Les dynamiques contrastées des paysages bocagers

publié le 18 avril 2016

Des dynamiques moins fortes mais qui continuent toujours à faire évoluer les paysages bocagers

Ce sont véritablement ces dernières décennies les évolutions des systèmes économiques agricoles (modes de culture et d’élevage) qui ont induit les plus grosses transformations des paysages ruraux. Sur ces deux dernières décennies, les prairies et le bocage qui les entoure ont toutes subi des reculs significatifs (entre 15 et 40 % suivant les types, source chambres d’agriculture) au profit souvent de grandes cultures. Par ailleurs, l’observation de terrain montre bien en 2014 la présence plus faible voir résiduelle du réseau bocager sur les plateaux aujourd’hui cultivés. Ainsi, les raisonnements économiques à court terme (ne tenant pas compte du rôle des haies dans la qualité agronomique des terres) et souvent aussi l’incohérence des politiques de collectivités (financements à la fois pour l’arrachage et les reboisements…) continuent à éroder le patrimoine de haies du réseau bocager. Si les transformations les plus radicales du paysage ont eu lieu avec les vagues de remembrements il y a une vingtaine d’année, les arrachages de haies sont aujourd’hui moins nombreux et donc moins lisibles dans le paysage, en lien avec le développement des plans bocagers à échelle de l’exploitation.

On constate à l’échelle de la région que les mailles bocagères qui ont le mieux résisté à ces évolutions se situent sur les secteurs collinaires du nord et du sud de la région et sur la zone rétro-littorale.

Des paysages bocagers dont la dynamique d’ouverture se poursuit

Un bocage qui prend parfois sur les plateaux des allures d'openfield ponctué d'arbres isolés (Saint Macaire en Mauges).
Un bocage qui prend parfois sur les plateaux des allures d’openfield ponctué d’arbres isolés (Saint Macaire en Mauges).


Si la disparition des haies et la diminution du bocage étaient largement mentionnées dans les atlas précédents en relation aux évolutions du monde agricole (baisse des exploitants, hausse des surfaces d’exploitation), les dynamiques d’arrachage de haies liées aux périodes de remembrement des années 1950 à1990 se sont considérablement ralenties ces deux dernières décennies. Entre 1992 et 2000, les surfaces de haies et arbres épars ont encore diminué de 13 % (Teruti 2000). En parallèle, les diagnostics des plans de gestion du bocage engagés par la Mayenne (suivi de la Chambre d’agriculture depuis une décennie) et la Vendée (Programme Contrat Paysage Rural 2005/2015) ont révélé un très net vieillissement des arbres dans les haies bocagères. Il en résulte un paysage singulier où l’ouverture de la maille des haies dégage de longues perspectives dans le paysage, voir dénude les plateaux en leur donnant un air d’openfield. Cette ouverture du paysage révèle les franges urbaines et les extensions pavillonnaires récentes ou les zones d’activités, les hameaux diffus et les nouveaux bâtiments d’exploitations.

Il reste souvent dans les haies des arbres de haut jet dont la silhouette singulière (moignon de têtard sur le tronc, ou charpentières basses émondées) trahit un changement de gestion depuis plusieurs décennies. La haie bocagère prend aujourd’hui avec ces grands arbres un air « pittoresque ». Si la trame subsiste elle est souvent sénescente et risque soit de ne pas se maintenir dans son état soit de se régénérer avec d’autres espèces (ce qui peut induire à terme la diminution de la présence de ces grands arbres dans les paysages de bocage).
Des paysages en restructuration qui composent un nouveau bocage
Afin d’enrayer cette diminution du bocage, des opérations de plantations sont financées par les Conseils généraux (de 300 à 500 km par an au total, source Conseils généraux) et des territoires ont mis en place des actions spécifiques pour la reconstitution de la trame bocagère. Ce « jeune bocage » est particulièrement lisible dans le paysage par plusieurs indices qui le trahissent : palette végétale parfois « exotique » (amélanchier, filaire, forsithia, photinia…), maille de plantation répétitive (qui tranche par rapport au caractère apparemment aléatoire des haies traditionnelles), implantation le long des voies. On constate cependant une évolution dans ces pratiques liée notamment aux sensibilisations mises en place dans le cadre des politiques de financement.

Motif répétitif des haies de replantation avec quelques essences exotiques (ici Viburnum Tinus) qui ne correspond pas à aux haies bocagères traditionnelles
Motif répétitif des haies de replantation avec quelques essences exotiques (ici Viburnum Tinus) qui ne correspond pas à aux haies bocagères traditionnelles