Les caractères du val d’Anjou

publié le 7 décembre 2015 (modifié le 28 décembre 2016)

Une unité visuelle héritée du contexte géologique

Une ossature géographique lisible
La vallée de l’Anjou présente une ossature géographique lisible et constante marquée au nord comme au sud par les coteaux boisés en fond visuel. Ces limites constituent des éléments de repères majeurs dans l’appréhension du paysage de cette unité : référence visuelle permanente.

Carte géologique de l'unité paysagère du val d'Anjou en grand format (nouvelle fenêtre)
Carte géologique de l’unité paysagère du val d’Anjou



Le bassin de l’Authion est établi en limite des terrains primaires du Massif armoricain qui, affleurant à l’ouest (région de Trélazé) s’enfoncent progressivement sous la surface du sol vers l’Est. Il est constitué pour l’essentiel par des formations secondaires et tertiaires de la bordure occidentale du bassin de Paris. Les formations quaternaires dominent le val d’Authion ainsi que des vallées du Lathan et du Couasnon. Formations très aquifères, elles constituent ainsi une ressource en eau privilégiée pour les prélèvements en eau et une ressource en grave et sables qui sont exploités pour les travaux publics.

Site d'extraction en cours d'exploitation, jouxtant un site réhabilité en espace de loisirs au coeur du bois des Monteaux (Vivy) en grand format (nouvelle fenêtre)
Site d’extraction en cours d’exploitation, jouxtant un site réhabilité en espace de loisirs au coeur du bois des Monteaux (Vivy)



« La Loire donne l’illusion d’un paysage immuable. L’histoire géologique souligne son extrême complexité géologique. La mosaïque de roches et de paysages qui caractérise son bassin est le résultat de processus géologiques longs où se sont conjuguées des forces profondes (convection dans le manteau terrestre à l’origine entre autres du volcanisme), des forces tangentielles (forces tectoniques qui construisent les montagnes) et des forces de surface (érosion, transport et sédimentation).

La sortie de la Loire du bassin de Paris s’effectue directement dans les formations crétacées du Turonien (depuis Tours) avec son cortège de châteaux, d’églises et de maisons construites avec et dans la craie-tuffeau. Aux Ponts-de-Cé, la Loire quitte le bassin de Paris et pénètre le Massif armoricain.
La Loire, comme tous les fleuves, est le collecteur de l’eau de pluie qui tombe sur son bassin versant. Cet écoulement permet l’érosion, le transport et le dépôt de sédiments de l’amont vers l’aval en fonction de la pente, de la granulométrie des éléments transportés, du débit d’eau et de la charge solide.
 » (Géologie du bassin de la Loire - Pierre Nehlig).

Coupe de principe permettant de comprendre l'organisation des couches géologiques et le jeu de l'érosion (source : Atlas des paysages de Maine-et-Loire 2002) en grand format (nouvelle fenêtre)
Coupe de principe permettant de comprendre l’organisation des couches géologiques et le jeu de l’érosion (source : Atlas des paysages de Maine-et-Loire 2002)



La vallée de la Loire est, naturellement, la partie la plus basse du département de Maine-et-Loire ; aucun point n’y dépasse 32 m, et la pente est si faible que l’Authion a peine à s’écouler dans le substrat alluvionnaire, présentant ainsi un cours sinueux. Elle est encadrée de coteaux qui sur la rive gauche sont généralement très rapprochés du lit du fleuve et abrupts, et sur la rive droite relativement éloignés du fleuve. Elle se caractérise aussi par des annexes hydrauliques (bras, boires…). D’anciennes îles aujourd’hui reliées aux rives identifient le fleuve.

Carte du relief et du réseau hydrographique de l'unité paysagère du val d'Anjou en grand format (nouvelle fenêtre)
Carte du relief et du réseau hydrographique de l’unité paysagère du val d’Anjou



La Loire compte deux principaux affluents sur cette unité :

  • Le Thouet qui a l’essentiel de son cours et de ses sources dans les Deux-Sèvres. Il était navigable en Maine-et-Loire au début du siècle (bateaux de 30 à 50 tonnes) et conflue au niveau de Saumur.
Vallée du Thouet juste avant la confluence avec la Loire, véritable axe vert structurant dans la ville de Saumur (Saumur) en grand format (nouvelle fenêtre)
Vallée du Thouet juste avant la confluence avec la Loire, véritable axe vert structurant dans la ville de Saumur (Saumur)

