de trois kilomètres entre 1959 et 1962 permet la poldérisation du secteur et facilite désormais l’extension de l’urbanisation au-delà des limites fixées par les anciennes contraintes naturelles. Ces limites, déjà matérialisées par des chemins à l’époque napoléonienne se sont transformées progressivement en rues, bâties de part et d’autre.
Le développement urbain de Bouin au-delà des anciennes limites naturelles reste donc globalement contenu, même si la progression de l’urbanisation au-delà de l’ancien périmètre insulaire est effective. Ici, le cadrage environnemental prend le relais des contraintes fixées par l’ancien caractère insulaire du secteur pour maîtriser l’extension de l’urbanisation. Contrairement à d’autres territoires, les infrastructures routières ne sont pas le support d’une urbanisation diffuse et linéaire, bien que cette tendance soit visible aux abords de la D21 qui quitte le bourg vers le sud-est. Les extensions récentes sont marquées par un développement réalisé de manière quasi-exclusive sous une forme pavillonnaire.

Bouin – Orthophoto 1958 (BD ORTHO Historique 1958) en grand format (nouvelle fenêtre)
Bouin – Orthophoto 1958 (BD ORTHO Historique 1958)

Bouin – Orthophoto 2010 (BD ORTHO) en grand format (nouvelle fenêtre)
Bouin – Orthophoto 2010 (BD ORTHO)



Un rapport ville/campagne très sensible d’un point de vue paysager
Dans le cas de Bouin, le développement pavillonnaire s’effectue principalement vers l’ouest et le nord. Le paysage très horizontal ainsi que la faible présence de végétation imposante contribue à créer une exposition forte des éléments bâtis. Ainsi, la progression de l’urbanisation en extension de l’existant, même contenue, est extrêmement sensible d’un point de vue paysager. La présence d’une faune riche, ainsi que la proximité des sites d’élevage créent des scènes insolites où apparaissent sur le même tableau la ville en extension et la faune des marais bretons vendéens.

Extensions pavillonnaires au nord-ouest de Bouin (Bouin – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Extensions pavillonnaires au nord-ouest de Bouin (Bouin – 2015)

Extensions pavillonnaires et zones de pâtures au nord-ouest de Bouin (Bouin – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Extensions pavillonnaires et zones de pâtures au nord-ouest de Bouin (Bouin – 2015)



Un maillage routier et une structure parcellaire stable
La comparaison des cartographies et des photographies aériennes à des époques différentes montre que la structuration du paysage rural ne se modifie que légèrement. Le maintien en l’état de l’organisation viaire est à relever au vue des dynamiques vécues sur d’autres territoires dans ce domaine, et en considérant la position rétro-littorale du secteur de Bouin soumis aux pressions touristiques. Par ailleurs, la trame parcellaire de ce secteur est également remarquable de stabilité, comparée à des dynamiques de regroupement vécues plus largement à l’échelle régionale.

Carte IGN 2013 du secteur de Bouin (SCAN 25) en grand format (nouvelle fenêtre)
Carte IGN 2013 du secteur de Bouin (SCAN 25)



Dynamique de patrimonialisation
Le secteur de Bouin connaît une tendance vécue plus largement à l’échelle des marais bretons vendéens consistant en une mise en avant de ses atouts naturels et paysagers dans le cadre de la promotion de son territoire. Cette dynamique de patrimonialisation s’appuie sur des éléments diversifiés avec en premier lieu le cadre paysager du marais, la richesse faunistique et floristique du secteur, mais également la promotion d’un certain héritage artisanal lié à la saliculture, à la pêche et à l’élevage. Cette valorisation touristique est complétée par une mise en réseau développée du territoire sous forme de cheminements piétons et cyclables.

