Composer un paysage valorisant pour les zones d’activités économiques

publié le 19 avril 2016

A travers une publication détaillée parue en novembre 2011, le CAUE de Loire-Atlantique a souhaité s’interroger sur les enjeux de qualité des zones d’activités et guider les acteurs locaux dans leur choix urbains, paysagers et architecturaux pour la mise en œuvre de tels projets. Ainsi, dans le texte ci-après, les passages en italiques sont extraits du guide : (Ré)inventer les zones d’activités élaboré par le CAUE de Loire-Atlantique.

Choisir le bon emplacement : éviter les implantations en point haut – concilier l’effet de vitrine et le maintien de la qualité de l’entrée de ville – gérer les espaces de recul entre les voies et les bâtiments

Dès les prémices du projet, suite à l’identification d’un besoin, doit se poser la question du rôle de la future zone d’activités et des interactions qu’elle sera amenée à avoir avec son territoire, à grande échelle. Le choix d’une implantation n’est pas anodin et doit toujours s’effectuer dans l’optique d’avoir la bonne activité au bon endroit. Le « bon endroit » doit s’entendre à la fois pour les entrepreneurs et les personnes susceptibles de venir sur la zone mais aussi et avant tout pour une meilleure insertion paysagère et urbaine.

En extension comme en création, le site naturel d’implantation (relief, écoulement des eaux ou végétation existante) doit structurer les principes de composition du projet. Il s’agit de les respecter et d’en faire des atouts.

Un espace de recul du bâti d'activités géré par le végétal conciliant qualité d'entrée de ville et effet vitrine (Beaucouzé)
Un espace de recul du bâti d’activités géré par le végétal conciliant qualité d’entrée de ville et effet vitrine (Beaucouzé)


Concevoir les zones d’activités comme des opérations d’urbanisme qui composent avec les quartiers et le paysage environnant

La multiplication des zones d’activités économiques réalisées de manière discontinue des tissus urbains existants pose la question de leur intégration et de leur traitement paysager.

Intégrer systématiquement le paysage comme donnée de base structurelle d’un projet d’aménagement est un enjeu fort pour ne pas accentuer l’effet « hors-sol » des zones d’activités.

L’implantation de la zone d’activités nécessite de définir le parti d’insertion dans le site qui doit être parfaitement diagnostiqué. L’environnement naturel doit être étudié avec attention : la topographie, le sol, la végétation, les vues, le réseau hydrologique, ainsi que les systèmes paysagers et agricoles.

L’environnement urbain influe aussi sur l’approche paysagère du site : trame des infrastructures, éléments patrimoniaux, nature des parcelles voisines (résidentielles, tertiaires,…). Ces éléments offrent des accroches ou des limites à préserver, qui, prises en compte lors de l’élaboration du projet, confèrent au lieu une réelle plus-value.

En effet, l’intégration de ces données dans l’aménagement paysager contribue à créer une identité visuelle cohérente pour l’espace d’activités.

Les percées visuelles à travers la zone d’activités contribuent à inscrire le site dans son territoire : le végétal est un moyen de cadrer des vues afin de ne pas enclaver le quartier.

La réalisation d’infrastructures nécessite parfois la destruction de motifs paysagers (bocage, ruisseau, boisement…) propres à l’unité paysagère. Limiter ces impacts et favoriser leurs recompositions constituent des enjeux essentiels pour le maintien du caractère identitaire de l’unité paysagère mais aussi pour une meilleure intégration des infrastructures. L’enjeu est de retrouver une cohérence par rapport à l’identité de chaque unité.

Les secteurs d’activités composent parfois des micro-paysages qui dans le cadre des implantations industrialo-portuaires de l’estuaire ligérien trouvent un aspect identitaire certain avec ce paysage monumental spécifique. La considération de cette identité dans le développement de l’estuaire est un enjeu stratégique pour cet espace qui l’est tout autant.

L'île de Nantes, exemple de reconversion d'une zone industrielle en zone urbaine mixte : des activités qui s'inscrivent dans le schéma urbain et l'identité ligérienne du cœur de ville
L’île de Nantes, exemple de reconversion d’une zone industrielle en zone urbaine mixte : des activités qui s’inscrivent dans le schéma urbain et l’identité ligérienne du cœur de ville


Composer des espaces publics de qualité

Travailler la composition du quartier en fonction des différentes vocations des entreprises de la zone apporte une cohérence à chaque secteur et facilite la hiérarchisation des voies, des implantations, des espaces publics. Le plan de composition des espaces publics précise les intentions d’alignement, d’implantations, de volumes qui vont structurer ses limites. Les gabarits sont adaptés aux dimensions des voiries pour donner à certains secteurs du quartier une dimension moins routière, et les hiérarchiser. Ce travail doit prendre en compte les possibles extensions.

Parking commun et de covoiturage avec un traitement qualitatif en entrée du Ouest Park (sortie Sablé-La Flèche sur l'A11)
Parking commun et de covoiturage avec un traitement qualitatif en entrée du Ouest Park (sortie Sablé-La Flèche sur l’A11)


Il sera plus adapté d’implanter un véritable espace public à proximité des entreprises dont les voies n’ont pas besoin d’être surdimensionnées. Cela permet de mettre en évidence une thématique de la zone d’activités, un savoir-faire particulier… Le choix du mobilier urbain et son intégration, par une recherche esthétique et fonctionnelle, participent à la perception de cette identité : panneaux signalétiques, bancs, abribus, luminaires, transformateurs électriques… L’implantation des services et le positionnement des repères visuels, des espaces publics, des intersections sont des éléments incontournables dans la composition d’un véritable quartier d’activités.