  • L’Authion grossi par le Lathan et le Couasnon, fort long mais peu abondant, il est dans une grande partie de son cours constitué plutôt par un large fossé que par une véritable rivière. Né en Indre-et-Loire, il suit parallèlement la Loire (de 2,5 à 6 km de distance) pendant tout son parcours dans le département. Il passe à Vivy, près de Beaufort-en-Vallée, Mazé et Trélazé et rejoint la Loire aux Ponts-de-Cé. Il reçoit le Lathan qui baigne Longué et Le Couasnon qui traverse Baugé. Il est canalisé sur une bonne partie de son cours. Plus basse que la Loire dont il est séparé par les levées, sa vallée a longtemps été sujette aux crues. Aujourd’hui, des installations hydrauliques permettent de contrôler son débit et l’évacuation des excès d’eau est réalisée par pompage vers La Loire. Elles sont le résultat du chantier Pisani, projet national d’aménagement hydraulique lancé en 1967 qui va complètement bouleverser le paysage de la vallée.
Cours paisible de l'Authion au coeur du val (Mazé) en grand format (nouvelle fenêtre)
Cours paisible de l’Authion au coeur du val (Mazé)



Une organisation en bandes parallèles
Cette unité paysagère longue et relativement étroite présente une organisation en bandes parallèles aux coteaux et à la Loire, ce qui lui confère une structure paysagère forte. On trouve successivement du nord au sud :

  • les contreforts boisés du Baugeois entaillés par les vallées du Couasnon et du Lathan notamment,
Coteau boisé nord, interface entre le val d'Anjou et les plateaux du Baugeois (Brain-sur-Allonnes) en grand format (nouvelle fenêtre)
Coteau boisé nord, interface entre le val d’Anjou et les plateaux du Baugeois (Brain-sur-Allonnes)

  • la RD 347 reliant les bourgs du val d’Anjou au nord de l’Authion, et soulignée par une urbanisation quasiment continue, ancienne qui se diffuse sous la pression angevine,
La RD 347, axe structurant du développement urbain et économique au nord de l'unité (Blou) en grand format (nouvelle fenêtre)
La RD 347, axe structurant du développement urbain et économique au nord de l’unité (Blou)

  • le val d’Authion composé de prairies bocagères dont la trame se lit parfois difficilement tant le paysage s’est ouvert, développement des grandes cultures horticoles, céréalières… qui sont investies ponctuellement par quelques parcelles de peupliers et ponctuées par un habitat dispersé dense,
De belles lignes bocagères soulignent les voies secondaires et dévoilant au hasard d'une fenêtre végétale un paysage ouvert de grandes cultures dans laquelle une ligne de frênes têtards a été préservée (Saint-Martin-de-la-Place) en grand format (nouvelle fenêtre)
De belles lignes bocagères soulignent les voies secondaires et dévoilant au hasard d’une fenêtre végétale un paysage ouvert de grandes cultures dans laquelle une ligne de frênes têtards a été préservée (Saint-Martin-de-la-Place)

  • la levée de la Loire : infrastructure imposante et historique soulignée par une urbanisation continue et ancienne entre les bourgs,
Urbanisation appuyée sur la levée ligérienne (Saint-Mathurin-sur-Loire) en grand format (nouvelle fenêtre)
Urbanisation appuyée sur la levée ligérienne (Saint-Mathurin-sur-Loire)

  • la Loire, mystérieuse, insaisissable, effrayante parfois, romantique, calme… La Loire sinuant entre la levée et le coteau individualisant des îlots verts dans lesquels les activités varient, enrichissant ainsi le paysage : champs cultivés, prairies de frênes têtards, jardins privés, espace à vocation de loisirs…,
Prairie bocagère entre la levée et le fleuve, au hasard d'une sinuosité du fleuve dont la palette chromatique reflète la lumière et la saison (Saint-Mathurin-sur-Loire) en grand format (nouvelle fenêtre)
Prairie bocagère entre la levée et le fleuve, au hasard d’une sinuosité du fleuve dont la palette chromatique reflète la lumière et la saison (Saint-Mathurin-sur-Loire)