Les circuits pédestres et cyclables aménagés invitent à l'exploration des marais (Bouin – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Les circuits pédestres et cyclables aménagés invitent à l’exploration des marais (Bouin – 2015)

L'office de tourisme en entrée de ville, un modèle d'intégration paysagère (Bouin – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
L’office de tourisme en entrée de ville, un modèle d’intégration paysagère (Bouin – 2015)



La progression et la diversification de l’activité agricole
Avec la poldérisation du secteur, l’activité salicole dominante dans le passé a été progressivement supplantée par des activités agricoles nouvelles, notamment de céréaliculture à proximité de la digue. Le développement de l’activité ostréicole contribue également à modifier le paysage des marais de Bouin avec la multiplication de cabanes nécessaires à cette activité. En s’éloignant du littoral, la structuration du paysage en réseau dense d’étiers, alternant avec un petit parcellaire support de prairies et d’activité de poly-élevage est marqué par une certaine stabilité attestée par la comparaison des photographies aériennes.

Les pressions urbaines vecteur d’évolution paysagère

Le report des pressions littorales favorise des dynamiques constructives soutenues sur l'unité paysagère (Source : DREAL, SIGLOIRE indicateurs habitat 2007-2011) en grand format (nouvelle fenêtre)
Le report des pressions littorales favorise des dynamiques constructives soutenues sur l’unité paysagère (Source : DREAL, SIGLOIRE indicateurs habitat 2007-2011)



Comme l’atteste la carte-ci-dessus, les dynamiques constructives vécues sur le secteur sont particulièrement fortes, dans la lignée des dynamiques vécues par la frange littorale des Pays de Loire. La partie sud de l’unité et notamment les communes de Saint-Jean-de-Monts et Saint-Hilaire-de-Riez accueillent plus de 50 constructions par an sur la période 2007-2011. Elles constituent d’ailleurs le point de départ septentrional des dynamiques constructives intenses vécues sur le littoral vendéen. Les conséquences rétro-littorales de ces dynamiques impactent directement le paysage de l’unité paysagère du marais breton vendéen.

Un développement de l’urbanisation particulièrement marqué sur les franges exposées au nord et à l’est de l’unité paysagère

L'urbanisation des coteaux est très visible depuis les marais (Bourgneuf-en-Retz - 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
L’urbanisation des coteaux est très visible depuis les marais (Bourgneuf-en-Retz - 2015)



Au nord et à l’est de l’unité paysagère, le développement de l’urbanisation s’opère sur les coteaux peu élevés qui dessinent les limites du marais breton vendéen. Les poches urbaines résidentielles qui se greffent aux bourgs anciens (Bourgneuf-en-retz, Machecoul, Beauvoir…) bénéficient d’une forte exposition dessinant depuis les marais une ligne d’horizon en forme de continuum urbain. Le développement des zones d’activités industrielles et commerciales, l’édification d’équipements imposants par leur volume viennent accentuer un phénomène qui dissipe le contraste paysager entre terres hautes des coteaux et terres basses du marais.

Le développement d’un modèle pavillonnaire standardisé autour des bourgs historiques

Les extensions urbaines prennent la forme d'une diffusion du tissu pavillonnaire (Challans – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Les extensions urbaines prennent la forme d’une diffusion du tissu pavillonnaire (Challans – 2015)



Si le cadrage paysager et environnemental impose une approche maîtrisée des extensions, celles-ci prennent la forme de poches urbaines résidentielles à l’architecture typique du sud Loire (maisons de plain-pied, usage de la tuile, petit muret, ambiance minérale…), mais à la composition urbaine éloignée de l’habitat traditionnel des lieux qui se traduit davantage par de la mitoyenneté et des alignements sur rue. La banalisation du paysage urbain est d’autant marquante que l’identité des bourgs était spécifique.

Le développement linéaire et pavillonnaire le long des anciennes îles

Habitat diffus sur l'ancienne île allongée le long de la RD 59 (2013) en grand format (nouvelle fenêtre)
Habitat diffus sur l’ancienne île allongée le long de la RD 59 (2013)



Dans la sous-unité des marais challandais, un modèle d’urbanisation diffus se développe sur les anciennes îles allongées au faible relief comme en témoigne le secteur de la route du Perrier (abords de la RD 59). La prédominance du modèle pavillonnaire alterne ici avec les nombreux boisements qui occupent la partie centrale.