Les espaces publics jouent un rôle considérable dans l’image d’un parc, il faut leur donner une structure et une proportion adaptées à chaque secteur dans un souci de diversité d’ambiances

Assurer la cohérence et la qualité architecturale des bâtiments (éléments pouvant être intégrés aux cahiers des charges ou aux chartes des zones d’activités)

La cohérence entre le vocabulaire architectural et l’usage des bâtiments facilite l’identification immédiate de l’activité : industries, entrepôts, artisanat, tertiaire ou services. Elle permet la hiérarchisation du quartier, en organisant des secteurs et des typologies d’entreprises.

Cette adéquation est propice à l’expression d’une architecture de qualité. La cohérence des volumes, des matériaux, des implantations, des limites, est donc un point essentiel du projet global de chaque secteur. Trop souvent monolithes, les volumes des entreprises peuvent jouer avec les alignements et s’adapter aux différents usages. La cohérence s’exprime par des lignes fortes, des rythmes, des alignements, sans être homogène ou systématique.

Un cadre de règles urbaines, architecturales et paysagères précises et simples pour la conception de chaque projet d’entreprise garantit une unité fonctionnelle et esthétique du quartier. Cela peut se traduire dans un cahier des prescriptions sur lequel chaque entreprise peut s’appuyer. C’est grâce à la sensibilisation que les chefs d’entreprises s’approprient le plan de référence du quartier et en respectent les lignes directrices. Un accompagnement par un architecte et un paysagiste peut prolonger la mission de conception des espaces publics en proposant un service de conseil et de visa.

Il s’agit de proposer des palettes d’ambiance, d’ouvrir les gammes aux matériaux innovants, d’imposer des qualités de finition tant sur les détails que sur les accroches avec les sols…

Masquer ou accompagner les zones de stockage et les aires de manœuvre et de stationnement

La qualité architecturale n’est pas qu’un coût supplémentaire, elle est le fruit d’une réflexion et d’un travail en amont entre un concepteur et un maître d’ouvrage. Une conception qui prend en compte les enjeux de l’entreprise (le process, les stockages avant et après transformation, la communication, l’attractivité) et les hommes qui y vivent.

Loin d’être anodins, ces éléments par leur nombre finissent par « polluer » les regards. Les choix doivent se faire dans un souci de cohérence, d’économie en analysant les réels besoins. Faut-il clôturer l’ensemble d’une parcelle, ou seulement la partie du stockage ? Les aires de stockage doivent être prises en compte dès la conception de l’ensemble des bâtiments.

Une intégration par le bâti et le végétal des espaces publics et espaces … de la zone d'activités de la sortie A83 des Essarts (Source : CAUE 85)
Une intégration par le bâti et le végétal des espaces publics et espaces … de la zone d’activités de la sortie A83 des Essarts (Source : CAUE 85)


Travailler l’insertion dans le paysage des bâtiments les plus isolés (implantation, topographie, architecture, clôture, plantations)

Certains bâtiments, en raison des nuisances qu’ils provoquent, ou par opportunité foncière, se retrouvent pleinement isolés de tout contexte urbain et ne participent pas à un aménagement d’ensemble. A cette échelle fine d’un seul bâtiment, l’intégration paysagère est tout aussi importante que pour une zone d’activité.

Pour un bâtiment isolé, l’insertion dans le paysage passe en premier lieu par le choix de l’implantation, en évitant les secteurs trop impactant de type ligne de crête et en s’appuyant sur la végétation environnante. L’orientation de la construction doit répondre à la topographie du site afin de minimiser les terrassements, au-delà de l’insertion paysagère, cela limite les coûts de la construction. Enfin le choix des matériaux et de l’aspect architectural du bâtiment mais aussi des clôtures peut s’appuyer sur des principes de sobriété et de simplicité sans pour autant tirer la qualité du bâtiment vers le bas.

Un exemple de volume simple bardé en bois adapté à un contexte rural - Hôtel d'entreprise à Puceul (44) - GLV architectures - © Ph. Ruault
Un exemple de volume simple bardé en bois adapté à un contexte rural - Hôtel d’entreprise à Puceul (44) - GLV architectures - © Ph. Ruault


Mettre en place des stratégies économiques intercommunautaires pour favoriser les mutualisations des zones d’activités économiques pour éviter les zones fantômes

En matière de développement économique, la multiplication des zones d’activités est parfois découplée de la demande réelle et se traduit souvent dans le paysage par des espaces viabilisés qui restent plusieurs années en « attente ». Dans ce cadre, la mise en place de stratégies économiques intercommunautaires favorisant la mutualisation et le recentrage urbain, et freinant la dilution des parcs d’activités constitue un des enjeux prioritaires.

Au sein même des zones d’activités, les faibles coûts fonciers peuvent engendrer des surconsommations comparativement aux besoins réels. L’optimisation des zones d’activités existantes et à venir va permettre également de limiter les futurs besoins.

Mettre en œuvre des opérations de renouvellement urbain sur les anciens secteurs d’activités désaffectés en cœur de tissu urbain

Dans les paysages urbains, les évolutions fonctionnelles et urbaines ont engendré des potentialités en matière de mutation et d’optimisation foncière. La mise en œuvre d’opérations de renouvellement urbain sur ces sites est un facteur déterminant pour limiter la consommation foncière.

En réexploitant un ancien karting, en cluster économique, sur l'île de Nantes, l'opération concentre 40 entreprises dans le tissu urbain de la ville. (Source : Karting)
En réexploitant un ancien karting, en cluster économique, sur l’île de Nantes, l’opération concentre 40 entreprises dans le tissu urbain de la ville. (Source : Karting)