  • une frange urbaine en pied de coteau séparée de la Loire par une levée artificielle et parfois une ripisylve dense. Les villages de caractère sont bien individualisés et séparés les uns des autres par une urbanisation linéaire, associée à un habitat troglodyte,
Couloir fermé par la végétation (coteau et ripisylve) sur la route entre Gennes et Le Thoureil, occultant toute perception de la Loire cachée juste derrière le rideau végétal (Gennes) en grand format (nouvelle fenêtre)
Couloir fermé par la végétation (coteau et ripisylve) sur la route entre Gennes et Le Thoureil, occultant toute perception de la Loire cachée juste derrière le rideau végétal (Gennes)

Dégagement visuel à l'arrivée sur le Thoureil, le patrimoine bâti dialogue avec le fleuve… (Le Thoureil) en grand format (nouvelle fenêtre)
Dégagement visuel à l’arrivée sur le Thoureil, le patrimoine bâti dialogue avec le fleuve… (Le Thoureil)

  • le coteau sud aux visages multiples, souvent abrupt et renforcé par une couverture forestière, parfois urbanisé notamment à l’occasion des petits vallons (perpendiculaires à l’axe ligérien), offrant plus d’ampleur et permettant une urbanisation étagée, parfois encore agréablement vallonné et cultivé.
Coteau ondulé et boisé, mouvements collinaires en léger recul du fleuve (Le Thoureil) en grand format (nouvelle fenêtre)
Coteau ondulé et boisé, mouvements collinaires en léger recul du fleuve (Le Thoureil)



Un exemple majeur de paysage anthropique
Issue de la formation géologique d’un large lit majeur, fortement inondable aux temps historiques (Loire et Authion), le val vient structurer avec l’habitat ancien en organisation linéaire au long de coteaux (nord et sud) ou ponctuelle sur tertres insubmersibles. Le val est scindé par une levée ces aménagements qui permettent une mise en culture prospère dès le Moyen Âge des riches sols alluviaux et prairies humides du val d’Anjou et sont à l’origine d’une précoce spécialisation maraîchère et horticole… et d’une troisième ligne de peuplement en rive droite de la Loire.

Une unité végétale sur l’ensemble du val
La série végétale de l’Aulne caractérise les rives de La Loire, de ses affluents et, plus généralement, sur les sols très humides. Elle lie dans un même camaïeu de verts et gris les ripisylves et les lignes bocagères animant le polder fluvial. L’Aulne glutineux (Alnus glutinosa) est accompagné du saule roux (Salix atrocinerea) dans les taillis tourbeux armoricains en association avec des bouleaux (Betula pubescens), des peupliers noirs (Populus nigra) trembles (Populus tremula) et des frênes (Fraxinus oxyphylla) essentiellement dans le Val de Loire et du frêne commun (Fraxinus excelsior) dans les autres vallées. Dans le cours du fleuve, les îles sont couvertes d’une véritable forêt de saules et d’aulnes qui ont contribué à la fixation des bancs de sable et à leur transformation en îles. Les saulaies très fréquentes sont en fait souvent constituées par le groupement végétal complexe de saules pourpres (Salix purpurea), de saules blancs (Salix alba), de saules à trois étamines (Salix trianda)…

Une palette végétale homogène sur l'ensemble du val d'Anjou associant principalement frênes, saules et peupliers noirs dans le val et sur les rives de Loire (Mazé) en grand format (nouvelle fenêtre)
Une palette végétale homogène sur l’ensemble du val d’Anjou associant principalement frênes, saules et peupliers noirs dans le val et sur les rives de Loire (Mazé)



Sur les berges et dans les îles, on trouve les groupements à ormes et frênes (ormaie - frênaie), reste des grandes forêts alluviales de La Loire dont l’originalité tient aux variations du système hydrologique du fleuve. Les ormes sont aujourd’hui peu nombreux car victimes de la graphiose. Le feuillage argenté des saules blancs abondants dans La Vallée de la Loire donne à celle-ci une image particulière. De même la taille traditionnelle et spécifique des frênes en têtards, implantés soit en isolé soit en ligne constitue un élément d’identification fort des vallées.