L’urbanisation des franges du Marais efface progressivement le basculement entre les milieux

Le marais breton est un territoire conquis sur la mer, c’est un espace construit en appui sur le continent et qui a constamment progressé vers l’ouest. C’est un espace intercalaire entre mer et continent qui témoigne d’une dynamique de construction du paysage. Cette dynamique se perçoit de façon particulièrement nette à travers les secteurs ou s’opèrent le basculement d’un milieu à l’autre :

  • frange Est du Marais qui marque la transition entre marais et plateau continental
  • frange Sud-Ouest du marais qui marque la transition entre marais et cordon dunaire
  • frange Nord-Ouest du marais qui marque la transition avec la baie de Bourgneuf

La dynamique de construction du territoire se perçoit également depuis les digues sur lesquelles sont installées les voies de circulation et depuis les îles naturelles situées en son cœur.
L’urbanisation des franges du Marais coupe des territoires adjacents et efface progressivement du paysage le basculement entre les milieux. L’identité du marais en tant que territoire additionnel situé entre mer et continent s’affaiblit progressivement. Il pourrait à terme apparaître comme un espace résiduel délaissé par l’urbanisation.
Le long de la flèche dunaire de La-Barre-de-Mont, l’urbanisation atteint un niveau de densité critique et la hauteur et la masse des bâtiments construits impactent lourdement le paysage en détruisant les rapports d’échelle du paysage et en masquant la transition marais dune boisée. Or la dune permet de situer le marais par rapport au littoral.
A l’inverse, en matière d’urbanisation, l’exemple de Bouin est intéressant. Il n’y a pratiquement pas de zones commerciales en entrée de bourg. De ce fait, le bourg reste en contact direct avec le marais. L’urbanisation s’est faite selon le modèle concentrique traditionnel et non pas sur un mode linéaire le long des routes. C’est un facteur à mettre en avant car, malgré des extensions pavillonnaires qui mériteraient d’être plus cohérentes par rapport au tissu urbain du bourg, l’insertion dans le paysage reste bien meilleure que partout ailleurs en Vendée. Bouin conserve la structure et la silhouette d’un bourg insulaire au milieu des marais sans rupture notable d’échelles et de volumes. Ce n’est pas le cas du pourtour du marais.

Dynamiques paysagères liées aux infrastructures et aux zones d’activités

L’impact paysager des zones d’activités à proximité des bourgs et en frange rétro-littorale

Le caractère horizontal du marais amplifie l'exposition visuelle des bâtiments d'activités notamment au niveau des façades tournées vers l'intérieur des communes littorales (Saint-Jean-de-Monts – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Le caractère horizontal du marais amplifie l’exposition visuelle des bâtiments d’activités notamment au niveau des façades tournées vers l’intérieur des communes littorales (Saint-Jean-de-Monts – 2015)



Les contraintes naturelles des marais ont contribué à la maîtrise du développement des zones d’activités industrielles, artisanales et commerciales, limitant ainsi l’empreinte visuelle des bâtiments aux volumes imposants associés à ces activités. Cependant, les principaux bourgs sur les franges orientales des marais (Beauvoir, Challans) ainsi que les entrées de bourg des franges rétro-littorales (Saint-Jean-de-Monts, Saint-Hilaire-de-Riez) sont de plus en plus concernés par le développement des zones d’activités. Les exemples relevés notamment sur le secteur rétro-littoral montrent que dans le contexte paysager des marais, l’impact paysager de ce type de bâtiments est particulièrement important.

La difficile intégration des infrastructures de transports

Les dispositifs anti-bruits ferment le paysage aux abords des routes (Challans – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Les dispositifs anti-bruits ferment le paysage aux abords des routes (Challans – 2015)



Les pressions exercées par l’attractivité touristique du littoral, ainsi que par le développement de l’urbanisation lié à l’habitat et au développement économique encouragent le développement des infrastructures de transport. Outre que le développement des axes de communication facilite généralement le développement linéaire de l’urbanisation et l’implantation d’activités à leurs abords, les voies et réseaux ont également un impact direct sur le paysage, lorsqu’ils sont accompagnés de mobilier de type routier (dispositifs anti-bruit, lampadaires, glissières…). Les routes traditionnellement implantées sur les digues, sont des éléments constitutifs et des marqueurs très forts du marais. Ce linéaire est encore plus renforcé visuellement quand les digues sont plantées de tamaris. Globalement les axes routiers ne rompent que très partiellement l’organisation strictement horizontale du paysage et sont le plus souvent en cohérence avec l’altimétrie des digues.