Motif paysager récurrent des frênes têtards sur les berges et dans les îles (Saint-Remy-La-Varenne) en grand format (nouvelle fenêtre)
Motif paysager récurrent des frênes têtards sur les berges et dans les îles (Saint-Remy-La-Varenne)



La Loire est un des plus importants couloirs de migration pour la faune de France. L’évolution du tapis végétal est liée aux crues, aux courants, aux mouvements de sables, aux migrations d’animaux mais surtout à l’évolution des pratiques culturales (peupleraies, régression de la taille en têtard …) et au développement des déplacements d’hommes (érables negundo et sycomore, amélanchier, cèdre, séquoia, rhododendrons, palmiers…). L’art des jardins s’est développé dans le val de Loire à la suite des voyages et des grandes découvertes. La douceur du climat a permis l’acclimatation de plantes importées des nouvelles contrées. L’axe de déplacement qui était la Loire à cette époque a permis la diffusion de cette palette végétale exotique.

Une unité architecturale autour du tuffeau et de l’ardoise

Les formes urbaines caractéristiques de la vallée d’Anjou

Organisation rurale au cœur de la vallée
Si, dans la vallée, les premières implantations privilégièrent les montils naturels, d’autres furent élevées sur tertres artificiels, avec des maisons sur socles parfois construits en pierres dures. Ces soutènements anciens peuvent ne plus être visibles du fait de rehaussements successifs des tertres, fragilisés par les crues. Les habitations principales sont généralement orientées dans le sens du courant pour offrir une moindre résistance à la force des eaux de Loire en crue. En revanche, les dépendances, quand elles existent sont généralement perpendiculaires à la maison d’habitation. Parfois quelques regroupements de maisons constituent des petits hameaux aux volumes simples, généralement abrités derrière des plantations et implantés sur des axes perpendiculaires à la Loire.

Un habitat rural dispersé, ponctuation et animation par la multitude de relais visuels rendus visibles avec l'ouverture du val (Mazé) en grand format (nouvelle fenêtre)
Un habitat rural dispersé, ponctuation et animation par la multitude de relais visuels rendus visibles avec l’ouverture du val (Mazé)

Diversification et développement des annexes agricoles suite à la maîtrise des inondations dans le val (Longué-Jumelles) en grand format (nouvelle fenêtre)
Diversification et développement des annexes agricoles suite à la maîtrise des inondations dans le val (Longué-Jumelles)



Les bourgs sur la levée
Les bourgs se resserrent autour des clochers élancés. A l’origine villages-rues, les bourgs étaient constitués de maisons s’appuyant sur la levée de part et d’autre de l’église en position médiane sur la levée. La confiance en la levée s’accroissant, les bourgs ont pris un peu d’épaisseur côté vallée. D’un point de vue architectural, on retrouve les mêmes caractéristiques et la même diversité que dans la vallée, avec une majorité de maison datant du XIX°. Les formes architecturales se sont adaptées pour s’intégrer dans un alignement parfois relatif le long d’une rue, dans les angles des carrefours… Des porches ont été aménagés pour permettre l’accès à la parcelle située en arrière de la maison…
Aujourd’hui, de nombreux bourgs ont été « déviés », une nouvelle levée ayant été construite entre le bourg et la Loire.
Cette nouvelle étape de l’urbanisation modifie totalement la perception des bourgs : avant perception de la rue principale soulignée par les alignements de façades ornementées, aujourd’hui perception des façades arrières, des maisons et des petits jardins.

Extrait aérien illustrant l'organisation urbaine des bourgs sur la levée – exemple de Saint-Mathurin-sur- Loire en grand format (nouvelle fenêtre)
Extrait aérien illustrant l’organisation urbaine des bourgs sur la levée – exemple de Saint-Mathurin-sur- Loire



Les bourgs du Val d’Authion
Les bourgs du Val d’Authion comme Corné, Mazé, Beaufort-en-Vallée, Longué-Jumelles présentent :

  • une implantation en contrebas des contreforts du Baugeois articulée autour de la RD 347,
  • une structure urbaine de petites villes avec un impressionnant patrimoine bâti (volumes des maisons, ornementation des façades, travail des corniches et encorbellements…) et végétal (parcs avec des essences exotiques rappelant la proximité de la Loire), une organisation soulignée par l’alignement des façades, des extensions souvent imposantes en périphérie.
Extrait aérien illustrant l'organisation urbaine des bourgs du val d'Authion – exemple de Mazé en grand format (nouvelle fenêtre)
Extrait aérien illustrant l’organisation urbaine des bourgs du val d’Authion – exemple de Mazé



Les bourgs, rive gauche
Souvent coincés entre le coteau abrupt et la Loire, ces bourgs sont généralement intégrés au cœur d’une végétation dense et découverts brutalement depuis la rive gauche. Ils s’appuient sur un alignement des façades ligériennes, richement ornementées et s’organisent autour de l’imbrication des volumes, des toitures, et de la roche par le truchement d’un habitat troglodyte. En revanche depuis la levée ligérienne, ils sont aussi souvent mis en scène dévoilant le contraste de leurs façades blanches baignées par le fleuve se détachant du coteau.

Extrait aérien illustrant l'organisation urbaine des bourgs rive gauche – exemple du Thoureil en grand format (nouvelle fenêtre)
Extrait aérien illustrant l’organisation urbaine des bourgs rive gauche – exemple du Thoureil



Si ces bourgs et villages constituent de véritables caractères du paysage, l’impact de leur développement est précisé dans le chapitre des dynamiques paysagères.

Un style architectural
La Vallée de l’Anjou présente une unité architecturale tant dans la palette chromatique ou texturale que dans le style. Une palette chromatique et texturale homogène : alternance et contraste entre ombre et lumière, entre bleu sombre et blanc crème…. entre ardoise (sombre mais parfois brillante) et tuffeau (lumineux et clair). L’unité se caractérise par une forte densité de l’habitat, dispersé comme autant de relais visuels et accompagné d’éléments végétaux.

L’architecture médiévale directement liée à l’édification de la Grande Levée : les Blairies.
Les moines des abbayes et seigneurs installés sur la rive gauche de la Loire voulaient assurer la meilleure mise en valeur de leurs possessions dans la vallée, en incitant les paysans qui travaillaient pour eux à s’installer dans la vallée. Ils firent édifier de grandes et larges granges : les blairies, qui avaient pour fonction de recueillir les redevances en grains et dîmes dues par les paysans. Deux granges manoriales subsistent : l’une au manoir de Chamfraux sur la commune de Varennes-sur-Loire, l’autre au manoir des Granges Demion à St-Clément-des-Levées. Deux granges dîmières sont également conservées : celle du prieuré Saint-Aubin-de-Trèves (vaste bâtiment de 18 m de long sur 14 m de large, couvert d’une charpente à pannes refaite au XVIII° siècle), celle du prieuré de Cunault mentionnée dès 1222 (22 m de long sur 16 m de large). La toponymie des lieux-dits reste un excellent témoin de cette époque d’implantation humaine : nombreux sites appelés les ou la grange(s). On en dénombre par exemple 15 sur les communes du Saumurois.

Volume et silhouette caractéristique des granges dîmières, patrimoine préservé plus ou moins bien restauré (Saint- Clément-des Levées) en grand format (nouvelle fenêtre)
Volume et silhouette caractéristique des granges dîmières, patrimoine préservé plus ou moins bien restauré (Saint- Clément-des Levées)



La maison paysanne
De plain-pied, la maison paysanne est généralement de forme carrée, composée d’une unique pièce de vie et de combles imposantes où étaient stockés grains et foins. Sa façade se caractérise par l’élément porte-fenêtre. La cheminée prolonge le pignon. Sans ornement, elle constitue un habitat sobre et utilitaire. Pour satisfaire aux exigences agricoles, les maisons s’agrandissent grâce à un appentis en pignon ou à une extension en partie arrière avec une brisure de la toiture.

Illustration des composantes architecturales de la maison paysanne en grand format (nouvelle fenêtre)
Illustration des composantes architecturales de la maison paysanne



La maison de la vallée, prospérité agricole
Avec la culture du chanvre et des semences, la vallée connut au XIXème siècle une période de très grande prospérité économique. De cette période, date le développement d’un habitat caractéristique : « la maison de la vallée » que l’on retrouve aussi bien dans les campagnes que dans les bourgs et qui s’adapte à toutes les classes sociales. Issue de la maison paysanne, elle remplace petit à petit cette dernière qui devient alors dépendance. La maçonnerie est en tuffeau blanc appareillé, le toit en ardoise de Trélazé. Les cultures grainières ne requièrent qu’un faible volume de stockage, ce qui permet d’inclure, derrière la même façade, habitation et bâtiment d’exploitation. Dans les années 1850 - 1900, la façade principale est souvent richement travaillée (lucarnes, chaîne d’angle, encadrement…), les autres façades restant plus sobres. L’habitation devient le symbole de la richesse économique, surtout en amont d’Angers. La symétrie des ouvertures est scrupuleusement respectée, de fausses fenêtres flanquent souvent l’entrée de la grange pour ne pas briser l’harmonie de la façade.