Exemple de l'impact paysager des affichages publicitaires (Beauvoir-sur-Mer – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Exemple de l’impact paysager des affichages publicitaires (Beauvoir-sur-Mer – 2015)



Accompagnant les infrastructures routières, les affichages publicitaires ont également un impact paysager prégnant au sein des paysages de marais. Les couleurs vives utilisées dans ce cadre contrastent avec la palette picturale du paysage.

L’implantation d’éoliennes impacte fortement le paysage

Le parc éolien de Bouin dans le paysage des marais (Bouin – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Le parc éolien de Bouin dans le paysage des marais (Bouin – 2015)



En 2003, huit éoliennes ont été installées sur les polders de Bouin. L’inscription de ces structures imposantes dans un paysage exemplaire d’horizontalité modifie profondément la perception du paysage et l’équilibre des échelles.

Activité traditionnelle d'élevage et parc éolien (Bouin – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Activité traditionnelle d’élevage et parc éolien (Bouin – 2015)

Le développement du maraîchage sur les franges du marais

Parcelles dédiées à l'activité maraîchère sur l'ancienne île allongée (Saint-Hilaire-de-Riez – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Parcelles dédiées à l’activité maraîchère sur l’ancienne île allongée (Saint-Hilaire-de-Riez – 2015)



Dans les marais bretons vendéens, le développement du maraîchage participe à la modification des paysages agricoles. Ce phénomène est visible tout particulièrement sur les franges du marais, autour des îles au sud, le long du cordon littoral et en pied de coteau bocager à l’est.
S’ils ne constituent pas un élément marquant du paysage breton vendéen, de grands champs cultivés liés à la céréaliculture s’étirent dans le secteur de Bouin, dans la partir nord-ouest des marais bretons vendéens.
Dans le cadre des paysages plats et ouverts des marais bretons vendéens, l’empreinte paysagère des bâtiments agricoles reste encore limitée. Les rares bâtiments aux volumes conséquents sont régulièrement abrités visuellement par des arbres de haute tige (cyprès) qui rendent leur présence plus discrète.

Des dynamiques de patrimonialisation et de découverte des paysages

Le secteur des marais bretons bénéficie d’un patrimoine naturel et paysager riche et diversifiée proposant une offre en matière touristique différente de celle des stations balnéaires voisines. L’exploration de la faune et de la flore, la mise en avant des activités traditionnelles (saliculture, élevage), la découverte des paysages de marais, sont autant d’atouts touristiques mis en avant par les acteurs du territoire pour développer l’attractivité touristique. Dans le cadre du développement d’un tourisme vert et paysager, les collectivités œuvrent au maillage du territoire via des circuits pédestres et cyclables nombreux.

Passage du Gois menant à l'île de Noirmoutier : vue depuis le continent (Beauvoir-sur-Mer – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Passage du Gois menant à l’île de Noirmoutier : vue depuis le continent (Beauvoir-sur-Mer – 2015)



A côté de ce tourisme lié à la nature et au paysage, des éléments ressortent du paysage pour devenir des objets de curiosité touristique plus prégnants : les éoliennes de Bouin, l’entrée du Gois menant à l’île de Noirmoutier depuis le XIème siècle.

Un modèle de requalification de l'habitat traditionnel à des fins touristiques (Musée de Milcandeau à Soullans – 2015) en grand format (nouvelle fenêtre)
Un modèle de requalification de l’habitat traditionnel à des fins touristiques (Musée de Milcandeau à Soullans – 2015)



L’offre en matière de tourisme durable est complétée par le développement des musées et écomusées répartis sur le territoire des marais : l’Écomusée du Daviaud, le Musée Charles Milcendeau…