Illustration des composantes architecturales de la maison de la vallée en grand format (nouvelle fenêtre)
Illustration des composantes architecturales de la maison de la vallée



La maison de maître
Les demeures des riches propriétaires, isolées au milieu de parcs, apparaissent elles aussi au XIX° siècle. Construites sur le modèle de la maison de la vallée, elles diffèrent par la dimension, la complexité de l’ornementation et la symétrie parfaite qui ordonne et rythme sa façade. Elles sont généralement de forme rectangulaire, avec un rez de chaussée légèrement surélevé, un étage, une toiture à quatre pentes, deux souches de cheminées en pignon. L’axe central de symétrie est souligné par la porte, une fenêtre et une lucarne.

Illustration des composantes architecturales de la maison de maître en grand format (nouvelle fenêtre)
Illustration des composantes architecturales de la maison de maître



Les constructions du XXème siècle
La crise économique qu’a connue la vallée entre les deux guerres et la disparition progressive des carrières de tuffeau existant au XIXème siècle, a entraîné un appauvrissement des matériaux utilisés pour l’habitat. Les nouveaux matériaux (parpaings, enduits industriels, faux tuffeau, …) ont affranchi la palette de l’habitat de la vallée traditionnelle. Depuis 1980, une sensibilisation des propriétaires et des communes (Opération Programmée de l’Amélioration de l’Habitat en particulier) a permis de nombreuses restaurations de qualité. Le développement des activités de production et de stockage a entraîné l’édification de bâtiments importants réalisés avec des matériaux contemporains. Ces bâtiments répondent à des exigences essentiellement économiques et ont des volumes et des orientations sans rapport avec l’implantation de l’habitat initial.

Urbanisation récente de la Ménitré en grand format (nouvelle fenêtre)
Urbanisation récente de la Ménitré

Une unité fonctionnelle : corridor historique de liaisons structurantes

La Loire
Aujourd’hui, un axe patrimonial, culturel, artistique et touristique
La Loire est pleine de contrastes, d’ambiances variées évoluant au fil des saisons, du temps… C’est en partie pour cela qu’elle a inspiré bon nombre d’artistes français ou étrangers. De nombreux peintres ou écrivains ont capté la lumière particulière du fleuve ou ont été inspirés par la douceur et le romantisme de la vallée. La Loire présente une palette chromatique et texturale très variée et changeante :

  • bleu-gris métallique quand elle reflète le ciel avec une texture fluide,
  • ocres jaunes quand elle est asséchée et que ses bancs de sables sont dégagés avec une texture granuleuse.
Prairie bocagère ligérienne reconvertie en espace récréatif (Saint-Martin-de-la-Place) en grand format (nouvelle fenêtre)
Prairie bocagère ligérienne reconvertie en espace récréatif (Saint-Martin-de-la-Place)



Autrefois, un axe de communication, de commerces et d’échanges
Sur les quais de la Loire, restaurés aujourd’hui pour d’autres usages, débarquaient passagers et marchandises. Anciens quais et cales supportant des anneaux rouillés, des bornes, noms de lieux-dits (nombreux ports notamment) de cafés ou de demeures bourgeoises, présence de girouettes aux silhouettes évocatrices… sont les témoins du fourmillement passé de cette voie de communication ancestrale, lieu de tous les échanges, sur une Loire autrefois plus active que bucolique et romantique. A titre d’exemple, Montsoreau, ancienne seigneurie était aussi et surtout le port de l’abbaye de Fontevraud ce qui explique le développement de l’urbanisation à l’appui des cales et quais. D’une rive à l’autre, bacs, ponts, péages ont conditionné les implantations humaines et l’organisation de l’espace en créant des relations entre les deux rives.

Registre de quais et cales préservé et réaménagé pour accueillir du stationnement tout en permettant l'accès au fleuve (Saint- Clément-des-Levées) en grand format (nouvelle fenêtre)
Registre de quais et cales préservé et réaménagé pour accueillir du stationnement tout en permettant l’accès au fleuve (Saint- Clément-des-Levées)


Un fleuve qui sort de son lit mais qui reste aujourd’hui contenu
Architecture et pratiques agricoles témoignent d’un savoir-vivre ancestral avec la Loire : les maisons sont construites « dans le sens du courant » et les grèves sont fixées par une végétation dense. Cependant, si les fureurs du fleuve et des rivières n’ont pas fait fuir la population, l’implantation humaine a été freinée par les crues incroyables et non maîtrisées. Un enjeu important s’exerçait donc sur la maîtrise de l’eau. Au fil des siècles, des turcies à la levée, les mesures de protections contre les fureurs du fleuve ont permis de contenir les crues qui si elles restent impressionnantes dans leur majesté, et dans leur amplitude ne sont pas trop dévastatrice dans cette unité.

Perception et usages différents entre basses et hautes eau de La Loire – Le Thoureil en grand format (nouvelle fenêtre)
Perception et usages différents entre basses et hautes eau de La Loire – Le Thoureil

Perception et usages différents entre basses et hautes eau de La Loire – Saint-Mathurin-sur-Loire en grand format (nouvelle fenêtre)
Perception et usages différents entre basses et hautes eau de La Loire – Saint-Mathurin-sur-Loire

Portes de Loire – Saint-Martin-de-la-Place en grand format (nouvelle fenêtre)
Portes de Loire – Saint-Martin-de-la-Place



Le renforcement de la levée a amené aussi des contournements de bourgs comme à la Daguenière ou à Saint-Martin-de-la-place : est aujourd’hui contournée. La perception du bourg en est vraiment modifiée. L’ancienne levée bâtie de part et d’autre, constitue la rue principale du bourg, et proposait une image qualitative du bourg soulignée par les façades bâties. Aujourd’hui la levée contourne le bourg et en montre les arrières de parcelles, elle crée une rupture fonctionnelle et parfois visuelle entre le bourg et le fleuve.

Evolution de la perception du bourg suite à son contournement par la levée ligérienne – Saint-Martin-de-la-Place en grand format (nouvelle fenêtre)
Evolution de la perception du bourg suite à son contournement par la levée ligérienne – Saint-Martin-de-la-Place



La levée ponctuellement habitée
La levée est une infrastructure construite et surélevée, ligne structurante du paysage elle présente un impact très différent depuis la Loire ou depuis les terres :

  • Depuis la Loire, elle est perçue comme une ligne graphique, rigide et claire qui contraste avec la végétation souple et ponctuelle de la ripisylve et les variations de couleur et de texture du fleuve. De ce point de vue, elle constitue une limite visuelle bordant la Loire au nord sur tout son linéaire.
Ligne graphique de la levée ligérienne perçue depuis la rive gauche (Le Thoureil) en grand format (nouvelle fenêtre)
Ligne graphique de la levée ligérienne perçue depuis la rive gauche (Le Thoureil)

  • Depuis les terres, la levée ne se perçoit qu’au dernier moment, intégrée par une végétation dense alternant avec l’habitat linéaire en contrebas. Cette frange d’urbanisation est animée par une végétation de parcs et jardins, avec parfois des essences exotiques rappelant la proximité de la Loire. Elle induit par ailleurs une perception orientée du paysage de l’unité paysagère : Situé en position dominante, cet axe structurant permet une découverte panoramique d’ensemble du paysage de cette unité, embrassant de part et d’autre le val cultivé, ponctué de végétation, limité au nord par les contreforts boisés du Baugeois et la Loire soulignée, çà et là, par une ripisylve et le coteau boisé et urbanisé (rive gauche).
La levée ligérienne, premier plan maçonné entre Loire et bourg (Saint-Clément-des-Levées) en grand format (nouvelle fenêtre)
La levée ligérienne, premier plan maçonné entre Loire et bourg (Saint-Clément-des-Levées)


Pour en savoir plus sur l’exploitation du val d’Authion, polder fluvial
Le bassin versant de l’Authion et les aménagements de l’homme : une histoire ancienne qui conditionne la situation actuelle - Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux du bassin versant de l’Authion - Synthèse de l’Etat des lieux pages 4 & 5
Télécharger l’extrait de l’Etat des lieux du SAGE

La voie ferrée, la RD 347 et l’A85
Axes routiers fonctionnels et économiques la RD 347 et l’A85 emprunte le val d’Anjou et prennent appui au nord en dehors de zones inondables. Ces infrastructures routières constituent des caractères identitaires de l’unité paysagère et contribuent à sa mise en scène, ils s’accompagnent de dynamiques paysagères majeures qui sont détaillées dans le chapitre correspondant. Ils constituent par ailleurs des axes privilégiés de la découverte de l’unité dont on perçoit toute l’ampleur, mettant en scène quelques éléments du patrimoine bâti comme le château de Saumur. Seul le fleuve reste invisible.
La voie ferrée contribue au développement économique et résidentiel des bourgs ligériens, favorisant leur accessibilité et leur desserte. Espace de découverte du val, ces infrastructures impactent la topographie du val (levée ferrée, franchissement) et l’urbanisation (rupture nord-sud).

Découverte du val, accessibilité et desserte facilitée par la voie ferrée pour les bourgs ligériens (Saint-Mathurin-sur-Loire) en grand format (nouvelle fenêtre)
Découverte du val, accessibilité et desserte facilitée par la voie ferrée pour les bourgs ligériens (Saint-Mathurin-sur-Loire)



Des axes secondaires nord-sud
Sinueux, étroits, parfois soulignés de haies bocagères, les axes secondaires traversent perpendiculairement le large sillon ligérien reliant ainsi les bourgs du val d’Authion à ceux de la levée ligérienne. Par leur intermédiaire, toute la diversité paysagère de cette unité et la succession des différentes bandes parallèles qui la constituent se révèlent.

Alternance et jeux de covisibilités

L’organisation particulière de l’unité paysagère du val d’Anjou et la diversité des axes de circulation et donc de perception génèrent un paysage original, fort et orienté. Ces vues d’échelles différentes contribuent à la qualité de ce paysage patrimonial identifié patrimoine mondial de l’UNESCO :

  • Des vues longues et dégagées depuis les crêtes des coteaux permettant la perception de toute la vallée, embrassée d’un seul regard (échelle du monumental)
  • Des vues panoramiques continues depuis la levée ligérienne en position dominante s’accompagnant d’une perception orientée, le val d’Authion d’une part et la vallée de la Loire d’autre part (échelle humaine)
  • Des vues canalisées sur la vallée de la Loire depuis sa rive gauche et depuis le fleuve lui-même, induisant un champ de vision étroit mais pouvant être profond (échelle humaine voire intime)
  • Des vues plus ou moins courtes, toujours fermées par les coteaux boisés au sein du val d’Authion, assurant la mise en scène du polder fluvial au travers d’écrans végétaux successifs (échelle humaine voire parfois intime)

Pour aller plus loin sur le patrimoine culturel et naturel

Patrimoine culturel :

Patrimoine naturel :

Sources bibliographiques

  • Atlas des paysages de Maine-et-Loire. Département de Maine-et-Loire, DIREN, Pays de la Loire, DDE Maine-et-Loire Version éditée Le Polygraphe, 2002.
  • BOSC & PIGOT, VU d’ICI, Bruno DUQUOC. Dossier Etude de l’Atlas de paysages de Maine et Loire. 1999 – 2001.
  • Laboratoire régional des ponts et chaussées d’Angers. Étude cartographique des aléas liés à la présence de cavités dans la région saumuroise. DDE de Maine-et-Loire SAUE/CM ANGERS. 1996.
  • B. DUQUOC. Étude sur la maison de la vallée. In : Annexe du dossier OPAH de la vallée de l’Authion. 1981- 1983.
  • Annexe du dossier OPAH de la vallée de l’Authion - 1981 – 1983
  • Revue 303, Des blairies aux fours à chanvre, architecture rurale de la vallée d’Anjou (98)
  • Étude sur la maison de la vallée par Bruno Duquoc
  • Annexe du dossier OPAH de la vallée de l’Authion. 1981-1983.
  • Revue 303. Des blairies aux fours à chanvre, architecture rurale de la vallée d’Anjou. 1998.
  • P. NEHLIG. Géologie du bassin de la Loire. HAL Id : hal-00663278. (Consulté en 06/2015)

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